Les connaissances sur l’épidémiologie de l’arbovirose restent fragmentaires - La Semaine Vétérinaire n° 1308 du 28/03/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1308 du 28/03/2008

Fièvre catarrhale ovine. Recherches sur la maladie

Actualité

Auteur(s) : Michel Bertrou

Les travaux sur la blue tongue, initiés dans plusieurs pays, sont longs et lourds à mettre en place.

Les Culicoides, vecteurs de la fièvre catarrhale, ne vont pas tarder à reprendre leur activité printanière en Europe. Le recours massif à la vaccination ne doit pas occulter la nécessité de mener, en parallèle, des études scientifiques pour comprendre la dynamique de cette arbovirose, notamment les mécanismes qui lui permettent de franchir l’hiver, alors qu’aucune transmission verticale (de l’adulte à la larve) du virus n’est démontrée chez le vecteur. Les recherches épidémiologiques, entomologiques et virologiques sont actuellement insuffisantes et suscitent davantage de questions qu’elles n’apportent de réponses. Les multiplier et les coordonner entre les laboratoires est un enjeu majeur pour la gestion sanitaire à venir des cheptels européens. Si le sérotype 8, d’origine subsaharienne, s’est acclimaté aux vecteurs autochtones, d’autres sérotypes ou d’autres virus, comme celui de la peste équine (african horse sickness), suivront prochainement son exemple.

Un nouveau vecteur potentiel, C. chiopterus, est identifié

Des travaux néerlandais viennent de mettre en évidence un nouveau vecteur potentiel de la maladie, C. chiopterus. Une analyse virologique par polymerase chain reaction (PCR) sur l’un des broyats de ce spécimen s’est révélée positive, comme en 2006 pour C. dewulfi. Ces deux espèces, souvent assimilées, à tort, au complexe obsoletus, présentent des spécificités communes, intéressantes en termes épidémiologiques : elles s’attaquent aux bovins comme aux chevaux et se reproduisent exclusivement dans les déjections. Sans doute moins répandus que le complexe obsoletus, ces deux vecteurs sont toutefois très présents aux Pays-Bas, comme le montrent les observations néerlandaises. Des inventaires dans les autres pays européens devront compléter ces données.

Lors d’un symposium scientifique sur la fièvre catarrhale organisé la semaine dernière à Bruxelles, le professeur Eric Haubruge, de la faculté universitaire de Gembloux (Belgique), a par ailleurs estimé que de nombreux vecteurs du nord de l’Europe fréquentent davantage les bâtiments d’élevage ou leurs abords immédiats que les prairies. C’est le cas du complexe obsoletus/scoticus, qui regroupe deux espèces de Culicoides morphologiquement proches et particulièrement courantes en Europe. Cet hiver encore, leur persistance à l’intérieur des bâtiments a été démontrée. D’après les piégeages effectués aux Pays-Bas durant l’hiver 2006-2007, 90 % des femelles capturées étaient nullipares, correspondant à de nouvelles émergences suscitées par des températures clémentes. La proportion de femelles pares piégées cette année est plus importante, accréditant l’hypothèse d’un cycle biologique maintenu au sein des élevages et d’une possibilité de transmission à bas bruit de la maladie pendant l’hiver. Eric Haubruge préconise des mesures hygiéniques simples comme l’élimination des refus alimentaires et le nettoyage annuel des aires de stockage d’ensilage.

La transmission verticale chez les ruminants est probable

Une autre possibilité évoquée pour expliquer le passage hivernal de la maladie (ou overwintering) serait une virémie prolongée chez certains animaux. Il est certes possible de détecter des fragments du virus (par PCR) pendant plus de deux cents jours, mais cela ne suffit pas pour valider cette hypothèse. En revanche, les événements survenus en février en Irlande du Nord, chez des génisses gestantes provenant des Pays-Bas, ont avivé une autre présomption de transmission : la voie transplacentaire, déjà suspectée par les acteurs de terrain. Trois des génisses importées en janvier, séropositives aux tests Elisa et négatives à la PCR, ont en effet donné naissance à des veaux séronégatifs et positifs à la PCR. Les scientifiques de l’Institut de santé animale (IAH) britannique de Pirbright ont évoqué la possibilité que le virus puisse ainsi franchir la période hivernale par ce relais fœtal, les veaux nés au printemps constituant de nouveaux réservoirs de virus. Ils devraient prochainement engager des recherches sur cette question.

Lors du symposium de Bruxelles, Piet Van Rijn, un chercheur néerlandais, a rapporté la réalisation d’une transmission transplacentaire expérimentale par l’injection de doses massives de virus chez une vache, au laboratoire de Lelystad (Pays-Bas). Jusqu’à présent, cette transmission n’avait été observée que chez des ovins et avec des souches de laboratoire (non sauvages) du virus de la blue tongue.

Plus surprenante, l’infection orale (par l’ingestion forcée de placenta) aurait elle aussi été montrée en laboratoire. Cela reste à confirmer, mais l’hypothèse figure parmi celles que les scientifiques de l’IAH envisagent pour expliquer comment, en Irlande du Nord et en Ecosse, des bovins se sont positivés à la PCR cet hiver, en l’absence de Culicoides et après un contact avec des veaux PCR +.

Les recherches sur la fièvre catarrhale sont longues et lourdes à mettre en place. Elles réclament le développement conjugué de techniques sophistiquées en entomologie et virologie. Par ailleurs, la difficulté d’élever en laboratoire les espèces sauvages de Culicoides les rendent tributaires de l’activité vectorielle. En France, le contingent de spécialistes est insuffisant. Cette carence de chercheurs reste le principal écueil. Consciente du problème, la Direction générale de l’alimentation (DGAL) a prévu une convention élargie avec le Cirad(1) pour permettre l’embauche de personnel supplémentaire. En raison des retards administratifs, cette convention, prévue de longue date, n’est toujours pas signée.

  • (1) Centre international de recherche agronomique pour le développement.

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