Les éleveurs de ruminants « croulent » sous les tâches administratives - La Semaine Vétérinaire n° 1269 du 12/05/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1269 du 12/05/2007

Registres et cahiers des charges. Enquête et rapport sur la traçabilité au quotidien

Actualité

Auteur(s) : Béatrice Bouquet

Médicaments, eau, engrais, aliments, etc. : de multiples éléments de l’élevage sont à lister, à transmettre…

Encore des paperasseries. » Cette remarque est fréquente dans la bouche des clients éleveurs. En effet, les documents ne manquent pas en élevage de ruminants. Il faut les remplir, les conserver, les transmettre et/ou les archiver, à titre d’information ou par obligation, au regard de la loi (traçabilité) ou d’une démarche qualité “volontaire”. Avec le registre sanitaire en élevage, les vétérinaires ont parfois l’impression d’apporter la goutte d’eau qui risquerait de faire déborder le vase. Car, outre le médicament, les exploitants doivent consigner l’eau, les semences (animales ou végétales), les engrais, les aliments utilisés, etc. Pour en prendre conscience, un document récent de quatre-vingt-dix pages met à jour et analyse la liste complète des « documents en élevage de ruminants »(1).

Les démarches de contrôle se sont multipliées depuis la nouvelle PAC

La mise en place de la conditionnalité des aides agricoles devrait intensifier les contrôles administratifs en élevage. Aider les éleveurs à progresser sur ce point devient donc nécessaire. Le rapport, piloté par l’Institut de l’élevage (département technique d’élevage et qualité, service “bien-être santé et traçabilité”), permet de dresser un état des lieux. Il constitue le bilan d’un des trois volets d’une analyse des outils et des données de la traçabilité en exploitation agricole (projet Adar).

Dans les différentes annexes, les documents sont rangés par catégorie (identification, santé, alimentation), mais aussi par action donnant l’obligation de les remplir, de les détenir ou de les transmettre (visite du vétérinaire, naissance d’un animal, entretien de la salle de traite, etc.). Pour chaque document, le cadre dans lequel s’inscrivent les démarches de contrôle est aussi précisé. Sont-elles réglementaires ? Relèvent-elles de la conditionnalité des aides de la politique agricole commune (PAC) ? De l’agriculture biologique ou raisonnée ? De la charte des bonnes pratiques en élevage ?

Consulter un tel document permet au vétérinaire de relativiser la place qu’occupe la catégorie de formulaires qui le concerne (“santé et hygiène des animaux”, voire “reproduction”) par rapport aux autres.

Les auteurs ne se contentent pas de dresser un inventaire à la Prévert. Ils décortiquent les différents textes réglementaires et les cahiers des charges, et corrigent les erreurs et les omissions d’un tableau précédemment établi sur ce même thème, grâce à des rencontres avec les instances de contrôle.

A ce niveau de détail, la complexité des obligations administratives apparaît

Les obligations se précisent, se complètent, s’additionnent ou se croisent autour d’un même document. Ainsi, simple car purement réglementaire, mais peu connue, l’éleveur a l’obligation de conserver tous ses bordereaux d’analyses. Dans un autre champ concernant le vétérinaire, l’exploitant doit consigner les dates de castration des bovins, mais seulement s’ils sont produits sous label. Dans le registre sanitaire, il convient de préciser le diagnostic établi en agriculture biologique, alors que cela n’est pas obligatoire en agriculture conventionnelle. Les auteurs soulignent également que ce registre, qui relève d’obligations croisées, peut donc faire l’objet de multiples contrôles : réglementaires, mais aussi relatifs à la PAC, à l’agriculture biologique ou raisonnée, aux chartes de bonnes pratiques en élevage, etc.

Concernant les contrôles, toutes catégories confondues, les rapporteurs reconnaissent qu’ils ont rencontré des difficultés pour faire aboutir leur travail d’analyse. Le manque de grilles ou de modèles est pointé du doigt. Cela signifie-t-il que les vérifications annoncées risquent de manquer d’objectivité ?

Par ailleurs, pour certains documents, les variations régionales dans les obligations de conservation ont aussi compliqué le travail de synthèse.

Peu d’éleveurs reconnaissent valoriser le travail administratif

Ce rapport n’est pas seulement bibliographique. Il comporte aussi un volet “enquêtes en élevage”. Vingt-six éleveurs, reconnus pour être de “bons élèves” en termes de tâches administratives, ont été soumis à un questionnaire (deux à trois dans chaque filière étudiée : bovine, ovine, caprine, lait ou viande). Trois réunions ont aussi permis de confronter les pratiques administratives en élevage. Les questions portaient sur le support, le lieu et la personne effectuant ces tâches. Les informations ne font que confirmer ce que le praticien sait déjà. Elles laissent transparaître le pragmatisme des exploitants et leur manque de temps qui se traduit par des bordereaux punaisés en vrac près du tank à lait, la réalisation du travail administratif dans un coin de la cuisine, etc. Certes, les logiciels de saisie de données en élevage sont présents, mais les auteurs qualifient leur utilisation de « récente » et rendent compte de la difficulté d’impliquer plusieurs personnes de l’élevage pour saisir les informations par ce biais.

Par ailleurs, le temps consacré au travail administratif est difficile à évaluer (quelques heures hebdomadaires ?), car il est souvent extrêmement fractionné, et assez informel. Peu d’éleveurs interrogés (pourtant “bons élèves”) disent le valoriser. Ils se livrent à ces tâches par obligation, parfois par peur du contrôle. Optimiser la quantité de médicaments et d’engrais consommée ou s’organiser pour pouvoir s’absenter seraient donc plutôt des motivations de “surdoué” de l’administratif…

Ce travail de recensement et d’analyse des documents en élevage doit aboutir à la publication d’un guide en juin prochain, destiné à aider les éleveurs “tout-venant” face aux obligations administratives (les bons élèves interrogés n’en voient pas la nécessité). Encore faudra-t-il que ce guide reste au-dessus de la pile, comme une cerise sur le gâteau des obligations en élevage.

  • (1) « Les documents en élevage de ruminants », Jean-Marc Gautier et Caroline Gilain-Galliot, mars 2007, collection “résultats”, éditions Acta, ministère de l’Agriculture et Institut de l’élevage (ISBN 978 2 8414 8 289 9). Consultable à l’adresse www.inst-elevage.asso.fr/html1/IMG/pdf_CR_260638008.pdf

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