Le lémur brun emblématique de Mayotte est menacé - La Semaine Vétérinaire n° 1307 du 21/03/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1307 du 21/03/2008

Biodiversité

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Marie Sigaud

Comme tous les lémuriens, ce petit primate arboricole originaire de Madagascar est en danger d’extinction.

La France occupe une place unique par la variété de ses collectivités d’outre-mer et donc de ses milieux naturels : du subarctique (Saint-Pierre-et-Miquelon) à l’Antarctique (Terre Adélie), en passant par les zones tropicales de trois grands océans. En dépit des surfaces terrestres limitées, souvent insulaires, la biodiversité présente dans ces territoires est remarquable et confère à l’Hexagone une grande responsabilité internationale en matière de conservation. Ainsi, plus de 98 % de la faune vertébrée et 96 % des plantes vasculaires spécifiques à la France sont concentrées sur 22 % du territoire.

Située dans le canal du Mozambique, entre Madagascar et la côte est africaine, Mayotte, collectivité française, s’étend sur une surface globale de 373 km2 qui fait géographiquement partie de l’archipel des Comores. D’origine volcanique, elle comprend deux îles principales (Grande-Terre et Petite-Terre), ainsi qu’une multitude de petits îlots. Elle possède une diversité biologique exceptionnelle qui risque d’être détruite par les activités humaines, ce qui en fait l’un des “points chauds” de la biodiversité terrestre.

Le lémur brun est le seul primate représenté à Mayotte

Comme dans la plupart des écosystèmes insulaires, la majorité des mammifères recensés aujourd’hui ont été introduits. C’est le cas d’une des espèces emblématiques de Mayotte, le lémur brun (Eulemur fulvus). Originaire de Madagascar, c’est la seule espèce de primate présente à Mayotte. Les dates et les circonstances de son arrivée dans l’archipel sont incertaines. Le plus ancien vestige de sa présence est situé entre le IXe et le XIIIe siècle. Le lémur brun appartient à l’ordre des primates et au sous-ordre des lémuriformes. Ce dernier regroupe une trentaine d’espèces constituées en cinq familles différentes. La répartition des espèces appartenant au sous-ordre des lémuriformes est strictement limitée à Madagascar et à quelques îles de l’archipel des Comores. A Mayotte, le lémur brun est appelé komba en shimaorais (langue d’origine bantoue), ancomba en shibushi (langue d’origine malgache), mais le plus souvent il est appelé par son nom vernaculaire français, maki.

Le lémur brun est un animal social et territorial

Ce primate de taille moyenne pèse entre 2 et 3 kg et ne présente pas de dimorphisme sexuel marqué. Il possède un pelage de couleur variable selon les individus, du gris-brun au brun. Le museau est noir et allongé et les sourcils et les joues sont plus clairs.

Il se nourrit de feuilles et de fruits. Il peut à l’occasion ingurgiter de la terre. Ce comportement de “géophagie” est souvent considéré comme un moyen de réguler le pH gastrique et de neutraliser par adsorption les tanins contenus dans les végétaux.

La période de reproduction est saisonnière et se décompose en trois temps : les accouplements (mai à juillet), la gestation (durée moyenne de cent vingt jours) et les naissances (de septembre à novembre). Les femelles ont en règle générale un petit par an, mais les naissances gémellaires ne sont pas rares. Les lémurs bruns ont une espérance de vie de vingt ans environ en milieu naturel, mais en captivité certains individus peuvent atteindre une trentaine d’années.

Arboricole, cet animal a colonisé l’ensemble des milieux forestiers de Grande-Terre depuis son introduction : il vit à la fois en forêt humide et sèche, aussi bien dans les milieux naturels que dans ceux plus ou moins dégradés. C’est une espèce sociale et territoriale. Son organisation sociale est encore mal connue. En effet, il ne vit pas en groupes stables, mais plutôt en “associations labiles”, de composition constamment changeante. La taille des groupes ne varie pas de façon significative entre les différents types d’habitats et avoisine en moyenne les huit ou neuf individus. C’est un animal qui possède un schéma d’activités dit “cathéméral”, c’est-à-dire partagé de façon équivalente entre le jour et la nuit.

Bien que présent par milliers à Mayotte, il est menacé d’extinction

Même si l’espèce semble commune à Mayotte (la dernière estimation de la population remonte à 2002 et faisait état de 42 000 à 72 000 individus), elle n’échappe pas à un certain nombre de menaces comme la diminution et la fragmentation de ses habitats forestiers, l’augmentation de la pression anthropique, ou encore la modification et l’évolution des pratiques agricoles. De façon plus anecdotique, le braconnage à des fins de consommation, ou encore la prédation sur les jeunes par les chiens et les chats errants sont d’autres menaces. Pourtant, à Mayotte, l’espèce est placée sous un arrêté préfectoral(1) qui fixe la liste des espèces animales terrestres intégralement protégées. Elle est également classée au titre de la convention de Washington en annexe I, c’est-à-dire parmi les « espèces menacées d’extinction ».

Plus globalement, tous les lémuriformes sont menacés par la destruction de leur habitat. Quatorze espèces de lémuridés ont déjà disparu depuis que l’homme s’est installé à Madagascar, il y a deux mille ans. Certains d’entre eux, les mégalapinés, avaient la taille d’un orang-outan.

  • (1) N° 347/DAF du 7/8/2000.

BIBLIOGRAPHIE

  • • O. Gargominy : Biodiversité et conservation dans les collectivités françaises d’outre-mer, Paris, UICN, 2003, 246 pages.
  • • R.R.A. Mittermeier, W.R. Konstant, F. Hawkins, E.D. Louis, O. Langrand, J. Ratsimbazafy et coll. : « Family Lemuridae », in Lemurs of Madagascar, 2e éd., Washington D.C., Conservation International, 2006, pp. 209-321.
  • • I. Tattersall : « Cathemeral activity in primates : a definition », Folia Primatol., 1987, n° 49, pp. 200-202.
  • • L. Lecointre, H. Leguyader : Classification phylogénétique du vivant, 3e éd., Belin Editions, Paris, 2009, 559 pages.
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