Identifier le style social de l’autre permet de comprendre les agacements quotidiens

Catherine, ce n’est plus possible. Tu nous étrangles avec ce contrat.

— J’y arrive bien, moi. Et Jean-Bertrand aussi.

— Tant mieux pour vous. Quant à Jean-Bertrand, il en prescrit même aux animaux qui n’ont pas de problème. Ne dis pas le contraire, Jean-Bertrand : j’ai revu le chien de monsieur Petit.

— Je vous rappelle que c’est enfin un vrai bon contrat, qui nous rapportera à tous.

— Merci, Catherine, de nous rappeler que c’est toi qui l’as négocié. Et toi Stéphane, tu ne dis rien ?

— Pourmoi,voussavez,c’estla maladie du chien qui prime.

— Mais personne ne dit le contraire ! C’est toujours pareil quand il s’agit d’être solidaires pour développer l’entreprise. J’espère que ça ne va pas rater à cause de toi ! »

Ce dialogue est une illustration du modèle des styles sociaux⁽¹⁾, qui permet d’expliquer nombre des comportements concrets et observables de chaque individu. Si, dans cet exemple, personne ne met en œuvre son empathie et sa souplesse pour accepter les styles sociaux des autres, la discussion risque de tourner en rond longtemps et de frustrer tout le monde. Certes, chacun a sa ou ses raisons d’agir comme il le fait, mais comme 30 % des faillites d’entreprise sont dues à des mésententes entre associés, il peut être utile de chercher à mieux appréhender la carte du monde d’autrui.

Cela permet aussi de comprendre pourquoi chacun peut agacer les autres dans des situations quotidiennes pour tenter d’y remédier. Ainsi, comment démontrer à Catherine qu’un repas trimestriel avec les auxiliaires peut avoir des effets positifs à terme sur la marge de l’entreprise ? De quelle façon faire comprendre à Aymeric qu’une dérive dans les horaires des auxiliaires sous prétexte d’obligations familiales souvent solubles par d’autres moyens n’est pas acceptable ? Par quel moyen expliquer à Jean-Bertrand que le challenge commercial qu’il a accepté ne tient compte que de lui-même et est inapplicable dans les faits par ses associés ? Comment faire admettre à Stéphane qu’il n’est pas nécessaire d’ajouter la fraction d’éjection systolique aux examens habituels lors de la mise en place d’un traitement initial pour une insuffisance cardiaque classique ?

Avoir conscience du style social de l’autre permet aussi de comprendre que le pointillisme de Stéphane rend Jean-Bertrand nerveux, que Catherine doit se maîtriser pour ne pas être cinglante lorsqu’elle découvre qu’Aymeric a déjà une heure de retard dans ses rendez-vous ou, en revanche, que Jean-Bertrand et Aymeric font alliance quand il s’agit de l’ambiance de la clinique, de même que Catherine et Stéphane pour rationnaliser les services offerts aux clients.

La déclinaison des styles sociaux dans le management est également bénéfique

Comprendre est une chose, cohabiter en est une autre. Pour y parvenir, cinq éléments indissociables sont nécessaires :

- se connaître (limites et qualités) afin de choisir des missions en adéquation avec ses besoins ou, en cas de mission imposée hors de sa “zone de confort”, savoir sur quels points il faudra évoluer ;

- faire preuve de souplesse et d’empathie pour accepter la richesse que constituent les styles (mêmes agaçants !) des autres. Parallèlement, savoir éviter le péché d’orgueil qui consiste à croire que ce sont toujours les mêmes qui font l’effort d’aller vers les autres. Ces derniers aussi, à leur manière, sont soucieux du bien commun (rapport gagnant-gagnant) ;

- mettre en œuvre au quotidien la méthode suggérée par Aymeric et Catherine qui consiste à privilégier les points forts de chaque style et à cesser de s’appuyer sur les points faibles, par exemple en affectant des missions adaptées à chacun⁽¹⁾ ;

- favoriser un travail collégial pour de nombreuses tâches comme l’achat des médicaments, le développement de nouveaux marchés ou de nouvelles techniques, la comptabilité et l’analyse du chiffre d’affaires ;

- établir un règlement intérieur et construire un projet (but commun) pour l’entreprise à cinq ou dix ans. Il s’agit de deux éléments fédérateurs particulièrement puissants…

Par ailleurs, il est aussi utile de décliner les styles sociaux dans le management des auxiliaires pour éviter de s’agacer devant certains comportements, créer de la motivation en confiant des tâches adaptées et trouver les leviers de la motivation pour améliorer l’exécution des missions.

• (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1293 du 7/12/2007 en page 59.