Le “chien bleu” apprend aux enfants les attitudes de sécurité face au chien de la famille - La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/02/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/02/2007

Prévention des morsures canines chez le jeune

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Agnès Faessel

Un jeu interactif pour les petits reproduit le comportement canin selon l’action choisie par le joueur.

The blue dog est un jeu interactif pour apprendre aux enfants de trois à six ans à éviter de se faire mordre par un chien. Il est l’aboutissement d’un projet, belge initialement, de prévention des morsures, mené par un groupe de travail associant des vétérinaires comportementalistes, des pédiatres, des éthologues, des psychologues et des pédagogues, ainsi que l’Ecole royale des beaux-arts de Gand. « S’il est reconnu que la présence d’un chien a des effets positifs sur le développement psychologique et social de l’enfant, un chien a aussi des dents ! », rappelle en effet notre consœur Tiny de Keuster.

La plupart des programmes de prévention préexistants ciblent les enfants âgés de plus de sept ans et ont pour objectif de leur apprendre la façon de se comporter lorsqu’un chien les approche. Or la majorité des accidents surviennent au domicile, avec le chien de la famille, et concernent des enfants plus jeunes. Les morsures recensées chez ceux de moins de huit ans se situent le plus souvent au niveau du visage. En outre, l’agression se produit fréquemment dans le cadre d’un jeu entre l’enfant et l’animal, et a généralement lieu lorsque l’enfant approche le chien et non l’inverse. « C’est un peu l’enfant qui déclenche l’accident, résume Tiny de Keuster. Cette observation a constitué une piste d’étude pour la prévention. »

Le jeu, sur cédérom, met en scène un chien et un enfant, dans une multitude de situations quotidiennes. L’animation des personnages s’effectue dans un contexte ludique, rythmé de touches humoristiques. Chaque scénette aboutit à un choix d’actions soumis au joueur. Par exemple, si le chien dort, le personnage peut le laisser dormir ou venir le caresser, auquel cas l’animal gronde et montre les dents. Dans une autre scène, le personnage tient un cornet de glace que le chien veut lui prendre. L’enfant peut alors opter pour deux solutions : le personnage lève la glace au dessus de sa tête ou la lâche par terre. Dans le premier cas, le chien bondit sur le personnage pour attraper la friandise. Lorsque le joueur choisit la bonne attitude, celle de sécurité, le jeu continue. Dans le cas inverse, il reste sur la même scénette et revient au choix d’actions.

Soulignons que ce jeu est “international”, car uniquement “musical” : ni langage ni texte ne ponctuent l’action.

L’enseignement du langage corporel reste difficile

« Informer n’est pas suffisant pour éduquer », constate Tiny de Keuster. En effet, historiquement, la prévention de nombreux dangers pour l’enfant (accidents domestiques, accidents de la route) repose sur l’édiction de règles, par exemple : « Il ne faut pas caresser un chien endormi ». Mais « la connaissance des règles de sécurité n’augmente pas la sécurité », prévient notre consœur, qui déplore la faible efficacité des systèmes préventifs fondés sur les seules règles et notices. C’est dans ce contexte qu’a été imaginé et mis en œuvre l’enseignement du langage corporel des chiens aux enfants. Un large travail d’étude, mené sur quatre cent trente enfants âgés de quatre à huit ans, a néanmoins montré que ces derniers ne regardent que la tête du chien, passant à côté de la posture globale de l’animal. Ils confondent aussi régulièrement les expressions amicales avec celles de peur. « Les adultes également peuvent se tromper. Certaines postures sont des pièges », ajoute Tiny de Keuster.

Un essai a été mené pendant neuf mois avec plusieurs enfants. Ils ont dans un premier temps expérimenté The blue dog. Leurs choix d’actions ont ensuite été observés sur des mises en situation inédites, faisant intervenir de nouveaux personnages. Les résultats montrent que l’apprentissage est significatif chez ces enfants, pendant au moins deux semaines. Ils montrent aussi que l’implication des parents dans le jeu présente un effet positif.

Tiny de Keuster rappelle d’ailleurs l’importance de la supervision parentale. « Une proximité physique de l’adulte permet seule de rendre la supervision efficace. » Chaque cédérom est d’ailleurs accompagné d’un livret pédagogique destiné aux parents.

En outre, notre consœur rappelle qu’aucune règle n’est uniformément applicable à tous les chiens. Chaque jeu entre un enfant et un chien demeure une situation particulière et l’attitude à adopter par l’enfant dépend de l’animal et du contexte. D’où l’importance des consultations vétérinaires comportementales. Les objectifs de The blue dog se limitent à apprendre la reconnaissance des situations à risque (comme un chien enfermé, même s’il “s’enferme” sous une table) et des signaux de menace (tout grognement par exemple).

Le “chien bleu”, version francophone

La diffusion du jeu sur cédérom The blue dog est l’une des missions de l’organisme à but non lucratif The Blue Dog Trust, né en novembre 2005(1).

Le projet de réalisation d’une version francophone a débuté avec la Fédération des associations francophones des vétérinaires pour animaux de compagnie (Fafvac). Il devrait aboutir à la mise à disposition d’un matériel adapté à la langue française, selon des modalités et un tarif qui restent à définir. En effet, The blue dog trust cède gracieusement la licence du jeu (droits d’utilisation et de traduction) aux organisations professionnelles vétérinaires.

A. F.

CONFERENCIÈRE

Tiny de Keuster, comportementaliste, diplômée des écoles vétérinaires françaises, diplomate de l’European College of Veterinary Behavioral Medicine-Companion Animals (ECVBM-CA).

Article rédigé d’après la conférence « Programme de prévention des risques de morsures chez l’enfant », présentée au congrès 2006 de l’Afvac (Bordeaux, Gironde).

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