La prophylaxie de la rage varie fortement selon les pays concernés - La Semaine Vétérinaire n° 1296 du 04/01/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1296 du 04/01/2008

Zoonose. Santé publique

Actualité

Auteur(s) : Gwenaël Outters

L’Asie et l’Afrique paient un lourd tribut à cette maladie qui reste malheureusement d’actualité.

La rage nécessite la vigilance de tous les acteurs de santé. Les derniers événements concernant cette maladie ont été évoqués par notre confrère Hervé Bourhy, codirecteur du Centre national de référence pour la rage (Institut Pasteur, Paris), lors du congrès de l’Afvac, organisé à Paris en décembre dernier.

La répartition géographique du virus est mondiale. Cependant, la rage est mal contrôlée. Les infrastructures de santé publique dans les pays les plus touchés sont insuffisantes, les capacités de surveillance et de diagnostic sont mauvaises et le personnel est souvent inexpérimenté. La situation est catastrophique en Afrique et en Asie, où soixante mille personnes environ décèdent chaque année de la rage. Il s’agit d’une zoonose des zones rurales défavorisées, qui touche davantage les enfants, préférentiellement mordus au cou, aux mains ou à la tête. 40 % des individus atteints ont moins de quinze ans. La rage canine, mal maîtrisée, est responsable de plus de 90 % des cas humains dans le monde.

La difficulté de la gestion de l’affection réside également dans l’éventail des populations réservoirs des différents virus rabiques. De nombreuses familles et espèces d’animaux sauvages (mammifères ou chiroptères) jouent ainsi un rôle de réservoir, notamment les chauves-souris, mondialement répandues. Parmi ces dernières, neuf des dix-sept familles existantes sont porteuses du virus, au lieu de quatre pour les carnivores (canidés, herpestidés, méphitidés et procyonidés). Les autres espèces ne peuvent être qu’hôtes intermédiaires. L’homme, pour sa part, constitue un cul-de-sac épidémiologique. La situation épidémiologique de la rage n’est donc pas figée, mais le contrôle d’un vecteur aboutit à la disparition d’un cycle épidémiologique.

Le foyer de 2004 a été lourd de conséquences en termes de gestion sanitaire

En Europe, de nombreux foyers sont observés en Europe de l’Est et dans les pays Baltes. Les risques pour la France proviennent de l’importation de cas des pays de l’Est, du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Depuis 1968, l’Hexagone a recensé vingt-trois cas de rage. Celui de 2004 a imposé la mise en place de cent quatre-vingt-sept traitements préventifs, la réalisation d’analyses chez mille deux cents animaux et la mise sous surveillance de sept cent cinquante-neuf animaux domestiques. Les conséquences d’un tel cas sont donc importantes. L’éventualité d’une réintroduction en France est également associée au développement du marché des nouveaux animaux de compagnie. Ainsi, en 1999, un cas concernait une chauve-souris frugivore d’origine africaine infectée par le virus Lagos Bat, pour lequel aucun vaccin adapté n’est disponible.

La rage est répandue chez toutes les chauves-souris d’Europe. Trois cent dix-sept cas de rage de chiroptères ont été recensés entre 1967 et 2007 (avec une moyenne stable de trente à cinquante par an). Mais bien des pays ne fournissent aucun effort de recherche, ce qui minore considérablement les chiffres. La transmission aux mammifères terrestres est rare. Quatre cas humains ont été dénombrés entre 1977 et 2002 et quelques cas animaux. Le premier décès d’un carnivore domestique (un chat) à la suite d’une morsure par une chauve-souris enragée a été enregistré le 9 novembre dernier. Quinze personnes ont été mises sous traitement et deux chiens ont reçu un rappel vaccinal.

Le vétérinaire sanitaire est au cœur de la lutte antirabique

Le chien étant responsable de 98 % des cas de rage humains, Hervé Bourhy insiste sur l’importance de la vaccination canine et le contrôle des populations dans les pays sévèrement touchés par le virus, avec des restrictions des mouvements, une surveillance de l’habitat, une gestion des déchets et un contrôle de la reproduction (campagnes de stérilisation). Depuis 2001, la France est officiellement « indemne de rage des animaux terrestres non volants ». Cependant, des cas importés sont possibles, d’où la nécessité de la visite de mise sous surveillance vétérinaire. Un animal ayant été en contact avec celui qui est enragé est abattu s’il n’est pas vacciné. Notre confrère souligne l’importance, toujours d’actualité, du rôle du vétérinaire sanitaire en cas de morsure. L’affection ne doit pas être oubliée dans la pratique quotidienne.

La rage, zoonose encore fréquente dans certaines régions du globe, est cependant une maladie négligée. Les données épidémiologiques mondiales restent assez peu fiables. Par ailleurs, le nombre de cas pourrait augmenter en raison de l’accroissement des mouvements humains et de la perméabilité des frontières. Cela sera d’autant plus vrai que les pays dits riches n’auront pas aidé les pays d’Afrique dans l’éradication de la maladie.

Le virus de la rage

Le virus de la rage, à ARN, enveloppé et de la famille des Rhabdoviridae, est fragile dans le milieu extérieur, sensible à la chaleur, à la lumière, à la dessiccation, aux solvants et aux savons. Cependant, il résiste bien à la putréfaction et il est conservé par le froid. Il mute facilement. De nombreux variants, adaptés à l’environnement, ont été sélectionnés. Ils forment différentes lignées phylogénétiques selon la provenance géographique du virus et de l’animal réservoir. Tous les virus peuvent infecter l’homme.

G. O.
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