Les pharmaciens lancent une tarte à la crème - La Semaine Vétérinaire n° 1260 du 10/03/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1260 du 10/03/2007

Décret “prescription-délivrance”. Mise au point du secrétaire général de l'Ordre

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Les organisations professionnelles des pharmaciens sensibilisent les éleveurs aux soi-disant changements réglementaires prévus cette année…

La Semaine Vétérinaire : Le document diffusé par les pharmaciens mentionne en couverture qu'il fait suite à l'accord du 7 mars 2006, intervenu entre le Conseil supérieur de l'Ordre des vétérinaires et celui des pharmaciens. De quel accord s'agit-il ?

Michel Baussier : Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer sur cette initiative fort malheureuse, qui ne peut être de nature à améliorer, comme nous l'aurions souhaité, la qualité et la complémentarité de la relation entre vétérinaires et pharmaciens. Cette démarche, à laquelle les confrères réagissent avec étonnement ou indignation presque chaque jour, émane de quatre organisations professionnelles pharmaceutiques, d'essence syndicale. Certes, chaque profession dispose de la liberté de communiquer comme elle l'entend avec le public. Toutefois, elle ne peut le faire en usant de procédés ambigus ou trompeurs mêlant une autre profession – en l'occurrence la nôtre – et en laissant croire notamment, dans une présentation qui cultive savamment la confusion, soit que les changements de réglementation à venir résultent simplement d'un accord entre deux Ordres professionnels (comme si cela pouvait être vrai et de surcroît possible, voire souhaitable !), soit que la diffusion de ce document douteux est le fruit d'une décision conjointe. L'accord en question, daté de mars 2006, portait uniquement, dans le cadre de la réflexion et de la concertation relatives à l'élaboration du décret “prescription-délivrance”, sur les règles de renouvellement des ordonnances. Certes, le Conseil national de l'Ordre des pharmaciens avait souhaité à la fois un moratoire pour l'application du futur décret et l'instauration de règles transitoires qui n'auraient eu pour seul support juridique que la volonté conjointe des deux Ordres professionnels. Il avait également désiré l'élaboration commune d'un guide de lecture du futur décret ! Notre réponse, après concertation interne de notre profession, avait été clairement et fermement négative. Il est manifeste aujourd'hui qu'au moment même où cette demande nous était faite, une communication alternative monoprofessionnelle était déjà prête. Une telle démarche aurait été à la rigueur tolérable – indépendamment du fait qu'elle nous avait été cachée – si pour le moins elle n'avait cherché à faire croire que nous la cautionnions.

S. V. : Une fiche est également proposée pour assurer la traçabilité des délivrances. Comment a-t-elle été établie dans “l'accord” et comment les vétérinaires doivent-ils la gérer ?

M. B. : Ce document est une tarte à la crème des pharmaciens, chère en réalité à un petit groupe assez actif… Cette fiche, que les pharmaciens pourront parfaitement établir s'ils le souhaitent, n'a aucun support réglementaire. Elle ne fait pas partie du projet de décret et a encore moins fait l'objet du moindre accord entre nos deux professions ! Elle ne saurait concerner les vétérinaires.

S. V. : Le document s'avance également sur les conclusions du projet de décret “prescription-délivrance”. Rejoignez-vous ses conclusions anticipées ? Ne sont-elles pas prématurées ?

M. B. : Comme nous l'avions exposé au président Parrot de l'Ordre des pharmaciens, nous ne saurions préjuger d'un texte qui n'est pas encore publié. En tout état de cause, je relève d'ores et déjà dans le document en circulation des informations erronées. Il est indiqué aux éleveurs qu'à l'issue du bilan sanitaire, le vétérinaire leur remettra obligatoirement (et c'est en caractères gras dans le texte) deux documents : un protocole de soins et une ordonnance. D'abord, il n'est pas certain dans l'absolu qu'un protocole de soins s'impose dans tous les cas à l'issue du bilan sanitaire. C'est une affaire entre éleveur et vétérinaire, qui les regarde exclusivement, dans le cadre du contrat de soins tacite ou écrit qui les unit et du consentement éclairé de l'éleveur. Si dans la plupart des cas, comme cela est probable, il y aura un protocole de soins, pour autant la rédaction de l'ordonnance interviendra au moment où le vétérinaire sera en situation de pouvoir et devoir prescrire un ou plusieurs médicaments. Certains pharmaciens sont en train de s'imaginer, pour des raisons qui ne paraissent pas relever de motivations de santé publique, que cette rédaction constituerait un automatisme dans le prolongement immédiat de la signature du protocole de soins.

Trop, c'est trop ! De quoi se mêlent-ils ? Le vétérinaire praticien que je suis n'entend pas se laisser dicter sa façon de réaliser son acte de médecine vétérinaire par le pharmacien d'officine, pas davantage que par toute autre personne incompétente dans ce domaine réservé. Et je doute que les quinze mille vétérinaires de France acceptent de se laisser dicter de telles règles. Il va falloir que ce soit très vite très clair pour tous. Il est bien évident en revanche que l'ordonnance, dès lors qu'elle est établie, doit être remise immédiatement à l'éleveur.

S. V. : Il est mentionné que « le futur décret est sans équivoque », les éleveurs pouvant « choisir librement le dispensateur des médicaments prescrits : pharmacien ou vétérinaire inspecteur prescripteur ». Qu'en est-il réellement ?

M. B. : Le futur décret consacre évidemment la liberté de choix actuelle. Muni de son ordonnance, l'éleveur la fera exécuter soit par son vétérinaire traitant ou consultant, soit par son pharmacien d'officine, soit (dans le seul cadre du plan sanitaire d'élevage) par le groupement d'éleveurs agréé auquel il adhère. Ce décret n'apportera aucun changement. Il ouvre simplement la possibilité aux éleveurs, pour des traitements faisant appel à des médicaments qui figurent par ailleurs sur la liste positive, de faire renouveler la délivrance sans devoir recourir à une nouvelle prescription du vétérinaire. Cela facilitera incontestablement le renouvellement de l'ordonnance par le pharmacien d'officine si telle est la volonté de l'éleveur. Cela facilitera également l'accès du pharmacien au marché du médicament vétérinaire dont il se sentait exclu. Cela engendrera surtout un accroissement de l'automédication par l'éleveur, le conseil du pharmacien se substituant au diagnostic et à la prescription du vétérinaire.

Il sera toujours temps de faire le bilan au bout d'une année ou deux. La santé animale et la santé publique y auront-elles gagné ? J'ai d'ores et déjà un avis prémonitoire, mais je le réserve pour le moment.

S. V. : Est-il opportun de communiquer sur un texte actuellement en Conseil d'Etat ? Cette démarche des pharmaciens vous paraît-elle pertinente ?

M. B. : Il me semble que j'ai clairement répondu sur l'absence de toute pertinence concernant cette regrettable démarche.

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