Le cavalier king charles serait sujet à une forme précoce et sévère de myosite des masticateurs - La Semaine Vétérinaire n° 1289 du 02/11/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1289 du 02/11/2007

Cas clinique

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Karine Ménier

Fonctions : praticienne à Acigné (Ille-et-Vilaine).

Un chiot de cette race est amené en consultation, car il ne peut plus ouvrir la gueule. Le titrage sérologique des anticorps dirigés contre les muscles masticateurs confirme le diagnostic de myosite des masticateurs.

La myosite des masticateurs est une myopathie inflammatoire à médiation immunitaire qui affecte sélectivement les muscles de la mastication. L’intensité des signes cliniques varie. Ils incluent l’inflammation et l’œdème des muscles temporaux, masséter et ptérygoïdiens, une diminution de l’amplitude d’ouverture de la mâchoire (confirmée sous anesthésie), une adénopathie sous-maxillaire et de la douleur à l’ouverture forcée de la mâchoire. Deux formes de la maladie, aiguë et chronique, sont décrites. L’affection s’observe généralement chez des chiens adultes. Le diagnostic chez les jeunes reste exceptionnel. Les chiens de races de tailles moyenne et grande semblent surreprésentés parmi les sujets atteints (la forme aiguë est fréquemment observée chez le berger allemand). Toutefois, selon les observations du Comparative Neuromuscular Laboratory (Etats-Unis), spécialisé dans le diagnostic de cette maladie, onze cas de myosite des masticateurs ont été diagnostiqués chez des cavaliers king charles âgés de moins de six mois, entre 2001 et 2005. Une publication plus récente indique que la maladie est décrite chez trois chiots de cette race âgés de douze semaines, issus de la même portée.

Les caractéristiques de cette myosite chez le cavalier king charles restent à préciser

Un chiot mâle de race cavalier king charles âgé de quinze semaines est présenté en consultation. Il ne parvient plus à ouvrir la gueule. De la méthylprednisolone (Oromédrol® à la dose de 2 mg/kg/j per os en deux prises, pendant deux semaines) est prescrite. Les signes cliniques s’améliorent durant le traitement, mais une récidive survient dix jours après son arrêt.

L’amplitude de l’ouverture de la gueule est diminuée de 70 %. Une hypertrophie des ganglions lymphatiques sous-mandibulaires et une fonte musculaire modérée des muscles masticateurs (masséter et temporal) sont observées. L’examen neurologique des nerfs crâniens et périphériques est normal. Aucune hyperthermie ni douleur à la palpation n’est notée. A ce stade, les hypothèses diagnostiques incluent une myosite des masticateurs, une fracture ou une luxation de la mâchoire, l’ostéopathie craniomandibulaire, la toxoplasmose, la néosporose, la présence d’un corps étranger ou une arthrite de l’articulation temporo-mandibulaire.

Des incidences radiographiques de face, de profil et obliques droite et gauche du crâne sont réalisées. Elles ne mettent en évidence ni modification de la densité osseuse en région mandibulaire, temporale et tympanique, ni fracture ou luxation. Le titrage sérologique de la créatine phosphokinase s’élève à 659 UI/l (la norme est de 0 à 50 UI/l). Le titrage sérologique des anticorps antifibres musculaires de type 2M (Comparative Neuromuscular Laboratory, university of California, Etats-Unis) est de 1 : 100 (le seuil de positivité est de 1 : 100). Le chien ayant reçu des corticoïdes pendant deux semaines, le titrage des anticorps 2M est considéré comme significatif. Un diagnostic de myosite des masticateurs est établi.

Le traitement mis en place consiste en une corticothérapie à la dose initiale de 2 mg/kg/j en deux prises. Au cours des mois qui suivent, la dose de corticoïdes est progressivement diminuée, sur une durée totale de traitement de cinq mois. Sept mois après son arrêt, aucune récidive n’est constatée. L’amplitude d’ouverture de la gueule est normale. Seule une atrophie marquée des muscles masticateurs persiste.

Cette observation et les données récentes de la littérature suggèrent qu’il existe chez le cavalier king charles une forme précoce et sévère de myosite des masticateurs, dont les caractéristiques restent encore à préciser (en particulier le probable facteur génétique). Le diagnostic et le traitement ne diffèrent pas de la maladie classiquement décrite chez l’adulte. Dans la plupart des cas, les signes cliniques sont réversibles.

L’apparition des anticorps anti-2M est spécifique de la myosite des masticateurs

Le diagnostic de certitude de la maladie ne peut pas se faire cliniquement. Les examens recommandés sont la mesure de la concentration sérique en créatine kinase (CK), une biopsie du muscle temporal ou masséter et une titration des anticorps spécifiques des fibres musculaires de type 2M. Ces dernières sont présentes uniquement dans les groupes musculaires innervés par la branche mandibulaire du nerf trijumeau. L’apparition de ces anticorps est donc spécifique de cette affection et permet de la distinguer des autres maladies neuromusculaires. Un résultat faussement négatif peut être obtenu si des corticoïdes sont administrés pendant plus de sept à dix jours ou lorsque la maladie est en fin d’évolution (destruction des fibres musculaires de type 2M et fibrose importante). La biopsie musculaire permet de confirmer le diagnostic, en particulier lorsque la titration des anticorps anti-2M n’est pas suffisamment significative. Cette biopsie doit concerner les muscles masticateurs et non les muscles peauciers : il ne faut donc pas hésiter à réaliser une voie d’abord plus large pour les identifier correctement. Pendant la phase précoce de la maladie, l’analyse histologique confirme la dégénérescence, la nécrose musculaire et l’inflammation, avec la présence de polynucléaires éosinophiles et neutrophiles. Une fois la phase précoce passée, elle met en évidence une atrophie des fibres musculaires et des images de fibrose : la gravité de ces changements permet d’apprécier les possibilités de récupération fonctionnelle et d’informer le propriétaire.

La maladie répond particulièrement bien au traitement par les corticoïdes

Le traitement de la myosite des masticateurs consiste à administrer des corticoïdes à des doses immunosuppressives (2 mg/kg/j). Ce dosage est maintenu jusqu’à ce que l’amplitude d’ouverture de la mâchoire et le dosage de la CK suggèrent une amélioration. Une recherche de la dose minimale efficace doit être faite et poursuivie pendant quatre à six mois. Cette maladie répond particulièrement bien au traitement par les corticoïdes et l’amélioration clinique est généralement rapide. Dans de rares cas, d’autres agents immunosuppresseurs (comme l’azathioprine) sont prescrits. Les doses de corticoïdes ou les durées de traitements inappropriées sont les principales causes de récidives ou d’aggravation de la fibrose musculaire.

Une bonne prise en charge de la myosite des masticateurs nécessite un diagnostic précoce de certitude et un traitement correct. Le traitement immunosuppresseur diminue la quantité d’anticorps circulants et peut être à l’origine de faux négatifs. Si la titration doit être différée, il est conseillé de prélever immédiatement du sang et de le congeler : cela permet d’instaurer le traitement immédiatement, sans pour autant modifier les résultats de la titration si cet examen complémentaire est finalement requis. Les muscles masticateurs sont particulièrement sensibles aux effets des corticoïdes et des traitements chroniques peuvent contribuer à leur atrophie : ce phénomène peut se poursuivre bien après que le processus inflammatoire est maîtrisé.

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