UNE NOUVELLE ÈRE S’OUVRE POUR LES PETITES ENTREPRISES - La Semaine Vétérinaire n° 1307 du 21/03/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1307 du 21/03/2008

À la une

Auteur(s) : Marine Neveux

Si le rapport Attali a suscité le mécontentement de nombreux confrères en raison des inexactitudes qu’il comporte, certaines des propositions émises ne sont pas inédites et préfigurent le nouveau cadre dans lequel les très petites entreprises, dont les structures vétérinaires, seront amenées à évoluer dans les prochaines décennies.

Face aux propositions du rapport Attali, aux injonctions de Bruxelles et aux évolutions de la société, les vétérinaires, comme d’autres professions libérales et réglementées, s’interrogent et s’inquiètent. Le rapport Attali, notamment, constitue-t-il l’amorce d’un nouvel environnement pour les très petites entreprises (TPE) ou l’emballement médiatique suscité est-il amené à retomber rapidement ? En raison des erreurs des auteurs et de leur méconnaissance affichée des spécificités de l’exercice, de nombreux confrères espéraient que ce texte resterait dans les cartons. Pourtant, le Premier ministre a mis à mal cet espoir, en précisant, le 1er février dernier, que « l’ouverture des professions réglementées [devrait] aboutir, après concertation, en 2008 ».

La loi de modernisation du marché du travail, dont la promulgation est prévue d’ici à cet été, montre également que l’heure semble bien au changement de certaines réalités juridiques, fiscales ou sociales. Il reste à savoir si elle représentera une opportunité pour les libéraux.

« L’idée d’une profession libérale nantie et indépendante n’est plus vraie »

En France, les professions libérales regroupent près de 560 000 professionnels qui appartiennent à des corps de métiers variés : notaires, avocats, architectes, médecins, etc. Les domaines concernés vont ainsi de la santé au droit. Selon le rapport Attali, ils se distinguent notamment par « des mécanismes de protection mis en place depuis parfois plusieurs siècles pour garantir aux consommateurs la qualité des services fournis, mais aussi pour réduire la concurrence dans les activités concernées ». Les auteurs évoquent même la création progressive de « véritables rentes ». Pourtant, selon Loïc Geslin, membre coordinateur du Comité de liaison interOrdres (Clio) « l’idée d’une profession libérale nantie et indépendante n’est plus vraie »(1).

Pour Rémi Gellé, président du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), la commission Attali est « hors sujet » et l’ensemble du rapport « médiocre ». Ce dernier relève « de la politique politicienne. Si l’ensemble est à l’image des mesures et des préconisations qui sont faites pour les vétérinaires, à partir de données obsolètes et sans concertation avec les organisations professionnelles, j’ai de grandes inquiétudes. Je crains que cela ne soit qu’un “copier/coller” du rapport Cahuc-Kramarz », poursuit notre confrère. Pour sa part, Christian Rondeau, à la tête du Conseil supérieur de l’Ordre, s’estime « plutôt concerné par les onze principes évoqués pour conduire la réforme. Dix d’entre eux ne sont pas choquants. En revanche, plutôt que de définir l’intérêt du consommateur, la commission aborde essentiellement la prestation de services par le biais d’une approche économique. Or ce n’est pas une prestation économique, mais plus souvent une prestation intellectuelle ! Cela n’apparaît pas assez nettement dans le texte ».

Des propositions d’ordre juridique, fiscal et social

Les deux mesures qui recueillent la plus forte opposition de la part des confrères sont l’augmentation du numerus clausus et la délégation des actes(2). Mais au-delà de ces points spécifiques, d’autres dispositions du rapport pourraient également directement toucher les praticiens, puisqu’elles concernent l’ensemble des TPE et des professions libérales. Pourtant, toutes ne sont pas inédites, et certaines font déjà l’objet de négociations sociales et de projets de loi, à l’image de celui sur la modernisation du marché du travail (voir entretien avec Laurence Parisot, en page 30), qui instaure l’idée d’une rupture amiable du contrat de travail. L’objectif est alors le même : apporter une plus grande flexibilité dans les relations de travail, en se rapprochant alors du libéralisme. Le rapport envisage en outre plusieurs solutions pour simplifier les tâches administratives des TPE afin d’alléger leur environnement juridique, fiscal et social. Une ambition que plébiscite le vice-président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (voir entretien en page 31).

La création d’une agence au service des petites structures de moins de vingt salariés est notamment envisagée. Toutefois, selon Christian Rondeau, une telle agence « ne concerne pas la profession vétérinaire, car elle dispose d’un Ordre ». Pour sa part, Rémi Gellé exprime son scepticisme quant aux différentes mesures fiscales suggérées, « car les caisses de l’Etat sont déjà vides ».

La Commission européenne figure au rang des supporters du rapport Attali, dont elle salue l’orientation « dérégulatrice ». Jean-Francis Pécresse, chef du service “économie France” des Echos, souligne qu’il s’agit pour elle « d’une manière de relayer son appel à une accélération des réformes dans l’Hexagone ». L’an passé, Bruxelles a en effet lancé deux procédures d’infraction à l’encontre de l’Etat français, dont l’une sur le monopole des officines des pharmaciens, une profession qui bénéficie actuellement du soutien de Roselyne Bachelot, ministre de la Santé. Par ailleurs, la France devra transposer la directive “services” d’ici à décembre 2009. Avec les débats sur les statutory bodies, elle illustre les changements qui se profilent depuis plusieurs années à l’échelon européen. « En ce qui concerne l’application de la directive “services”, il faut simplement regarder ce qui doit être changé, maintenu ou supprimé par rapport aux réglementations nationales actuelles. Nous travaillons en bonne intelligence avec notre ministère de tutelle, qui nous interroge sur les points mis en exergue par ce texte européen », souligne Christian Rondeau.

L’économie de l’entreprise vétérinaire libérale à faire connaître

Michel Barnier, ministre de l’Agriculture, a confié au sénateur Ladislas Poniatowski une mission sur l’économie de l’entreprise vétérinaire libérale, qui débutera à la fin du mois et devrait aboutir à un rapport d’ici à fin octobre. « Nous en espérons beaucoup. Dans le même temps, nous poursuivons les travaux de Valovet », souligne Rémi Gellé. Le contrat qui lie l’Etat au vétérinaire libéral, acteur incontournable de la politique sanitaire, pourrait être une base pour dessiner les contours de l’entreprise vétérinaire dans les prochaines décennies. Selon Rémi Gellé, « la contractualisation des tâches confiées au vétérinaire évolue. Elles peuvent s’inscrire dans le strict cadre du mandat sanitaire, mais peuvent aussi faire l’objet de délégations plus larges. Nous sommes ouverts aux propositions, et même demandeurs ». Dans ce cadre, le dossier de l’évaluation comportementale des chiens mordeurs est un début. « Etant donné le niveau d’endettement de l’Etat, il est urgent d’aller vers ce type de démarche. Par ailleurs, il reste plusieurs questions à trancher : quelle place l’Etat souhaite-t-il donner au vétérinaire dans l’organisation des territoires ? Quel maillage professionnel adopter pour la veille sanitaire ? Quelle proximité choisir pour assurer la continuité des soins et la sécurité sanitaire au service de nos concitoyens ? Un vaste chantier, à confier de préférence à des gens sérieux… »

  • (1) Propos tenus dans Liaisons sociales magazine.

  • (2) Voir le commentaire du sondage dans La Semaine Vétérinaire n° 1303 du 22/2/2008 en p. 10 et l’article en page 32 de ce numéro.

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