Le décompte des espèces n’est que l’une des mesures pour évaluer la biodiversité - La Semaine Vétérinaire n° 1302 du 15/02/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1302 du 15/02/2008

Liste rouge 2007 des espèces menacées

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Auteur(s) : Nathalie Devos

Si l’évaluation de la biodiversité passe aussi par celle des écosystèmes, de l’influence des activités humaines ou de l’adaptation au changement climatique, le décompte des espèces permet de constater son déclin.

La biodiversité doit être considérée dans son ensemble, en termes de gestion, mais aussi de services environnementaux (adaptation au changement climatique, évaluation des écosystèmes, estimation de l’influence des activités humaines, par exemple). Pour les experts, s’il ne suffit pas de fournir le décompte des espèces menacées ou éteintes, ce dernier a toutefois le mérite d’exister. Il permet de constater la diminution, voire le déclin de certaines d’entre elles. L’Union mondiale pour la nature (UICN)(1) a publié en septembre dernier sa liste rouge 2007 des espèces (animales et végétales) menacées.

25 % des mammifères, 12,5 % des oiseaux, et 70 % des plantes sont en péril

Parmi les 41 415 espèces qui font l’objet d’une évaluation par l’UICN, 16 306 sont menacées d’extinction, c’est-à-dire « en danger critique d’extinction », « en danger » et « vulnérables » (voir graphique en page 30), au lieu de 16 118 en 2006. 785 espèces sont éteintes et 65 autres n’existent qu’en captivité ou en culture. Un mammifère sur quatre, un oiseau sur huit, un tiers des amphibiens et 70 % des plantes évaluées dans la liste rouge 2007 sont en péril. Certes, l’inventaire de l’UICN est loin d’être exhaustif, puisque 1,7 à 1,8 million d’espèces sont aujourd’hui connues (sur les 15 millions qui vivraient sur Terre). Mais il demeure un bon outil d’évaluation de la biodiversité.

Du déclin des grands singes aux vautours en crise

La liste rouge illustre la disparition rapide de la diversité biologique en mettant en exergue le déclin particulier de certaines espèces. Ainsi, parmi les grands singes, le gorille de plaine occidental (Gorilla gorilla gorilla) est passé de la catégorie « en danger » à celle de « danger critique d’extinction ». Il a été décimé par le commerce de la viande de brousse et le virus Ebola. Depuis vingt à vingt-cinq ans, son effectif a diminué de plus de 60 %. L’orang-outan de Sumatra reste, pour sa part, « en danger critique d’extinction » et celui de Bornéo « en danger ». Tous les deux sont menacés par la perte d’habitat due à l’exploitation licite et illicite du bois et au défrichage des forêts pour faire place à des plantations de palmiers à huile.

Par ailleurs, pour la première fois, les coraux, victimes du réchauffement climatique et d’El ninio entrent dans la liste de l’UICN. 10 espèces des îles Galapagos ont été évaluées et inscrites à l’inventaire (elles sont « en danger critique d’extinction » ou « vulnérables »). 74 algues des mêmes îles font également leur apparition (« en danger critique d’extinction » ou « peut-être éteintes »). Elles sont menacées par l’augmentation de la température des mers et par les effets de la surpêche, qui élimine les prédateurs de la chaîne alimentaire et favorise ainsi la prolifération des oursins et autres herbivores consommateurs d’algues. Bien entendu, la surpêche maintient aussi la pression sur de nombreuses espèces de poissons. Mais la demande pour les aquariums n’est pas en reste. Ainsi, le poisson-cardinal de l’île de Banggai apparaît pour la première fois sur la liste rouge, dans la catégorie « en danger ». Uniquement localisé dans l’archipel de Banggai, en Indonésie, il est particulièrement exploité, avec environ 900 000 poissons prélevés chaque année. Quant au dauphin d’eau douce du Yangtze, il est classé « en danger critique d’extinction » (peut-être même éteint, mais une possible observation signalée fin août dernier est en cours de vérification). Pour sa part, le crocodile de l’Inde et du Népal, le gavial, est déplacé de la catégorie « en danger » à celle de « danger d’extinction ». Sa population a chuté de 58 % de 1997 à 2006. Les barrages, les projets d’irrigation et l’exploitation du sable ont grignoté son habitat, réduit à 2 % de l’aire de répartition d’origine.

Du côté des oiseaux, parmi les 9 956 espèces évaluées, 1 217 sont menacées. En Afrique et en Asie, le déclin des vautours est rapide. Les causes sont variées : manque de nourriture à la suite de la réduction du nombre de mammifères sauvages herbivores, perte d’habitat, mais aussi carcasses délibérément aspergées d’insecticide pour éliminer les prédateurs du bétail (hyènes chacals et grands félins, par exemple). Par ailleurs, 90 reptiles mexicains et nord-américains sont désormais classés dans la catégorie « en danger critique d’extinction ». Le crotale mexicain (Crotalus catalinensis), chassé illégalement pour les collectionneurs, les rejoint.

Dans le secteur du végétal, la liste rouge recense 8 447 espèces menacées d’extinction sur les 12 043 évaluées.

En 2007, une seule espèce a été transférée dans une catégorie de menace inférieure

Ces “instantanés” du déclin de la biodiversité ne sont, bien entendu, que quelques exemples qui illustrent la disparition progressive (parfois rapide pour certaines espèces) de la diversité biologique à l’échelle du globe. Cela a une incidence directe sur la vie des hommes, insistent les auteurs de la liste rouge. La diminution du nombre de poissons d’eau douce, par exemple, prive des communautés rurales pauvres de leur principale source alimentaire, mais aussi de leurs moyens d’existence.

Des mesures de conservation peuvent ralentir la perte de la diversité biologique, souligne le rapport. Ainsi, l’an passé, une seule espèce a été transférée dans une catégorie de menace inférieure. La perruche de Maurice, qui était l’un des perroquets les plus rares au monde voici quinze ans, est désormais « en danger » après avoir été « en danger critique d’extinction ». Cette amélioration est le résultat de mesures de conservation, notamment la surveillance des sites de nidification et l’apport de nourriture supplémentaire, associées à un programme d’élevage en captivité et de lâchers. « L’expérience montre que les programmes de conservation peuvent donner de bons résultats. Malheureusement, l’an passé, l’amélioration n’a concerné qu’une seule espèce. Cette situation est particulièrement inquiétante compte tenu des engagements pris par plusieurs gouvernements, notamment l’objectif, d’ici à 2010, de la réduction du taux de perte de la biodiversité », commente Jean-Christophe Vié, chef adjoint du programme de l’UICN pour les espèces. « Les réseaux de la conservation qui consacrent leurs efforts à la lutte contre l’extinction des espèces sont efficaces, mais ils ont besoin d’aide, et bien davantage d’appui financier. Le défi que représente l’extinction des espèces doit aussi retenir l’attention du grand public, du secteur privé et des décideurs politiques si nous voulons que la diversité biologique mondiale soit transmise aux générations à venir », ajoute Holly Dublin, présidente de la commission de la sauvegarde des espèces de l’organisation.

  • (1) Fondée en 1948, l’UICN rassemble 84 Etats, 108 organismes publics, plus de 800 organisations non gouvernementales et quelque 10 000 scientifiques et experts de 147 pays au sein d’un partenariat mondial.

  • Les listes sont consultables en intégralité à l’adresse www.iucnredlist.org/info/stats Source : UICN.

La situation en France

Avec 641 espèces végétales et animales menacées (« en danger critique d’extinction », « en danger » et « vulnérables ») présentes sur son territoire, y compris outre-mer, la France se situe parmi les dix pays qui hébergent le plus grand nombre d’espèces animales et végétales menacées au niveau mondial, aux côtés de l’Equateur (2 178), la Malaisie (911), l’Indonésie (850), le Mexique (840), la Chine (797), les Etats-Unis (1 179), le Brésil (725), l’Australie (623) et la Colombie (604). Au niveau européen, la France métropolitaine se situe au 4e rang des Etats de l’Union abritant le plus grand nombre d’espèces mondialement menacées avec l’Espagne (219), le Portugal (163) et l’Italie (138). Les causes sont variées : dégradation des milieux naturels, surexploitation, ou encore introduction d’espèces envahissantes (voir l’article en page 30).

N. D.
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