De 1996 à 2005, 5 847 foyers de toxi-infections alimentaires collectives ont été déclarés - La Semaine Vétérinaire n° 1257 du 17/02/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1257 du 17/02/2007

Sécurité sanitaire des aliments en France

Formation continue

FILIÈRES

Auteur(s) : Nathalie Devos

Salmonella a été isolée dans 64 % des foyers pour lesquels un agent étiologique a été identifié. Ils ont été à l’origine de 48,8 % du nombre total de malades et de 61 % de l’ensemble des hospitalisations.

Après une augmentation du nombre de toxi-infections alimentaires collectives (Tiac) déclarées jusqu’en 1998, la tendance actuelle est à la stabilisation. Entre 1996 et 2005, 5 847 foyers de Tiac ont été déclarés en France. C’est ce que révèle le dernier bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de l’Institut de veille sanitaire (InVS)(1).

Les auteurs précisent que les infections à salmonelles, en raison de leur symptomatologie marquée, donnent fréquemment lieu à une consultation médicale. Il est donc probable que les Tiac dues à cet agent soient mieux diagnostiquées et déclarées que celles qui sont liées à des agents responsables de symptomatologies moins sévères, comme Staphylococcus aureus, Bacillus cereus ou les virus entériques.

Salmonella est l’agent incriminé dans 49 % des décès entraînés par une Tiac

L’agent responsable des Tiac a été mis en évidence microbiologiquement dans 2 667 foyers (soit 46 %). Il a été suspecté sur des critères cliniques et épidémiologiques dans 2 074 foyers (35 %). Parmi les foyers où l’agent a été confirmé biologiquement, Salmonella a été le plus fréquemment isolé (64 %) et le sérotype Enteritidis prédominait (54 % des Tiac à Salmonella).

La proportion de foyers pour lesquels aucun agent pathogène n’a été détecté ou n’a pu être suspecté s’est révélée assez élevée (19 %), selon les auteurs. Les 5 847 foyers de Tiac déclarés pour la période 1996-2005 ont rendu malades 80 351 personnes, dont 7 364 (9 %) ont été hospitalisées. 45 personnes en sont décédées (0,06 % des malades). L’agent incriminé dans les décès était Salmonella dans 22 cas (49 %), Clostridium perfringens pour 5 personnes (11 %), Bacillus cereus pour 4 (9 %), Staphylococcus aureus pour 2 (4 %), E. coli pour 4 (9 %), Campylobacter pour une et histamine pour une autre. Pour les 6 autres décès (13 %), l’agent responsable n’a pas pu être mis en évidence.

Il existe une recrudescence des foyers de Tiac, précisent les auteurs, particulièrement à Salmonella, durant la période estivale. Celles qui ont une origine virale surviennent le plus souvent en période hivernale.

La proportion de Tiac à salmonelles a été plus élevée en milieu familial

64 % des Tiac sont survenues en restauration collective ou commerciale et 35 % en milieu familial. Les Tiac en restauration collective ou commerciale ont été à l’origine de 80 % des malades, dont 40 % en milieu scolaire. La proportion de Tiac à salmonelles était plus élevée en milieu familial qu’en restauration collective ou commerciale (57 % au lieu de 21 %).

L’étude a par ailleurs permis de montrer que tous les départements français ont déclaré au moins un foyer entre 1996 et 2005 (voir carte). Quinze départements en ont déclaré plus de 100, parmi lesquels trois (les Yvelines, la Haute-Garonne et les Bouches-du-Rhône) en ont déclaré plus de 150.

L’implication d’œufs et a été établie dans 59 % des foyers de Tiac à salmonelles

Un aliment a pu être incriminé dans 1 255 foyers de Tiac sur les 5 847 recensés durant la période étudiée (soit 21 %), et suspecté dans 3 005 foyers (51 %). Pour le reste des Tiac (28 %), aucun aliment n’a pu être incriminé ou suspecté (voir tableau).

L’implication d’œufs et de produits à base d’œufs crus ou peu cuits a été établie dans 59 % des foyers de Tiac à salmonelles. L’origine des œufs était précisée dans la moitié des cas : parmi ceux-ci, 42 % provenaient de centres d’emballage et 45 % de productions familiales.

Les auteurs de l’étude rappellent que la persistance de l’utilisation d’œufs frais en restauration collective, notamment en restauration scolaire et dans les institutions médico-sociales, continue d’être à l’origine de Tiac à salmonelles dont les conséquences peuvent se révéler gravissimes. Ils rappellent que l’un des plus importants foyers recensés a été à l’origine de 250 cas de salmonellose chez des jeunes enfants à la suite de la consommation d’une préparation à base de mayonnaise réalisée avec des œufs frais dans des cantines scolaires d’un département du Sud-Ouest, en 2001.

Une erreur de préparation était notamment à l’origine de 1 603 foyers

Dans 60 % des cas, une erreur dans la préparation et/ou de consommation est impliquée.

Les produits laitiers et les plats qui nécessitent plusieurs manipulations étaient les plus impliqués pour les Tiac à Staphylococcus aureus, les plats en sauce pour Clostridium perfringens et Bacillus cereus. Des coquillages ont été incriminés dans 32 % des Tiac où des virus entériques ont été détectés ou suspectés.

Pour les 2 687 foyers où un facteur au moins de survenue des Tiac ayant contribué à l’incident a été rapporté, 1 603 foyers (soit 60 %) étaient liés à une erreur dans la préparation ou à un délai excessif entre la préparation et la consommation. Le non-respect des températures de conservation des aliments (46 %), l’emploi de matières premières contaminées (35 %) et les erreurs dans le processus de préparation (32 %) ont constitué les principaux facteurs favorisant les Tiac identifiés.

Une recherche plus large d’agents pathogènes par coproculture est encouragée

Les auteurs insistent sur plusieurs points. Tout d’abord, une déclaration précoce des Tiac aux directions départementales des affaires sanitaires et sociales (Ddass) et aux directions départementales des services vétérinaires (DDSV) est nécessaire pour permettre une investigation rapide. Ils rappellent à cet égard que plus de la moitié (54 %) des Tiac en milieu familial et 32 % des foyers en restauration collective ou commerciale n’ont pas fait l’objet d’investigations. Aussi insistent-ils sur la nécessité que ces dernières, menées par les Ddass et les DDSV, soient réactives, coordonnées, plus systématiques, et que les protocoles de fonctionnement entre ces services favorisent l’échange de données au moyen du logiciel WinTiac. Cet outil permet d’optimiser le processus de signalement, d’investigation et de standardisation des rapports afin que le dispositif de surveillance des Tiac en France réponde aux objectifs de surveillance de la sécurité sanitaire des aliments.

Ils estiment également qu’il convient d’améliorer le diagnostic des causes des Tiac, en encourageant la prescription de coprocultures lors de leur survenue et en incluant la recherche d’agents pathogènes non recherchés en routine comme les Campylobacter, les E. coli entérohémorragiques (EHEC) et les virus entériques lorsque l’observation clinique oriente vers ce type d’agent (par exemple la recherche d’EHEC en présence de diarrhées sanglantes).

Les efforts d’application des bonnes pratiques d’hygiène en restauration doivent être poursuivis et renforcés, notamment dans les institutions médico-sociales et en restauration commerciale et scolaire, où le nombre de foyers de Tiac, en particulier à salmonelles, à Clostridium perfringens et à Bacillus, reste élevé.

Enfin, les auteurs soulignent que les Tiac qui surviennent en milieu familial, où les salmonelles restent prédominantes, pourraient être prévenues par l’application de recommandations d’hygiène simples, en particulier en matière de consommation d’œufs. Les informations aux individus les plus vulnérables (personnes âgées, malades, jeunes enfants), relatives aux risques liés à la consommation d’œufs crus ou peu cuits, ainsi qu’à la nécessité de consommer les viandes hachées et les volailles cuites à cœur, devraient être renforcées.

  • (1) Gilles Delmas, Anne Gallay, Emmanuelle Espié, Sylvie Haeghebaert, Nathalie Pihier : « Les toxi-infections alimentaires collectives en France entre 1996 et 2005 », Bulletin épidémiologique hebdomadaire, n° 51-52, 26 décembre 2006.

  • Source : Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH).

Définition et déclaration

Un foyer de Tiac est défini par la survenue d’au moins deux cas groupés d’une symptomatologie similaire, en général digestive, dont la cause peut être rapportée à une même origine alimentaire. Toute Tiac doit faire l’objet d’une déclaration obligatoire (DO) à la Ddass ou à la DDSV. Cela leur permet de réaliser une enquête épidémiologique et vétérinaire, afin de confirmer la Tiac en identifiant les aliments responsables et les facteurs qui l’ont favorisée (défaut d’hygiène, températures inappropriées, etc.) afin de prendre des mesures pour éviter les récidives. Dans le cadre d’une Tiac qui dépasse l’échelle du département, la cellule interrégionale d’épidémiologie (Cire) et/ou l’InVS peuvent apporter leur soutien aux investigations. Depuis 2003, un signalement en temps réel à l’InVS précède la déclaration obligatoire dès que l’événement est connu.

N. D.

Les centres nationaux de référence

Douze centres nationaux de référence (CNR) contribuent à la surveillance épidémiologique des agents à transmission alimentaire.

Les agents concernés par cette surveillance sont : Salmonella, bactéries anaérobies et botulisme, Campylobacter et Helicobacter, virus entériques, Escherichia coli et Shigella, Listeria, Trichinella, staphylocoques, Brucella, Francisella tularensis, hépatites A et E, toxoplasmose.

N. D.
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