Modifier le régime juridique de l’animal ne fait pas l’unanimité - La Semaine Vétérinaire n° 1291 du 23/11/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1291 du 23/11/2007

Débat autour du statut de l’animal et du bien-fondé de son évolution

À la une

Auteur(s) : Marine Neveux

Une table ronde a permis à des avocats, des éleveurs et des vétérinaires d’échanger leurs points de vue.

Le statut juridique des animaux, dont le cheval, fait l’objet de débats depuis plusieurs années. La notion de bien-être animal (ou animal welfare) a aussi évolué, comme l’explique Vincent Boureau, responsable de la commission “bien-être et comportement du cheval” au sein de l’Association vétérinaire équine française (Avef). La législation relative à l’animal, sujet qui préoccupe les gouvernements successifs, a ainsi progressé au fil des années. En 2004, Dominique Perben, alors garde des Sceaux, avait par exemple commandé un rapport sur la réforme du statut de l’animal à Suzanne Antoine, magistrate. En effet, l’animal n’est pas seulement un objet, mais aussi un être vivant sensible. Cette notion est soulignée dans le traité d’Amsterdam, adopté en 1997 par les membres de l’Union européenne. Selon Xavier Bacquet, avocat, « la propriété de l’animal ne doit pas déterminer son statut ». Mais sortir ce dernier de la catégorie “objet” soulève des controverses, en raison des conséquences que cela entraîne. « L’Autriche, l’Allemagne, la Suisse et la Moldavie ont été les premiers pays à ne plus classer l’animal dans les biens meubles. Cela signifie qu’il n’est plus une chose, ce qui correspond à une évolution inéluctable. Mais ces pays ne sont pas allés au-delà. Il n’est pas encore possible de dire que l’animal est une personne », rappelle Xavier Bacquet.

Appliquer les dispositions du Code civil et du Code rural

En France, l’animal est considéré comme un bien meuble, mais son caractère sensible est toutefois reconnu. En outre, la loi du 6 janvier 1999 modifie les articles 524 et 528 du Code civil et le sort de la liste des objets qui dépendent du fonds d’exploitation. Cela a, par exemple, permis d’écarter les chevaux de la liquidation judiciaire d’un haras. « Pourquoi ne pas créer une catégorie sui generis(1) pour l’animal ? », s’interroge Xavier Bacquet. Dans ce domaine, « le Welfare Group, à Bruxelles, mène un lobbying particulièrement actif. Dans les années à venir, le droit français changera pour accorder un réel statut à l’animal ». L’avocat précise par ailleurs que la Fondation 30 millions d’amis est favorable à un tel changement.

« C’est la notion de l’application de la propriété qui, aujourd’hui, me semble poser un problème », estime Me Lucile Boisseau. Les droits de l’animal constituent donc une difficulté lorsque sont abordées les propositions de modification de son statut juridique.

Selon Caroline Lanty, présidente de la SPA, « le gouvernement fait actuellement preuve de désintérêt pour ce sujet ». « Je ne crois pas qu’une protection accrue passe nécessairement par une évolution du statut de l’animal. Aujourd’hui, les dispositions qui le protègent sont inscrites dans le Code rural et le Code pénal. Il faut demander à ce qu’elles soient appliquées », poursuit-elle. Selon elle, les pays qui ont tenté de modifier le statut de l’animal n’ont pas pour autant réglé la question de son bien-être. En outre, en France, la possibilité d’attacher divers statuts aux différents animaux (animaux de compagnie, bêtes d’abattoir, etc.) accentue la difficulté. « Le cheval est d’ailleurs le symbole de cette diversité du statut, souligne Jean-Pierre Kieffer, président de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoir (OABA). Pourquoi modifier le Code civil, alors que la plus grande part de la législation sur l’animal est incluse dans le Code rural et le Code pénal ? » Selon notre confrère, il convient donc de renforcer ces derniers et, « surtout, d’améliorer le fonctionnement des tribunaux pour que les procédures soient efficaces et rapides ». « Nous ne souhaitons pas une modification du régime juridique. Il faut consolider le Code rural avec des dispositifs de protection, et accroître les sanctions pour mauvais traitement. »

Pour sa part, Jean-Marie Charlot, éleveur membre de l’Association nationale du selle français (ANSF), estime « qu’à force de faire de l’animal un bien meuble, nous nous trouvons face à une difficulté. Si le cheval n’est pas conforme au “mode d’emploi”, il n’y a qu’à le rendre. Il est assimilé à un échantillon, comme une machine à laver sous garantie pendant deux ans ! ». Il évoque ainsi l’ordonnance de février 2005 (transposition en droit national d’une disposition communautaire) qui permet d’exercer un recours sur la garantie de non-conformité de la chose. « Mais cette garantie s’applique aux biens de consommation. Les animaux en font-ils partie ? », s’interroge Me Florence de Fréminville.

Les vices rédhibitoires méritent d’être dépoussiérés

Outre le statut juridique de l’animal, cette table ronde a également permis à notre confrère Jean-François Chary, inspecteur général de l’Agriculture, de faire le point sur la notion de vices rédhibitoires. Le questionnaire lancé sur ce sujet par notre confrère montre qu’ils apparaissent archaïques aux juristes, alors que les vétérinaires estiment qu’ils doivent être maintenus. « Même si elle ne sert pas souvent, la notion de vice rédhibitoire a au moins l’avantage de jouer le rôle d’épée de Damoclès, explique Jean-François Chary. Il était donc nécessaire d’imaginer une modernisation du concept juridique d’une part, d’admettre que la liste de ces vices est obsolète et de les assortir d’une définition clinique et d’examens complémentaires obligatoires d’autre part. Des juristes et une équipe vétérinaire travaillent sur ce sujet. » Des arrêtés d’application pourraient ainsi apporter prochainement des précisions.

  • (1) Propre à une espèce.

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