Conseil d’administration d’AVSF : une réponse bien peu convaincante ! - La Semaine Vétérinaire n° 1302 du 15/02/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1302 du 15/02/2008

Entre nous

VOUS AVEZ LA PAROLE

Auteur(s) : Patrice Gautier

Fonctions : (N 94), ex-membre de VSF et d'AVSF, fondateur d'Asvelis (Asian Veterinary and Livestock Services).

Après plus de sept ans comme expatrié pour Agronomes et vétérinaires sans frontières (AVSF) au Viêtnam, j’ai démissionné l’an passé, face aux dérives mentionnées par Eric Fermet-Quinet(1). Il ne restera sans doute que trois vétérinaires français à AVSF en 2008 et il n’y a pas dix projets “élevage-santé animale” en Asie, contrairement à ce que le conseil d’administration d’AVSF écrit(2). Depuis la fusion entre Vétérinaires sans frontières (VSF) et le Centre international de coopération pour le développement agricole (Cicda), le conseil d’administration et la direction d’AVSF (majoritairement composés d’anciens du Cicda) réfutent la diminution de la partie élevage. Ils ne pourront plus le faire à partir de cette année, car c’est maintenant que l’absence de vision stratégique et de gestion adéquate va se faire sentir : moins d’experts en production et santé animales, c’est fatalement moins de projets, donc moins de financements. AVSF est devenue un opérateur tributaire des guichets de la Commission européenne et du ministère des Affaires étrangères. Qu’en est-il de la situation financière ? 2008 sera-t-elle encore marquée par un déficit budgétaire, pour la troisième année consécutive ? Se rassurer parce que les banques continuent à prêter à AVSF pour assurer son équilibre, est-ce faire un “commerce équitable” de l’argent des donateurs ?

D’ailleurs, à quoi bon faire autant de projets si, à chaque fois, il s’agit de faire les choses différemment, sans apprendre des succès et des échecs précédents ? Sans capitalisation sur des sujets récurrents de l’élevage, et sans réactivité professionnelle sur les sujets émergents, qu’est-ce qu’AVSF apporte de plus qu’un bureau d’étude privé ?

Pour redevenir pertinente et utile, AVSF ne pourra pas se passer d’un management vraiment professionnel. Elle ne pourra pas non plus se dispenser, pour l’élevage, d’une interaction forte avec les instances vétérinaires et les praticiens. Le conseil d’administration et la direction d’AVSF ont fait le pari du plaidoyer globalisant et de la communication généraliste. Malheureusement, les éleveurs ne voient pas vraiment la couleur des résultats. Restons au cœur des réalités : les éleveurs avec qui nous travaillons ont plus besoin de pouvoir compter, comme les exploitants français depuis des décennies, sur des services privés, coopératifs, associatifs et étatiques, que sur les aléas d’une politique nationale et internationale. On ne peut souhaiter que l’élevage devienne le monopole de multinationales intégratrices, mais on ne peut souhaiter qu’il soit tributaire du bon vouloir des consommateurs des pays riches de produits estampillés “commerce équitable”.

La situation est-elle irréversible ? Décrocher des projets, des financements, reconstruire des équipes, etc., ne se fait pas en six mois. Le mal est fait et bien fait. Pour ma part, j’ai fait le choix de la rupture, et je continue à pratiquer l’aide au développement des filières animales, y compris avec les populations pauvres, mais cette fois au sein d’une structure privée.

Avec ou sans AVSF, praticiens, industries, écoles et institutions vétérinaires et organisations sanitaires d’éleveurs, etc., devront s’organiser pour transmettre leur savoir-faire au service des élevages familiaux.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1293 du 7/12/2008 en page 24.

  • (2) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1297 du 11/1/2008 en page 18.

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