Aux Etats-Unis, les études vétérinaires n’échappent pas à la version XXL - La Semaine Vétérinaire n° 1282 du 14/09/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1282 du 14/09/2007

Stage outre-Atlantique

Éclairage

INTERNATIONAL

Auteur(s) : Caroline Goutal

Récemment diplômée de l’ENV d’Alfort, l’une de nos consœurs s’est immergée dans les études vétérinaires version nord-américaine. L’occasion pour elle de comparer les deux types de formation… et de culture.

Si le cursus classique d’un vétérinaire français passe par la classe préparatoire pour enchaîner sur l’école vétérinaire, il n’en va pas de même pour notre confrère nord-américain. En effet, celui-ci commence ses études par quatre années de collège, après la high school, l’équivalent du lycée français. Ces quatre années sont destinées à une formation générale, où de larges plages horaires sont consacrées au sport, à la musique ou à d’autres activités extrascolaires, mais surtout à la fête ! C’est l’heure à laquelle l’étudiant nord-américain profite de sa vie… d’étudiant.

Après le collège, une sélection sévère, réalisée sur dossier et entretien, lui ouvre les portes de l’université, l’équivalent de l’ENV. La compétition pour y accéder semble équivalente à celle que les étudiants français rencontrent pour le concours d’entrée aux écoles.

Les jeunes diplômés ont en moyenne vingt-six à trente ans

Avant l’entrée à l’université, les étudiants prennent souvent une ou plusieurs années sabbatiques pour réaliser des projets (fonder une famille, partir à l’étranger, travailler pour financer leurs futures études, ou encore acquérir de l’expérience dans un domaine proche du monde vétérinaire, ce qui peut être un facteur déterminant pour l’admission à l’université vétérinaire). Grâce à ce système, des personnes de tout âge peuvent intégrer la formation vétérinaire : chaque promotion compte quelques quadragénaires, voire quinquagénaires en voie de reconversion.

Le cycle de l’université vétérinaire est de quatre ans (trois années de théorie suivies d’une année consacrée aux cliniques). Les étudiants semblent travailler beaucoup plus que nous durant ces années, peut-être en raison de leur âge plus avancé et du prix élevé des études. A leur entrée à l’université, ils entament leur vie professionnelle à part entière. Leur vie privée est indépendante de ce qui se passe à l’université. Ils travaillent ensemble comme des collègues, mais peu de vraies amitiés se créent. A la fin de leurs études, ils paraissent plus forts que nous sur le plan théorique, mais nous semblons plus à l’aise sur le plan pratique. Tout comme nous, les étudiants sont évalués au fur et à mesure de leurs années d’études, mais, pour clore la scolarité, deux examens obligatoires (un national et un d’Etat) portent sur toutes les disciplines. Aucun travail de thèse ou de mémoire n’est requis (notre fonctionnement leur paraît d’ailleurs bien étrange !).

Devenir vétérinaire ne coûte pas moins de 100 000 $ !

Pour pouvoir accéder aux études vétérinaires, les étudiants doivent en moyenne verser la modique somme de 25 000 $ pour une seule année (prix variable selon l’Etat et le statut public ou privé des centres de formation). Ces frais prohibitifs ont pour corollaire des moyens supérieurs à ceux de l’enseignement français et des soucis budgétaires moins présents. En outre, en raison du sacrifice financier consenti, les étudiants profitent pleinement de l’enseignement dont ils disposent et semblent plus motivés. Enfin, en compensation, le salaire moyen d’un vétérinaire est plus élevé dès la sortie de l’école (trois à quatre fois plus en moyenne que celui d’un praticien français, si ce n’est davantage). De la même façon, la clientèle nord-américaine est elle aussi différente, avec une tranche de population très riche et des propriétaires qui infantilisent à outrance leurs compagnons à quatre pattes. Toutefois, les clients ne sont pas toujours aussi excessifs, particulièrement en pratique privée.

La journée d’un étudiant peut atteindre quatorze heures

La dernière année d’université ressemble fortement à notre quatrième année et plus encore à notre T1 pro. Les rotations cliniques ont lieu tous les quinze jours et chacun passe par les différents services. A ce stade, il n’y a plus de cours théorique, mais les cliniciens sollicitent sans cesse les connaissances des élèves.

La journée d’un étudiant nord-américain lors de sa rotation dans les hôpitaux montre à quel point le rythme que nous avions en tant qu’étudiants était léger ! A 7 h, tous les soins des animaux doivent être terminés, ce qui sous-entend que le travail commence au plus tard à 6 h. Passé 7 h, la prise en charge des animaux transférés et les explorations diagnostiques des différents cas débutent. A midi, pas de pause déjeuner. Le repas n’est pas une étape essentielle de la journée dans la culture nord-américaine. Chacun mange dans un couloir ou en tapant quelque rapport, ou grignote tout au long de la journée. Il est inimaginable d’attendre ses amis pour se restaurer.

L’apprentissage repose sur la pratique et l’interactivité

Durant l’après-midi, un clinicien fait sa round, un tour de chenil. C’est l’occasion de discuter pendant deux heures quotidiennes sur un thème : PUPD, diabète, hypercalcémie, interprétations des biochimies, etc. La round commence souvent par des rappels de physiologie, plus qu’utiles pour apprécier la suite : étiologie, symptômes, traitements, etc. Les rounds reposent sur l’interactivité : questions-réponses, sollicitations des étudiants, le tout dans un esprit d’encouragement. Il n’y a pas de honte à donner de mauvaises réponses. La mentalité est certes fondée sur la compétitivité, mais aussi sur le positivisme, état d’esprit répandu dans les différents systèmes nord-américains.

En fin de journée, il est l’heure de rédiger les comptes rendus des animaux hospitalisés ou des consultations. Nous sommes bien loin de la quinzaine de lignes rédigées entre deux consultations. Les rapports peuvent atteindre cinq pages ! Des comptes rendus résumés sont remis aux clients, mais rien ne doit être oublié : ces documents constituent une protection dans ce pays procédurier où les poursuites pour faute professionnelle sont fréquentes. La rédaction de ces rapports permet certes de bien réfléchir sur les cas, mais, d’un rapport à l’autre, d’un jour à l’autre, les redondances se multiplient… et cela représente une véritable perte de temps.

La journée se termine entre 18 h 30 et 20 h, voire 21 h. Elle peut atteindre treize ou quatorze heures, sans pause. Voilà qui fait relativiser notre expérience dans les chenils où nous pensions travailler beaucoup !

Les gardes sont également au programme : chaque étudiant est sollicité au moins un jour sur deux durant le week-end, un soir par semaine jusqu’à minuit pour aider les techniciens à réaliser les soins et toutes les deux semaines pour une garde téléphonique. Mais seules les semaines d’hospitalisation sont aussi occupées : les services spécialisés (cardiologie, dermatologie, ophtalmologie, oncologie, etc.) sont plus détendus et moins contraignants.

Les moyens sont proches de ceux du milieu hospitalier humain

Au pays des extrêmes, les universités vétérinaires n’échappent pas à la règle : tarifs élevés, propriétaires plus enclins à dépenser, moyens mis en œuvre plus importants et employés nombreux. Ainsi, des techniciens et des aides techniciens (l’équivalent des assistants vétérinaires) sont présents aux côtés des étudiants jour et nuit. Ils sont un soutien précieux lors des examens cliniques et des soins. Mais comme tout travail mérite salaire, le moindre acte est facturé. A titre d’exemple, un simple TPR (température, fréquences cardiaque et respiratoire) réalisé pendant la nuit peut être facturé jusqu’à 75 $ !

Les traitements mis en place sont parfois sans commune mesure avec les écoles françaises. Par exemple, une insuffisance rénale n’est pas traitée par fluidothérapie, mais par dialyse. Si un chien est présenté pour des symptômes liés à une arythmie cardiaque, la pose d’un Holter pour proposer le traitement le plus adéquat peut être acceptée sans hésitation par les clients. Un chat en crise de diabète acidocétosique est connecté simultanément à quatre poches de fluides complémentées, chacune régulée par une pompe. Pour traiter un cancer, même avec un pronostic de quelques mois, toute molécule de chimiothérapie est accessible (vinblastine, doxorubicine, mitoxantrone, etc.) et chacun est libre de tout tenter jusqu’à la fin s’il le souhaite. Etonnant ? Non, la routine.

Bienvenue dans un autre monde où certains clients acceptent de payer une facture de 25 000 $ pour un cas désespéré, resté six semaines en soins intensifs, mais où, à l’opposé, les animaux arrivent aux urgences dans des états qui dépassent l’imaginable, comme ce chat présenté avec une glycémie de 1 500 mg/dl. Mais gare à la généralisation… Il s’agit là des universités et non des pratiques privées qui sont, quant à elles, tout de même plus proches de ce qui existe en France. Il y a, en revanche, beaucoup plus de centres de référés, ce qui demeure une chose rare en France, mais qui ne demande qu’à prospérer.

Le contraste est tel avec le fonctionnement des écoles françaises qu’il en est presque choquant, tant tout semble démesuré. Aucun système n’est parfait, mais partir observer la manière de travailler dans d’autres pays est à souhaiter à chacun. Cela permet une remise en question, pour au final s’améliorer.

De la cravate au pyjama

Aux Etats-Unis, il existe un règlement vestimentaire, plus ou moins souple, propre à chaque université. Les exigences sont assez strictes lorsque les étudiants reçoivent des clients en consultation : tenue habillée avec cravate obligatoire pour les garçons, baskets à éviter, jeans, tee-shirts et tenues au-dessus du genou interdits. Mais en dehors des consultations, chacun est beaucoup plus libre et le “scrub” (une sorte de pyjama) aux couleurs variées est prisé, ce qui donne un aspect particulier à cette foule de personnes qui travaillent ensemble.

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L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

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