L’ÉTAT VEUT ACCÉLÉRER L’ESSOR DE SON PARC BIOLOGIQUE - La Semaine Vétérinaire n° 1293 du 07/12/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1293 du 07/12/2007

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Auteur(s) : Nathalie Devos

Le gouvernement a fixé un objectif de 6 % des surfaces agricoles utiles exploitées en mode de production biologique d’ici à 2012, et de 20 % en 2020. De 2001 à 2006, le nombre de ce type d’exploitations a progressé de près de 2,5 % par an, mais les évolutions diffèrent selon les filières concernées.

Les travaux préparatoires du Grenelle de l’environnement ont montré une forte convergence des points de vue sur l’agriculture biologique, une attente forte de la société dans son ensemble, et nous nous devons d’y répondre », a indiqué Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durables, en clôture des Assises nationales de l’agriculture biologique, organisées par l’Agence Bio, le 2 octobre dernier à Paris. La secrétaire d’Etat y a souligné « l’importance, pour la France, de développer des filières performantes dans le domaine de l’agriculture biologique, car ce secteur répond à des enjeux majeurs ».

Ces enjeux se situent sur trois plans :

- sanitaire, « alors que l’impact des pesticides sur la santé est de plus en plus avéré » ;

- environnemental, « par une agriculture plus économe en eau, plus respectueuse des sols et de la biodiversité » ;

- économique, « car il s’agit d’être présent sur un marché dynamique en pleine expansion ».

« La moitié des produits “bio” consommés en France sont importés, souvent depuis l’Allemagne et dans des camions polluants. C’est aberrant. L’objectif premier pour la France doit être de viser l’autosuffisance dans un délai rapide », a ajouté Nathalie Kosciusko-Morizet.

Michel Barnier, ministre de l’Agriculture et de la Pêche, a quant à lui rappelé les grands axes du plan d’action quinquennal « agri bio : horizon 2012 » qu’il avait présenté lors du conseil d’orientation de l’Agence Bio, le 12 septembre dernier. Il s’agit de soutenir la recherche, de développer la formation en “bio” (qui devrait être dotée de 10 millions d’euros sur cinq ans), de structurer la filière, de favoriser la consommation de produits biologiques, d’adapter la réglementation et, enfin, de convertir et de pérenniser les exploitations “bio”. Michel Barnier estime le coût de ce dernier axe à 30 millions d’euros par an, soit le double de ce qui est actuellement alloué. Conjointement, le ministre et la secrétaire d’Etat ont rappelé qu’en matière de production, l’objectif fixé est de 6 % des surfaces agricoles utiles (SAU) exploitées en mode biologique d’ici à 2012, soit trois fois plus qu’actuellement, et de 20 % en 2020. Michel Barnier et Nathalie Kosciusko-Morizet souhaitent aussi proposer au Premier ministre une circulaire pour inciter à l’utilisation des produits issus de l’agriculture biologique dans le domaine de la restauration collective. L’objectif visé pourrait atteindre 15 % pour l’année 2010 et 20 % à l’horizon 2012. « Promouvoir un mode de production n’a de sens que si les débouchés existent pour les produits. Or c’est bien le cas de l’agriculture biologique. La consommation de produits “bio” est en constante progression. Contrairement à une idée reçue, elle n’est pas l’apanage d’une élite : en 2006, plus de quatre Français sur dix déclaraient avoir consommé au moins un produit biologique au cours du mois qui précédait l’enquête. Or, force est de constater que la demande progresse alors que l’offre française stagne », a ajouté le ministre de l’Agriculture.

« Un repas bio au moins une fois par semaine dans les cantines »

A l’occasion de la restitution des conclusions du Grenelle de l’environnement, le 25 octobre dernier, le président de la République a par ailleurs assuré que « d’ores et déjà, toutes les cantines publiques proposeront au moins une fois par semaine un repas issu de l’agriculture biologique. Nous fixerons avec le Premier ministre des objectifs beaucoup plus importants dans les mois et les années qui viennent ». Si Interbio Bretagne se félicite de la reconnaissance par les pouvoirs publics de l’agriculture biologique, dans un communiqué du 26 octobre dernier, elle s’interroge sur la réalisation d’un tel objectif, qui nécessite la mise en œuvre de moyens adaptés prenant en compte de manière globale l’organisation et la structuration de la filière, au risque notamment de favoriser l’importation de produits “bio” consommés par nos enfants. En effet, la production “bio” peine aujourd’hui à simplement subvenir à la demande du marché, faute d’un accompagnement suffisant de la production et des conversions à l’agriculture biologique.

Notre confrère Denis Fric, vétérinaire exerçant en élevage biologique, appuie ce constat. « Pour le Limousin, les besoins seraient, pour atteindre l’objectif de 6 %, de 24 000 000 € pour les cinq ans, or le montant théorique des aides dont nous pouvons actuellement bénéficier pour cette période sont de 900 000 €. »

2,5 % d’exploitations biologiques en plus par an depuis 2001

Quel est vraiment l’état des lieux du “bio” en France ? L’Agence Bio vient de publier l’intégralité des chiffres de l’Observatoire national de l’agriculture biologique (Onab) pour l’année passée. Ainsi, fin 2006, 11 640 exploitations agricoles étaient engagées dans le mode de production biologique, sur une superficie de 552 824 ha en “bio” ou en conversion “bio” (c’est-à-dire en phase de transition avant de pouvoir obtenir la certification), soit 2 % de la surface agricole utile (SAU) nationale.

De 2001 à 2006, le nombre d’exploitations biologiques a augmenté de quelque 2,5 % par an en moyenne, alors que le nombre total d’exploitations agricoles baisse chaque année, note le rapport de l’observatoire.

De 2001 à 2003, les surfaces en conversion biologique représentaient 25 à 30 % des terres en mode de production “bio”. Par la suite, le rythme des conversions s’est établi autour de 10 %, dans un contexte où les productions mises sur le marché, en particulier dans le secteur de l’élevage et des céréales, permettaient de satisfaire la demande. Selon l’Onab, compte tenu de l’évolution des marchés, le rythme des conversions en biologique devrait logiquement de nouveau augmenter. Toutefois, si la part du “bio” a globalement progressé depuis 2001, son accroissement “stagne” par rapport aux années 90.

En ce qui concerne le nombre de productions animales biologiques, elles ont en moyenne augmenté par rapport à 2001, même si la situation diffère selon l’espèce considérée (voir tableau). La filière bovine “bio” tend à se structurer. Par rapport à 2001, les effectifs de vaches certifiées ont augmenté globalement de 38 %, tandis que l’effectif global, sur le territoire français, a baissé de 5 à 6 %. Toutefois, selon l’Agence Bio, l’évolution des troupeaux est contrastée d’une année sur l’autre. Une baisse, dans cette filière, est enregistrée en 2006 par rapport à 2005. Pour l’essentiel, elle s’explique par des cessations d’activité (le nombre d’élevages détenant des bovins “bio” a diminué de 3,7 % par rapport à 2005). Les élevages porcins “bio” sont aussi en progression en 2006 par rapport à 2001 et ceux de truies “bio” ont gagné 4 % en 2006 par rapport à 2005. En revanche, dans le secteur avicole, les évolutions sont contrastées. Au cours des six dernières années, celles-ci n’ont pas été dans le même sens pour les filières “bio” de poulets de chair (production en baisse) et de poules pondeuses (production d’œufs en hausse).

Pour ce qui concerne les surfaces certifiées qui ont spécifiquement vocation à nourrir les animaux, elles ont augmenté de plus de 23 % de 2001 à 2006.

Le rapport de l’Observatoire national de l’agriculture biologique fait aussi le constat qu’en dix ans, le nombre d’entreprises de transformation certifiées “bio” a été multiplié par huit. En 2006, elles étaient 4 883, dont 4 198 dans le domaine des productions végétales et 616 en productions animales.

En outre, les entreprises de transformation des produits biologiques sont plutôt concentrées dans le grand Ouest, le Nord et la vallée du Rhône.

Quelques étapes du “bio”

• 1920 : débuts de l’agriculture biologique en Allemagne, en Suisse, en Angleterre au Danemark et aux Pays-Bas, avec la “biodynamie” (qui permet de « mieux sentir les différents mécanismes qui gèrent la nature ») ou agriculture biodynamique, dont les principes sont posés par l’Allemand Rudolph Steiner.

• 1928 : lancement de Demeter, une marque qui certifie l’origine des produits biologiques, créée dans le sillage du courant de l’agriculture biodynamique.

• 1940 : développement de l’agriculture organique sous l’impulsion de la Soil Association qui se réfère aux écrits de l’Anglais Sir Albert Howard, dans son Testament agricole.

• 1950-1960 : l’agriculture biologique se développe en France sous l’impulsion de la société commerciale Lemaire Boucher, puis de l’association de consommateurs Nature et Progrès.

• 1972 : création de l’International Federation of Organic Agriculture Movements (IFOAM).

• 1978 : création de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB).

• 1981 : reconnaissance officielle de l’agriculture biologique en France.

• 1982 : création de l’Institut technique de l’agriculture biologique (Itab).

• 1991 : reconnaissance officielle de l’agriculture biologique dans l’Union européenne.

• 1992 : cahier des charges de la production (végétale) biologique. La nouvelle PAC intègre des aides à l’agriculture biologique.

• 1993 : création de la certification de produits issus de l’agriculture biologique, reconnus par un logo (AB).

• 1994 : création du Centre national de ressources en agriculture biologique (CNRAB).

• 1997 : lancement par le ministère chargé de l’Agriculture d’un plan pluriannuel pour le développement de l’agriculture biologique.

• 1999 : cahier des charges de l’élevage biologique en France.

• 2000 : lancement du programme Inra, puis Inra-Acta et Actia pour et sur l’agriculture biologique.

• 2001 : création de l’Agence française pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique (Agence Bio).

Nathalie Devos
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