Certains secrets des amphibiens peuvent aider à la guérison des cicatrices chez l’homme

A l’université de Manchester (Royaume-Uni), la faculté qu’ont certains amphibiens de régénérer leurs membres après une amputation est étudiée de près. Ainsi, le professeur Enrique Amaya précise que les protéines des amphibiens sont fort semblables à celles de l’homme, ce qui signifie que « tout ce que nous apprendrons sur les grenouilles et les salamandres pourra être appliqué à l’homme. Les embryons de ces animaux sont également des sujets d’étude relativement faciles ». Le travail sur la régénération tissulaire a débuté, à Manchester voici dix ans, lorsque Mark Ferguson a montré que la plupart des embryons animaux guérissent des coupures plus complètement que les sujets adultes. En effet, ces derniers présentent souvent des cicatrices, les embryons jamais.

Un médicament pour réduire les cicatrices postopératoires sera bientôt disponible

« La protéine responsable de cette guérison est appelée TGF bêta 3 (Transforming Growth Factor bêta 3). Elle est présente en faible quantité chez l’adulte, mais elle est abondante chez l’embryon, où elle joue un rôle éminent dans la multiplication cellulaire. » L’équipe de Mark Ferguson a déjà isolé cette protéine et a mis au point sa synthèse. Le médicament qui en résulte, baptisé Juvista, et son développement industriel reposent sur Renovo, société partenaire de l’université. Deux essais cliniques, en cours, laissent penser que Juvista pourra bientôt être utilisé pour traiter certaines cicatrices postopératoires. La chirurgie réparatrice de certaines plaies accidentelles de la face laisse en effet souvent des cicatrices qui défigurent le blessé. Le nouveau produit administré par voie sous-cutanée au cours de l’opération permettra de les réduire considérablement.

Les chercheurs se concentrent donc à présent sur la façon d’amenuiser encore les cicatrices postopératoires. « Il ne s’agit pas, selon Enrique Amaya, de traiter les poches sous les yeux de ces dames, mais d’aider les personnes dont le visage a été déformé à la suite d’un grave accident. » Les travaux en cours à Manchester chez les amphibiens permettront d’y parvenir. Les têtards du genre Xenopus sont particulièrement pratiques pour la recherche d’autres agents biochimiques. En outre, quelques espèces, surtout les salamandres, sont depuis longtemps réputées pour la régénération de leurs membres après une amputation.

« Si nous parvenons à découvrir les agents biochimiques et les facteurs de croissance qui jouent un rôle dans la régénération, cela aura d’importantes applications. La régénération d’un membre met en œuvre le sang, l’os et le muscle ; ces éléments doivent croître d’une façon bien ordonnée. Si nous sommes capables de comprendre ce qui se passe chez les amphibiens, nous pourrons envisager une application à l’homme », avance l’un des chercheurs. L’aboutissement de ce programme peut encore nécessiter des années. En revanche, il sera prochainement possible de réduire les cicatrices que certains accidents laissent à leurs victimes.

• Source : Robin McKie : « Nature’s tiny wonders heal human scars », The Observer, 18/11/2007.