Ouverture du capital, délégation d’actes et numerus clausus cristallisent les inquiétudes - La Semaine Vétérinaire n° 1307 du 21/03/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1307 du 21/03/2008

Le rapport Attali et les craintes sous-jacentes

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Auteur(s) : Marine Neveux

Les confrères sont soucieux de conserver leur indépendance et de préserver les prérogatives de leur exercice.

L’ouverture du capital des sociétés figure parmi les pistes de réflexion du rapport Attali. Il ne s’agit certes pas d’une idée nouvelle – elle est d’ailleurs partiellement appliquée dans le secteur vétérinaire –, mais les avis sur son bien-fondé pour les très petites entreprises (TPE) restent partagés. Certains y voient une opportunité, d’autres un risque. Limiter l’entrée dans le capital aux seuls confrères semble alors une réponse aux craintes exprimées, mais plusieurs voix s’élèvent pour envisager d’ores et déjà l’ouverture de l’entreprise vétérinaire, à terme, à divers investisseurs.

Selon Jean-Louis Jamet, vice-président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), cette possibilité « inquiète plusieurs professions, par exemple celle des pharmaciens, dont l’organisation est particulièrement réglementée, notamment en termes de répartition géographique. En cas d’ouverture du capital, les pharmaciens deviendront des salariés et ne seront plus propriétaires de leurs officines. Or ces professionnels sont des acteurs du service public, attachés à un territoire, qui bénéficient de la confiance du public et sont indépendants. Comment envisager que la grande distribution puisse prendre les rênes d’une officine, avec comme objectif de “faire du chiffre” ? Le pharmacien ne serait plus libre et perdrait son statut de libéral, avec les obligations et les règles qui s’y rattachent ».

Pourtant, « la dynamique qui vise à ouvrir le capital de toutes les professions réglementées est en marche, constate Martial Olivier-Koehret, président de l’Union nationale des médecins libéraux (UNML), dans un récent numéro du mensuel Liaisons sociales. Au risque de voir l’indépendance des professionnels remise en cause par les nouveaux propriétaires. » Un avis partagé par Christian Rondeau, président du Conseil supérieur de l’Ordre des vétérinaires, qui est en désaccord avec l’avis de la commission Attali concernant la dissociation de la détention du capital et de son exploitation. « La liberté de ceux qui exercent serait entachée si des tiers venaient à détenir la gestion du capital. Le mélange des genres est inacceptable, et cela s’applique à l’ensemble des professions. Le professionnel doit conserver la majorité du capital et il ne faut pas franchir la barre de la moitié [du capital détenue par un acteur extérieur] », estime notre confrère.

Pour Rémi Gellé, président du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), les problématiques de l’indépendance du praticien et de l’absence de conflit d’intérêts se posent en amont et en aval. Qui a intérêt à investir économiquement dans une clinique ? Un groupement de producteurs ? Un laboratoire ? Une association de protection animale ? « Je ne ferme pas la porte à une discussion, mais il faut préserver l’indépendance du professionnel et se dégager d’un conflit d’intérêts. »

La délégation s’envisage différemment selon la filière

L’augmentation du numerus clausus et la délégation d’actes sont deux autres craintes exprimées par les confrères lorsqu’ils évoquent le rapport Attali(1). Si Rémi Gellé ne se dit pas attaché au numerus clausus français, il estime que l’analyse des auteurs sur ce point n’est pas pertinente, car elle ne prend pas en considération la libre circulation des diplômés au sein de l’Europe et les données chiffrées actuellement disponibles. Ainsi, l’an passé, 45 % de diplômés étrangers figuraient parmi les nouveaux confrères installés inscrits à l’Ordre. Pour sa part, « la question de la délégation des actes est liée à celle de la démographie vétérinaire. Notre objectif est de fournir un travail rémunérateur, à la hauteur du niveau du cursus suivi par les vétérinaires. En effet, la profession n’est pas suffisamment nantie par rapport aux études et aux investissements requis », estime Rémi Gellé. Le fait que quatre mille confrères et consœurs exercent en salariat n’est pas le fruit du hasard. Cela traduit des freins à l’installation. « En outre, de nombreuses tâches peuvent déjà être dévolues aux différents membres de nos équipes et à nos auxiliaires, par exemple dans les domaines du conseil et de la vente, sans qu’il soit nécessaire de toucher à l’exercice de la médecine et de la chirurgie. Dans la filière bovine, il apparaît clairement qu’il n’y a pas de place pour une délégation des actes. En canine, elle peut s’envisager dans certains cas, à la condition que le praticien soit présent physiquement. » Dans le secteur équin et les productions hors sol, « de mauvaises pratiques y sont aujourd’hui constatées, par exemple la vaccination des volailles par les techniciens sans la présence d’un vétérinaire. Aussi, il convient de distinguer ce qui est acceptable ou non. En équine, les avis divergent. Certains confrères sont prêts à déléguer des actes, d’autres non ». Par ailleurs, en cas d’orientation vers une délégation d’actes, le président du SNVEL craint que d’autres structures s’en saisissent, comme les dispensaires pour le secteur canin ou les groupements en rurale, accroissant ainsi « les distorsions de concurrence dont elles se rendent déjà souvent coupables ». Enfin, « le risque de la délégation est aussi de favoriser les grosses structures et de “détricoter” le maillage rural. Dans ce domaine, il faut se méfier des esprits avant-gardistes, mais souvent postmodernes, qui s’expriment au sein de notre profession ! Il s’agit souvent d’individus qui sont déconnectés de la pratique de terrain et des réalités économiques ».

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1303 du 22/2/2008 en page 10.

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