Le rôle sanitaire du vétérinaire n’est pas reconnu - La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/02/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/02/2007

Prévention de la délinquance. Projet de loi

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

La commission mixte paritaire opte pour le texte de l’Assemblée nationale, loin des réalités.

La commission mixte paritaire, chargée de proposer un texte sur les dispositions du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance qui demeurent en discussion, s’est réunie à l’Assemblée nationale, le 20 février dernier. A l’heure ou nous mettons sous presse, le vote définitif est imminent. Finalement, c’est la version issue de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale qui est retenue.

La version de l’Assemblée nationale de l’article sur le durcissement de la législation relative aux chiens dangereux (12 bis) a été adoptée par la commission, avec la correction rédactionnelle du sénateur UMP Patrice Gélard (au deuxième alinéa de l’article L. 215-3 du Code rural). La commission a aussi voté l’article relatif à l’évaluation comportementale de certains chiens (12 ter A) dans la version de l’Assemblée.

Les chiens “dangereux” encourent l’euthanasie dans des délais très courts

Il ressort ainsi que, « en cas de danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques, le maire ou, à défaut, le préfet, peut ordonner par arrêté que l’animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci et, le cas échéant, faire procéder à son euthanasie ». « Est réputé présenter un danger grave et immédiat » le chien de première ou de deuxième catégorie qui est soit détenu par des personnes non autorisées (selon la loi de janvier 1999), soit qui circule dans un lieu où sa présence est interdite ou qui n’est pas muselé et tenu en laisse dans les conditions prévues. Ces chiens risquent désormais d’être rapidement euthanasiés, avant même d’avoir pu être vus par un vétérinaire.

La possibilité d’une certaine souplesse, pour que l’animal ne fasse pas les frais de la négligence de son maître, n’a pas été retenue. Lors de non-respect de ces mesures, l’euthanasie pourra intervenir sans délai, dès l’obtention de l’avis d’un confrère désigné par la Direction des services vétérinaires. Or « cet avis doit être donné au plus tard quarante-huit heures après le placement de l’animal. A défaut, l’avis est réputé favorable à l’euthanasie », retient la commission, en accord avec le texte de l’Assemblée.

Si un chien de première ou de deuxième catégorie n’est pas déclaré en mairie, le préfet pourra mettre en demeure le propriétaire (ou le détenteur) de l’animal de régulariser la situation dans un délai maximal d’un mois. « A défaut de régularisation au terme de ce délai, le maire ou, à défaut, le préfet, peut ordonner que l’animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à l’accueil et à la garde de celui-ci et peut faire procéder sans délai et sans nouvelle mise en demeure à son euthanasie. »

Le maire peut demander une évaluation comportementale

Une évaluation comportementale peut être demandée par le maire pour n’importe quel chien. Elle est alors « effectuée par un vétérinaire choisi sur une liste départementale ». Un décret devrait déterminer les conditions d’application de ce dernier article. L’obligation d’une visite périodique pour les chiens de première et deuxième catégories n’est donc plus d’actualité, ce qui est accueilli positivement par les clubs des races concernées.

L’idée d’une visite comportementale pour tous les chiens ayant mordu n’est pas non plus retenue, ce qui est dommage, car il restera difficile d’évaluer les causes et d’effectuer des statistiques sur ces animaux. Ces évolutions législatives n’apportent donc pas de solution à la problématique des chiens mordeurs en France.

En outre, la remise d’un rapport trimestriel est prévue… Espérons que sa sortie ne restera pas un vœu pieux, comme ce fut le cas pour celui de la loi du 6 janvier 1999, qui demeure plus virtuel qu’autre chose !

Le texte adopté par la commission soulève des interrogations sanitaires

La première question qui se pose est celle de l’adéquation de ces conclusions avec la réalité de terrain. En effet, les morsures en France relèvent de la sécurité sanitaire. Les risques de zoonose face à de tels accidents ne sont pas à négliger, de même que les conséquences parfois dramatiques des morsures. En outre, les études partielles montrent que la proportion d’accidents mettant en cause des enfants et des chiens de la sphère familiale est loin d’être anodine. Comment ce projet de loi entend-il prendre en compte cette réalité ?

De même, la rage, même si elle est absente du territoire, demeure un spectre qui plane au-dessus de l’Hexagone, avec l’éventualité d’une importation illégale, comme en témoigne le cas de rage venu du Maroc durant l’été 2004. Le sujet des morsures est donc une problématique sanitaire réelle. Il est ainsi étonnant de constater que le gouvernement n’a pas voulu jouer cette carte de santé publique et valoriser le mandat sanitaire auprès des vétérinaires de canine. Cette absence de prise de position gouvernementale remet de nouveau en question ce mandat chez les confrères canins. Ne pas le renforcer, c’est admettre sa déliquescence. Et comment le laisser mourir au moment où la grippe aviaire est aux portes de Moscou ?

En fin de compte, ce sont les parlementaires qui ont défendu les positions les plus innovantes, car lors des débats sur ce projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, la notion même de catégorie a été controversée… une première depuis la loi du 6 janvier 1999 ! D’autant que les amendements les plus novateurs en matière de catégorisation ont émané d’un groupe parlementaire socialiste, pourtant à l’origine de la loi 99-5. Cette remise en question a été saluée par l’ensemble des acteurs de la filière. Il est en effet regrettable de voir la majorité actuelle, qui avait tant décrié cette loi en 1998 lors des débats, la défendre aujourd’hui alors qu’elle avait les moyens de mettre en application ses positions de l’époque.

Historique du projet

• Eté 2006 : les réunions d’experts se succèdent sur le sujet des chiens dits dangereux.

Ils mettent en exergue la nécessité de sortir de la catégorisation d’après le type morphologique, d’instaurer une visite comportementale, d’obtenir des données chiffrées fiables, de renforcer la responsabilité des maîtres.

• De l’été à la fin 2006 : passage de relais entre les premières lectures du Sénat et de l’Assemblée nationale.

• Janvier 2007 : deuxième lecture du texte au Sénat. Plusieurs amendements replacent le vétérinaire au premier rang de ce problème de santé publique. Il est envisagé que les confrères comportementalistes et les vétérinaires sanitaires participent aux évaluations comportementales.

• 13 février 2007 : deuxième lecture à l’Assemblée. Les modifications du Sénat sont annulées, car la commission des lois propose le retour au texte adopté par l’Assemblée en première lecture.

• 20 février 2007 : commission mixte paritaire, pour un vote définitif prévu le 22 février.

M. N.
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