Six pays partagent leur expérience de la vaccination contre la fièvre catarrhale - La Semaine Vétérinaire n° 1300 du 01/02/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1300 du 01/02/2008

Lutte contre la blue tongue. Stratégies vaccinales dans le bassin méditerranéen

Actualité

Auteur(s) : Michel Bertrou

La France, l’Espagne, le Portugal, l’Italie, l’Afrique du Sud et les Etats-Unis ont exposé leur stratégie à Bruxelles.

Lors de la conférence sur la stratégie vaccinale contre la fièvre catarrhale ovine en Europe, organisée à Bruxelles le 16 janvier dernier(1), quatre pays du sud de l’Europe (France, Espagne, Portugal, Italie) étaient invités à exposer aux autres Etats membres leur expérience de la vaccination contre cette maladie. Bien avant l’arrivée imprévue du sérotype 8 dans le nord de l’Europe en 2006, le bassin méditerranéen était atteint par les sérotypes 2, 9, 4, 16 puis 1. Des vaccins (atténués) étant déjà disponibles, plusieurs campagnes de vaccination obligatoire ont pu être mises en place dans ces pays, sur les troupeaux ovins, avec de bons résultats.

Des pays tiers, l’Afrique du Sud et les Etats-Unis, ont également apporté leur témoignage sur cette vaccination.

La Corse a été successivement touchée par trois sérotypes

Pour la France, la vaccination contre la fièvre catarrhale ovine au printemps prochain ne sera pas une découverte. En effet, elle y a déjà eu largement recours en Corse, successivement touchée par les sérotypes 2 (2000), 4 (2003) puis 16 (2004). La première campagne de l’hiver 2000-2001, avec un vaccin vivant atténué sud-africain contre le sérotype 2, n’a eu qu’un effet limité en raison de la faible couverture vaccinale (inférieure à 70 %). Une révision de la stratégie, l’année suivante, a permis une meilleure couverture (supérieure à 85 %) et fourni de meilleurs résultats. Les effets secondaires du vaccin vivant sud-africain contre le sérotype 16 ont entraîné l’arrêt de la campagne trois semaines à peine après sa mise en place. A partir de 2004, les vaccins inactivés de Merial (pour les sérotypes 2 et 4) ont remplacé les vaccins atténués.

Actuellement, le sérotype 2 est en passe d’être éradiqué en Corse, tandis que les sérotypes 4 et 16 continuent de circuler dans les troupeaux sentinelles. Si la situation épidémiologique sur une île est plus facile à maîtriser que sur le continent, les programmes mis en œuvre ont montré leur efficacité pour limiter les signes cliniques, ainsi que les pertes économiques associées. Ils ont également mis en évidence les limites de ce type de vaccination, à savoir l’absence de protection croisée entre les sérotypes, son incapacité à empêcher la circulation virale et enfin la difficile adéquation à trouver entre la vaccination des cheptels et le maintien de la surveillance virologique sur des troupeaux sentinelles.

Le sérotype 8 est récemment apparu dans le nord de l’Espagne

En Espagne, les îles Baléares ont été les premières atteintes, en 2000, par le sérotype 2, suivi trois ans plus tard par le sérotype 4. Comme en France, les vaccins atténués ont d’abord été utilisés contre ces deux sérotypes avec des résultats probants. Ainsi, depuis 2005, aucune circulation virale n’est détectée sur ces îles. Comme les vaccins vivants ne peuvent être utilisés que l’hiver (en l’absence d’activité vectorielle), les vaccins inactivés ont été préférés et employés à partir de 2006. Dans le courant de l’année 2007, alors que la circulation virale du sérotype 4 avait disparu dans la péninsule, le sérotype 1 est apparu au Sud puis au Nord. Un vaccin inactivé a été développé en urgence, retardant ainsi le développement prévu du vaccin contre le sérotype 8 qui, dernièrement, a lui aussi fait son apparition dans le nord de la péninsule ibérique.

Le Portugal alterne les vaccins atténués et inactivés

Depuis 2005, le Portugal procède à une vaccination contre le sérotype 4, alternativement avec des vaccins vivants atténués et inactivés. Les zones indemnes et réglementées sont soumises à une surveillance active, sérologique, virologique et entomologique. Comme en Espagne, ces campagnes sont obligatoires et financées par le gouvernement et la communauté européenne. Depuis novembre 2007, en collaboration avec son voisin espagnol, le Portugal vaccine également contre le sérotype 1 et conduit des expériences de vaccination sur des bovins.

L’Italie, touchée depuis 2000, développe ses propres vaccins

Depuis 2000, le sud de l’Italie et la Sardaigne ont été atteints par quatre sérotypes de la fièvre catarrhale (2, 9, puis 4 et 1). La péninsule est désormais divisée en deux zones (Nord et Sud) de risque différent. Celui-ci est constamment réévalué par un réseau actif de surveillance mis en place dès 2001. Cette surveillance est complémentaire de la vaccination qui s’est mise en place dès 2002 dans les zones atteintes. Elle a montré son efficacité dans la mesure où la couverture vaccinale dépassait 80 % des animaux sensibles. L’Italie utilise des vaccins vivants atténués qu’elle développe elle-même.

La blue tongue est endémique en Afrique du Sud et aux Etats-Unis

L’Afrique du Sud est le berceau historique de la maladie. Presque tous les sérotypes y sont représentés. Depuis de nombreuses années, l’institut vétérinaire d’Onderstepoort développe un large éventail de vaccins vivants atténués contre la blue tongue. Dans ce pays où la maladie existe depuis des siècles de manière endémique, différentes combinaisons de vaccins multivalents sont fréquemment employées sur les cheptels ovins.

L’affection se maintient également de manière endémique aux Etats-Unis dans deux écosystèmes bien distincts (Nord et extrême Sud) concernant des espèces de Culicoides différentes. Plusieurs vaccins vivants monovalents ont été développés depuis les années 50 pour les ovins. A défaut d’efficacité, ils ont permis d’étudier leur effet tératogène aux premiers stades de la gestation. Comme la fièvre catarrhale n’affecte cliniquement que les ovins, minoritaires outre-Atlantique, le recours à la vaccination reste anecdotique.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1299 du 25/1/2008 en pages 26 à 29.

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