Les puces à ADN seront utiles pour lutter contre le dopage chez le cheval - La Semaine Vétérinaire n° 1261 du 17/03/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1261 du 17/03/2007

Salon de l’agriculture. Rencontre entre Inra et Haras nationaux

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

La recherche en équine évolue, et le contrôle antidopage tend à devenir de plus en plus précis.

Le dopage a fait l’objet de plusieurs interventions lors d’une rencontre organisée par l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), le 7 mars dernier à Paris, dans le cadre du Salon de l’agriculture. A cette occasion, Yves Bonnaire, directeur du Laboratoire des courses hippiques (LCH, Verrière-le-Buisson), a insisté sur les objectifs majeurs de la lutte antidopage : protéger les compétitions, les parieurs et le bien-être du cheval, mais aussi travailler sur des critères spécifiques permettant de sélectionner les chevaux sur leurs performances en compétition sans tricherie.

La définition du dopage fait appel à la notion de modification des performances du sujet. Celle du Code des courses est même plus précise : « La mise en évidence d’un indice scientifique prouvant qu’il y a eu administration ou exposition à une substance prohibée est équivalente à la mise en évidence de ladite substance. » Cette précision montre donc qu’il est intéressant d’étudier les métabolites des substances, car « cela nous permettra de nouvelles approches de biologie moléculaire », explique Yves Bonnaire. Son laboratoire a notamment des projets de recherche sur l’hormone de croissance et sur l’érythropoïétine (EPO).

La question des seuils a de nouveau été soulevée lors de cette réunion. « Nous pouvons aujourd’hui détecter de faibles quantités de substances thérapeutiques. Pour autant, est-ce que tout doit être interdit ? » La philosophie du contrôle antidopage est en effet l’existence d’une tolérance zéro pour certaines substances à bannir totalement. En revanche, « cette absence totale de tolérance n’est évidemment pas valable pour les substances thérapeutiques, pour lesquelles nous avons donc fait une démarche de contrôle des effets résiduels », explique Pierre-Louis Toutain, professeur à l’école vétérinaire de Toulouse. Plusieurs pays ont travaillé sur cette approche qui nécessite des étapes successives : la fixation d’un seuil, d’un temps de détection, une analyse du risque, et enfin la communication sur ce risque.

Des recherches sur l’hormone de croissance sont en cours à Toulouse

Thierry Pineau, de l’Inra de Toulouse, a abordé le projet de recherche sur l’hormone de croissance. « Il existe une brève fenêtre de détection chez le cheval, alors qu’elle a des effets assez longs. Il faut donc essayer de caractériser l’exposition de ces animaux à cette hormone », explique-t-il. Le LCH et l’Inra de Toulouse étudient la détection d’un indicateur tardif et fiable des équidés à ce type de substance. « Nous allons nous intéresser à l’ARN et au profil d’expression des gènes. »

Ainsi, deux lots de chevaux sont constitués pour l’étude : ceux exposés à l’hormone de croissance (qui signeront l’exposition de l’animal à la substance) et ceux non exposés. « Nous allons avoir besoin d’une puce à ADN, ce qui sera facilité par le séquençage total du génome du cheval. » Ce dernier est en effet achevé depuis le 7 février dernier. Il s’agit donc d’une signature transcriptionnelle, qui pourrait aider la recherche antidopage. Ce principe existe déjà en recherche biomédicale. Les analyses ciblent en effet les perturbations liées à l’hormone. Ensuite, « si le profil est significatif, il faudra poursuivre l’étude pour définir la signification statistique de ce changement (selon l’état pathologique, physiologique, etc.) », ajoute Yves Bonnaire.

La dernière étape consistera à voir, selon le test proposé, la façon dont il sera mis à la disposition, à la suite d’une analyse, par les juristes et les professionnels.

Plus la pression des contrôles augmente, moins il y a de cas positifs

« Il y a beaucoup moins de volonté de tricher chez le cheval que chez l’homme », assure Yves Bonnaire. En outre, plus la pression des tests de dépistage est élevée, plus les cas positifs diminuent.

La coopération européenne et internationale a aussi été abordée. « Le problème avec les Etats-Unis est qu’ils ne partagent pas les mêmes valeurs que nous : pour le même résultat scientifique, ils n’auront pas toujours la même conclusion », constate Pierre-Louis Toutain. « S’il y a quelques années, nous traversions parfois de vraies crises mettant en cause des médicaments, il existe aujourd’hui davantage d’outils de détection des substances prohibées. Mais les tricheurs restent toujours des tricheurs ! », explique Richard Corde, vice-président de l’Association vétérinaire équine française (Avef). Il souligne aussi que les institutions professionnelles, comme l’Avef, font de la vulgarisation auprès de la filière et des confrères sur ces sujets.

La recherche en équine évolue. Certains projets sont encore à bâtir. Par exemple, il n’existe pas pour le moment d’étude sur l’hormone de croissance et sur ses effets potentiels sur la production de viande de cheval. « Nous essayons d’inscrire la recherche dans un processus global et cohérent, nous souhaitons avoir une démarche proactive et aussi répondre aux besoins », insiste Emmanuelle Bour, directrice générale des Haras nationaux.

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