Les océans et les cours d’eau sont de plus en plus affectés par les activités humaines - La Semaine Vétérinaire n° 1309 du 04/04/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1309 du 04/04/2008

Anthropisation

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Alain Zecchini

Tous les espaces maritimes sont marqués, peu ou prou, par l’influence humaine et 41 % d’entre eux la subissent fortement. Telle est la conclusion, peu encourageante, à laquelle sont parvenus des chercheurs américains et canadiens(1). Les causes de l’altération ou de la destruction des habitats marins sont connues : le déversement des polluants et des nutriments dans la mer, via les rivières, la surexploitation des ressources (biotiques et abiotiques) avec, par voie de conséquence, la désorganisation des chaînes trophiques et la disparition d’espèces.

Pour la première fois, une tentative de modélisation de l’ensemble des impacts anthropogéniques a été réalisée, associant dix-sept facteurs de causalité pour vingt écosystèmes marins. Le constat le plus préoccupant n’intéresse que 0,5 % du total, mais représente 2,2 millions de kilomètres carrés. C’est la mer de Chine orientale (zone du Japon) qui est la plus touchée. Sans surprise, pour l’ensemble des écosystèmes, les plateaux continentaux et les récifs de corail sont davantage fragilisés. A contrario, les eaux pélagiques et les régions arctique et antarctique (3,7 % des surfaces marines pour ces dernières) restent encore, sinon épargnées, du moins soumises à de moindres pressions. Les facteurs de causalité associés aux changements climatiques (température de l’eau, structures benthiques, acidification, etc.) sont repérés dans tous les océans.

Plusieurs facteurs peuvent s’associer pour créer une synergie d’impacts

Les chercheurs s’appuient sur cette étude pour promouvoir une meilleure gestion de l’espace maritime. Dans la mesure où l’évaluation plus précise des impacts humains est maintenant possible, il s’agit de les réduire. Il existe déjà des outils, comme les modifications des zones de pêche et des routes maritimes, pour protéger des écosystèmes sensibles. Toutefois, les auteurs rappellent que les besoins humains vont s’accroître. Il y a donc des choix stratégiques à réaliser.

Sur la Terre, l’augmentation de l’eutrophisation des écosystèmes aquatiques, due aux rejets d’azote et de phosphore notamment, est reliée à l’émergence de maladies qui touchent autant l’homme que la faune sauvage (choléra, fièvre à virus West-Nile, malaria entre autres). Une récente démonstration de ces interactions a eu lieu, avec comme acteur principal un membre de la famille des Trématodes, un ver parasite, Ribeiroia ondatrae(2). Il infecte les escargots d’eau douce, les larves d’amphibiens, les oiseaux aquatiques. Chez les amphibiens notamment, il entraîne des malformations, la disparition de membres ou l’apparition de membres surnuméraires. Les séquences de ces infections ont été précisées par des expérimentations. La multiplication des intrants chimiques renforce l’eutrophisation, laquelle fait se développer la production d’algues. Les escargots (herbivores), qui se nourrissent d’algues, prolifèrent et, comme il sont les hôtes du parasite, ce dernier se multiplie et est donc présent dans les œufs des escargots. Les amphibiens, qui mangent ces œufs, sont affectés à leur tour, puis des oiseaux peuvent consommer les amphibiens, affaiblis par leurs malformations. Les amphibiens, qui représentent la classe de vertébrés la plus menacée au monde, sont donc particulièrement sensibles à l’eutrophisation. D’autant plus qu’ils doivent déjà compter (comme tous les habitants des cours d’eau et des zones humides) avec les concentrations en pesticides et en métaux lourds, particulièrement néfastes pour les écosystèmes d’une façon générale.

  • (1) B. Halpern et coll. : « A global map of human impact on marine ecosystems », Science, 15/2/2008.

  • (2) P. Johnson et coll. : « Aquatic eutrophication promotes pathogenic infection in amphibians », Proceedings of the National Academy of Sciences, Etats-Unis, 2/10/2007.

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