Le diable de Tasmanie est menacé par un cancer contagieux de la face - La Semaine Vétérinaire n° 1282 du 14/09/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1282 du 14/09/2007

Devil facial tumour disease

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Caroline Goutal

L’espèce pourrait disparaître d’ici à une vingtaine d’années.

La Tasmanie, petite île située à 240 km au sud de l’Australie, abrite les deux plus grands carnivores marsupiaux : le tigre de Tasmanie (Thylacinus cynocephalus) et le diable de Tasmanie (Sarcophilus harrisii). Malheureusement pour le premier, en raison d’une chasse accrue, de l’introduction de chiens sur le territoire et du développement de maladies, l’espèce s’est éteinte dans le courant du XXe siècle. Quant au second, il fut longtemps chassé par l’homme après la colonisation de l’île. Face à sa menace d’extinction, cette espèce est officiellement protégée depuis 1941.

Rendu célèbre par sa biologie particulière, le diable de Tasmanie, qui pèse de 8 à 10 kg, est le plus grand des marsupiaux carnivores en vie. Son nom lui vient des premiers colons européens qui étaient effrayés par ses cris et ses grognements. Réputé pour son mauvais caractère, son agressivité relève pourtant plus de la défense et il évitera autant que possible toute confrontation avec l’homme. Armé des mâchoires les plus puissantes du règne animal (proportionnellement à sa taille), il se nourrit de carcasses et de petits animaux (wallabies, wombats et oiseaux). Il peuple aujourd’hui l’île dont il porte le nom. A l’origine, il occupait également les terres australiennes, mais l’introduction du dingo par les premiers aborigènes y entraîna sa disparition. L’absence de ce chien sauvage en Tasmanie a permis au diable de subsister et à sa population de croître. Elle atteignit des records historiques il y a une dizaine d’années. Mais contre toute attente, le nombre d’individus a commencé à chuter en raison de l’apparition d’un cancer contagieux.

La devil facial tumour disease fait des ravages depuis une dizaine d’années

La devil facial tumour disease (DFTD) est une affection débilitante et mortelle à terme. Défigurant les animaux atteints, cette maladie, qui n’affecte que ce marsupial, n’avait jamais été détectée avant 1996. Evoluant depuis près de dix ans, de nombreuses questions restent encore sans réponse, notamment à propos des mesures de protection à mettre en œuvre pour que l’espèce puisse réchapper d’une extinction chaque jour plus menaçante.

Apparue au nord-est de l’île, la DFTD a décimé près de 90 % de la population de cette zone. Elle s’étend désormais au sud et à l’ouest de la Tasmanie et les scientifiques prévoient une atteinte de tous les individus d’ici à cinq ans si aucune mesure efficace n’est mise en place. Par conséquent, la disparition de l’espèce surviendrait dans les vingt ans à venir.

La maladie se présente sous une forme multicentrique qui atteint les régions faciale et buccale, ainsi que l’encolure. Les masses sont larges et solides, à tendance exsudative et ulcérative. Ce cancer possède un fort pouvoir agressif local et une composante métastatique (65 % des cas).

Dès l’instant où les lésions deviennent visibles, la survie de l’animal ne dépasse jamais quelques mois. Par ailleurs, les individus âgés de deux à trois ans sont particulièrement touchés, ce qui correspond à l’âge des premières mises bas. Ainsi, les animaux atteints ne mettront bas qu’une fois tout au plus, ce qui ajoute un danger à la survie de l’espèce.

La DFTD possède un mode de transmission identique au sarcome de Sticker

Si une origine infectieuse a d’abord été suspectée, les travaux des nombreux scientifiques mobilisés montrent une autre voie de contamination. L’étude microscopique des tissus tumoraux met en évidence un remaniement chromosomique identique des cellules néoplasiques. Le mode de transmission serait ainsi de type “allogreffe”. Un tel mécanisme n’a été observé jusqu’alors que dans le cadre du sarcome de Sticker, maladie vénérienne qui infecte les chiens. En résumé, une lignée de cellules malignes à contenu chromosomique modifié serait transmise d’un individu à l’autre sans que le système immunitaire du récepteur ne rejette cette “pseudo-greffe”. Ces clones survivraient au sein de l’organisme de façon similaire à un parasite. L’hypothèse actuelle la plus probable serait la transmission des cellules par morsure, lors de combats liés à la compétition alimentaire notamment. De telles découvertes laissent à penser qu’un contact proche est nécessaire à la transmission de la maladie et qu’une séparation entre animaux sains et atteints permettrait de la juguler.

Des mesures de préservation de l’espèce sont à l’étude

Des travaux sont actuellement en cours pour créer un test diagnostique préclinique qui permettrait de séparer les populations saines et atteintes.

Récemment, une trentaine de diables de Tasmanie sains ont été introduits sur l’île de Maria, au large de l’Australie, afin d’éviter que ceux-ci ne soient exposés à la maladie et puissent assurer la pérennité de l’espèce. Mais cette introduction reste controversée, car il est difficile de prévoir l’adaptation de l’animal à un nouvel environnement, ainsi que son impact. En effet, il est à craindre que ces nouveaux habitants ne succombent à des maladies contre lesquelles ils n’avaient développé aucune résistance dans leur environnement habituel. En outre, les diables sont susceptibles de créer un déséquilibre environnemental au sein de l’île, habitat de nombreuses espèces d’oiseaux menacées d’extinction.

L’avenir du diable de Tasmanie est donc incertain. Au-delà de la disparition possible de cette espèce, c’est tout l’équilibre de l’écosystème tasmanien qui est menacé.

  • Un site a été créé à l’initiative du gouvernement tasmanien pour exposer la situation du diable de Tasmanie : http://www.tassiedevil.com.au

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