LE VÉTÉRINAIRE EST AU CŒUR DES ENJEUX DE LA SOLIDARITÉ - La Semaine Vétérinaire n° 1298 du 18/01/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1298 du 18/01/2008

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Auteur(s) : Marine Neveux

Organiser la solidarité pour ne pas la subir. Tel est le credo de Vétérinaires pour tous (VPT) qui propose une prise en charge des soins dispensés aux animaux des personnes démunies. La fédération part en effet du principe que les praticiens ne peuvent ignorer la précarité à laquelle ils sont confrontés chaque jour.

Le vétérinaire est un acteur de la solidarité en termes social, moral, déontologique, professionnel et financier. D’abord parce que la pauvreté est une réalité sociale : 1,25 million de Français sont allocataires du revenu minimum d’insertion (RMI), 1,5 million bénéficient de la couverture médicale universelle (CMU), ce qui signifie des ressources inférieures à 542 € par mois, 4,5 millions vivent avec les minima sociaux et 4 millions de travailleurs pauvres ont un revenu mensuel inférieur à 984 €. Est-il pour autant envisageable de conditionner la possession d’un animal aux ressources ? « Il faut abandonner cette idée », explique Guy Hannotte, président de Vétérinaires pour tous (VPT-France) lors de l’après-midi consacré à ce sujet à l’occasion du dernier congrès de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac). Il a, bien entendu, repris ce sujet durant les 8e assises de VPT-France, organisées les 19 et 20 mai derniers à Beaune (Côte-d’Or), autour du thème « La solidarité : l’organiser ou la subir ». Sur ce point, les travaux de la fédération sont en totale cohérence et complémentarité avec ceux de Vétos-Entraide et de Valovet. Le but est de répondre à quatre questions : comment relier l’activité professionnelle et la protection animale ? Quid de la nécessaire rémunération des actes ? De quelle façon organiser la solidarité entre praticiens ? Comment mettre en œuvre la solidarité sociale face aux difficultés de certains propriétaires de chiens ou de chats ?

« Notre mission s’inscrit dans une dimension altruiste, comme celle des autres professions de santé. Nous nous ouvrons vers les autres, estime Guy Hannotte. Il existe chez les confrères un besoin d’être utile et une tendance naturelle au dépassement de soi. » Ainsi, au-delà de l’acte “marchand”, le vétérinaire donne du temps, de l’empathie, des conseils, etc., sans que cela entre dans l’échange transactionnel. « La reconnaissance affective vient en contrepartie du don. Le praticien est soumis à un équilibre entre les efforts qu’il fera et les récompenses qu’il recevra. » L’acte gratuit sans contrepartie est un contresens, selon notre confrère. Il ne fait alors qu’induire un effet d’aubaine pour l’un et un sentiment de totale frustration pour l’autre. « Au sein de VPT, nous sommes presque tous d’accord pour dire que l’acte gratuit ne doit pas être pratiqué. »

La prise en charge des personnes est sociale et économique

D’un point de vue déontologique, le refus de soins est cité à l’article R. 242-48 du Code rural, qui stipule qu’il peut être opposé aux injures et au refus de paiement. Le Code de déontologie précise, pour sa part, que le tarif des actes doit être établi avec tact et mesure. Dans ce cadre, le problème de la facturation à une personne aux faibles ressources se pose fréquemment. Dans la pratique, les vétérinaires octroient des facilités de paiement (échelonnement, par exemple).

Ce sujet est parfois aussi une source de tensions dans les rapports avec les associations de protection animale. Ces dernières, qui sont en effet tenues d’assurer la gratuité totale des soins dans leurs dispensaires, appliquent rarement cette obligation.

« Au quotidien, les praticiens ont tendance à pratiquer un tarif moyen bas. La difficulté est aussi d’ajuster individuellement le coût des soins au pouvoir d’achat », souligne Guy Hannotte.

Le but du protocole de prise en charge de VPT-France est ainsi d’identifier les personnes qui se trouvent vraiment dans le besoin. Quant à moduler les soins selon les ressources du propriétaire, cela nécessite des choix raisonnés pour éviter une médecine à deux vitesses.

La démarche de VPT se révèle constructive en termes humains, mais également au niveau de la clinique en tant que structure. En effet, si les impayés sont dus en grande partie à des personnes sans ressources, les procédures de recouvrement engagées seront souvent improductives. « Par exemple, dans une structure comme la mienne, la moyenne des impayés s’élève à 1 000 € HT par an et par vétérinaire. Il s’agit d’un coût relatif, dont les conséquences ne sont toutefois pas négligeables, car les procédures sont lourdes et aggravent une situation déjà difficile », constate Guy Hannotte. La crainte de l’impayé et les poursuites engagées à l’encontre d’une personne dans une situation financière désespérée ont par ailleurs un impact psychologique sur le praticien. « Au niveau de VPT, nous tentons donc d’apporter une solution pratique par une prise en charge de la profession. » L’action des vétérinaires et la solidarité entre eux sont en effet indispensables car, comme le constate Philippe Goessaert, président d’Anim’aide, « dans de nombreuses régions, il n’existe aucune aide des collectivités locales et des conseils régionaux ».

Les praticiens peuvent proposer un protocole de demande de prise en charge

En pratique, quand ils se trouvent confrontés à une personne qui se déclare dans l’impossibilité de régler leurs honoraires, les confrères peuvent lui proposer la réalisation des soins dans le cadre du dispositif mis en place par VPT. Cela requiert la constitution d’un dossier de demande de prise en charge justifiant de la situation de précarité, qui est envoyé à la fédération. Si la prise en charge n’est pas acceptée pour défaut de dossier ou demande injustifiée, la personne est alors redevable de la totalité du coût des soins. Cette précision est essentielle pour permettre la signature du contrat de soins.

Les bénéficiaires des actions de VPT sont ainsi des personnes réellement dans le besoin. Par ailleurs, ne sont concernés que les cas d’urgence, les accidents et les affections dont le pronostic est favorable. La prévention (vaccination, contraception, etc.), les affections non urgentes, les médicaments non indispensables et les traitements au long cours sont actuellement exclus du champ de la prise en charge, en raison des moyens financiers limités du fonds de solidarité de VPT. Ce dispositif a l’avantage de permettre au praticien de délivrer immédiatement des soins d’urgence aux animaux de personnes sans ressources. « L’autre atout concerne la décision d’accorder ou non la prise en charge. En effet, elle ne relève pas du vétérinaire qui a en face de lui la personne démunie, mais d’une commission indépendante de l’association caritative qui traite le dossier. Cela évite que le confrère soit tenu pour responsable en cas de refus », explique Guy Hannotte.

Le respect du protocole de VPT permet de distinguer les personnes sans ressources des mauvais payeurs. Pour les actes dont le coût est inférieur à 120 €, une participation de 20 € est demandée au propriétaire. Pour sa part, la fédération participe à hauteur de 20 €, « sachant que, d’après les statistiques, le coût moyen du traitement d’un acte classique de “petite” urgence (gastro-entérite, dermatite aiguë suppurée, abcès, etc.) est de 60 € TTC ». Par ailleurs, le dossier de prise en charge est alors simplifié au maximum, « le vétérinaire se chargeant de vérifier les pièces nécessaires avant d’envoyer la demande avec son avis favorable », souligne Guy Hannotte. Lorsque le prix de l’acte est supérieur à 120 € (avec un plafond de 600 €), un dossier complet est constitué par le propriétaire et le vétérinaire. Il est ensuite étudié par la commission VPT. En cas de réponse positive, un tiers du montant des honoraires est alors à la charge du bénéficiaire, VPT-France participant au deuxième tiers et le vétérinaire traitant abandonnant le solde.

L’intérêt est donc économique et social, puisque le dispositif permet au praticien de délivrer les soins aux animaux de personnes sans ressources tout en bénéficiant d’une rémunération qui couvre les frais engagés, lui évitant ainsi la frustration ressentie lorsque des actes ne peuvent être réalisés pour un motif financier.

Les praticiens qui adhèrent à l’action de VPT ont la possibilité de recueillir les dons dans le cadre de leur clinique.

VPT met aussi en œuvre des actions de proximité

La démarche “Animal pour un sourire” concerne les chiens visiteurs d’hôpitaux et de maisons de retraite. VPT-France veut aider les associations qui œuvrent déjà dans ce domaine ou souhaitent se constituer, en jouant un rôle “facilitateur” et en se concentrant sur la qualification sanitaire et comportementale des animaux. Nos confrères Philippe Goessaert et Patrice Robert, respectivement trésorier et membre de VPT, élaborent ainsi un protocole et une convention de partenariat pour ces associations spécialisées.

Le maintien de l’animal de compagnie auprès des personnes âgées est un autre cheval de bataille de l’organisation. En effet, ces dernières se privent trop souvent de la présence affective d’un compagnon en raison de leur âge. Des systèmes de fichiers de placement ou de promesses d’adoption et de recueil en cas d’accident du propriétaire sont ainsi à l’étude. Le vétérinaire traitant aurait une place centrale dans ce dispositif.

Une stratégie contractuelle des fourrières et des refuges pour leur gestion avec les associations de protection animale et les collectivités locales est aussi développée, en concertation avec le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL).

En outre, l’intégration de l’animal en milieu urbain fait partie du champ de compétences de VPT-France grâce aux actions menées localement par ses structures départementales, qui visent à mettre en avant la responsabilisation des maîtres, l’aménagement des espaces et l’animal comme facteur de santé. « Ce sont autant d’actions concrètes que VPT s’apprête à mettre en œuvre avec le soutien moral et financier de ses partenaires professionnels et le travail de ses adhérents dans les vingt départements qui, à ce jour, sont membres de la fédération », conclut Guy Hannotte.

Le conseil d’administration de VPT-France

• Président : Guy Hannotte.

• Vice-président : Claude Laugier.

• Secrétaire : François Decazes.

• Trésorier : Philippe Goessaert.

• Membres : Guy Deldem, Christophe Esbelin, Nathalie Simon, Patrice Robert.

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