L’association ElefantAsia crée une unité mobile pour éléphants - La Semaine Vétérinaire n° 1274 du 16/06/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1274 du 16/06/2007

Carnet de voyage au Laos

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Valentine Chamard

Entretien avec deux étudiants alforiens de retour de mission.

Deux étudiants de l’école vétérinaire d’Alfort, Florence Labatut et François Jacquet, se sont rendus en mission au Laos durant un mois, en février dernier. Leur but était de participer à la mise en place d’une clinique ambulante pour les éléphants de travail de ce pays. Ce projet, nommé Lao Captive Elephant Care and Management Program, est porté par l’association ElefantAsia(1). Cette opportunité leur a été offerte grâce à Yaboumba, une association de vétérinaires dont le but est l’étude et la conservation de la faune sauvage(2).

La Semaine Vétérinaire : Quelle est la place occupée par les éléphants au Laos ?

François Jacquet et Florence Labatut : Le Laos est un petit pays de 5,3 millions d’habitants, situé au cœur de la péninsule indochinoise. Placé sous le régime d’une dictature communiste, c’est l’un des pays les moins développés de la planète. Il est également nommé « royaume du million d’éléphants ». Cet animal tient en effet une place centrale dans la culture de ce pays de tradition bouddhiste. La population d’éléphants d’Asie à l’état sauvage y est estimée à environ 1 000 individus. Comme dans tout le Sud-Est asiatique, l’éléphant y est domestiqué depuis plusieurs siècles, et quelque 560 éléphants domestiqués sont recensés. Aujourd’hui encore, ils sont utilisés comme animaux de travail pour l’abattage et le transport des arbres.

S. V. : Les éléphants représentent-ils une source de revenus pour la population ?

F. J. et F. L. : Oui, et ils travaillent à des cadences élevées. La vente du bois est en effet une source de revenus importante, et permet de nourrir toute la famille et parfois plus. Un éléphant rapporte environ 2 000 $ par mois, ce qui est considérable au Laos. Comme l’Etat menace chaque année d’établir des quotas pour l’abattage des arbres, les éléphants travaillent encore davantage, pour anticiper une éventuelle restriction.

S. V. : Comment s’organisent les services vétérinaires laotiens ?

F. J. et F. L. : Ils sont extrêmement limités. Aucune formation spécifique n’est dispensée. Les “paravétérinaires” sont des étudiants en agronomie qui reçoivent une formation vétérinaire complémentaire. Seuls quelques vétérinaires se sont formés à l’étranger et sont désormais cantonnés dans un travail administratif. Les soins apportés au bétail et la vaccination sont dérisoires. Aucun recensement précis n’existe et le statut sanitaire demeure inconnu. Il va sans dire que les connaissances et les moyens concernant les éléphants domestiques sont inexistants.

S. V. : Quel est l’objectif de votre mission ?

F. J. et F. L. : Le projet Lao Captive Elephant Care and Management Program, mené en collaboration avec le ministère de l’Agriculture et des Forêts du Laos, a pour but la mise en place d’une unité mobile vétérinaire. Dans cette optique, il nous faut estimer les besoins sur place et définir les conditions de réalisation. Alexis Lécu, vétérinaire du Zoo de Vincennes et expert de ce programme, se rendra à son tour prochainement au Laos et se servira de nos observations. De leur côté, un docteur vétérinaire et deux auxiliaires lao, qui ont suivi une formation d’une semaine en Thaïlande, seront chargés de faire fonctionner l’unité mobile.

S. V. : Sur place, comment s’organise votre mission ?

F. J. et F. L. : Tout d’abord, nous rencontrons à Vientiane, capitale en plein essor, des organisations non gouvernementales et les services vétérinaires. Nous nous renseignons sur les moyens disponibles en matière de diagnostic, vaccination et traitement des maladies pour le bétail, dans l’espoir de les appliquer aux éléphants. Deux missions d’une semaine seront ensuite organisées dans deux districts pilotes qui sont au cœur du développement du projet. Il s’agit de Paklay et Hongsa, situés le long de la vallée du Mékong, qui accueillent respectivement 85 et 50 éléphants domestiques. Nous les rallierons pour l’un par un périple épique en bus à travers les montagnes lao, pour l’autre grâce à un féerique voyage en bateau sur le Mékong. Sur place, nous rencontrerons un maximum de cornacs et d’éléphants et glanerons diverses informations au moyen d’un questionnaire.

S. V. : Quelle est votre analyse de terrain ?

F. J. et F. L. : La grande majorité des éléphants sont en bonne santé, car les cornacs savent s’occuper d’eux. Les problèmes récurrents sont les abcès dus aux chaînes de travail et les parasitoses digestives, qui semblent n’avoir aucune répercussion sur l’état général. Quelques traitements sont effectués par les cornacs, malheureusement sans respect des posologies et des indications. Le problème le plus préoccupant est cependant le taux de reproduction dramatiquement bas (0,5 %), dû à la surcharge de travail. Bien qu’ils soient conscients de ce problème, les cornacs refusent de stopper leur activité pour se consacrer à la reproduction, car cela représenterait un manque à gagner considérable.

L’enseignement majeur tiré de cette première analyse de terrain est que tout reste à faire au niveau vétérinaire. Il existe avant tout un cruel manque de formation, autant au niveau des cornacs que des vétérinaires. Les cornacs en sont tout à fait conscients et prêts à verser des sommes non négligeables pour un apport de soins sérieux et appropriés. Le statut sanitaire des éléphants demeure inconnu et à préciser. Il reste enfin à approvisionner l’unité mobile en médicaments. Les autorités vétérinaires sont prêtes à collaborer à ce projet.

S. V. : Quels souvenirs emporterez-vous ?

F. J. et F. L. : Outre l’intérêt scientifique d’une telle expérience, celle-ci est également riche en découvertes et en épanouissement personnel. Le Laos demeure un pays peu connu, qui s’ouvre néanmoins de plus en plus vers l’extérieur et dévoile une culture et une nature exceptionnelles. Les montagnes couvertes de forêts luxuriantes, ainsi que la vallée du Mékong avec ses petits villages de pêcheurs et ses troupeaux de buffles paissant nonchalamment au bord de l’eau sont un véritable enchantement. L’accueil et la douceur de vivre y sont particulièrement appréciables. Sous cette paisible apparence, le Laos reste néanmoins le pays qui a payé le plus lourd tribut lors de la guerre d’Indochine. Par rapport à sa population, il s’agit du pays le plus bombardé de l’histoire.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1273 du 9/6/2007 en page 16.

  • (2) Voir le rendez-vous “Invité” en page 16 de ce numéro.

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