L’autogreffe lamellaire restitue la transparence cornéenne - La Semaine Vétérinaire n° 1237 du 16/09/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1237 du 16/09/2006

Nouveautés en chirurgie ophtalmologique

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Pierre-François Isard

Fonctions : praticien exclusif en ophtalmologie à Sevrier (Haute-Savoie)

Différentes techniques chirurgicales intéressent la cornée, la chambre antérieure, l’angle irido-cornéen, le cristallin et le segment postérieur de l’œil.

Pour le praticien généraliste, le déficit en informations objectives et claires est manifeste en ce qui concerne les évolutions récentes proposées par l’ophtalmologie vétérinaire. Un état des lieux des possibilités chirurgicales modernes, proposées en complément des techniques classiques, présente donc un intérêt pour les différentes structures endoculaires.

La perte de transparence de la cornée résulte des affections cornéennes

Diverses techniques chirurgicales peuvent être instaurées pour retrouver la transparence de la cornée après le contrôle de l’affection initiale.

La kératectomie superficielle, souvent proposée dans les cas de kératites superficielles chroniques à médiation immune (“kératite pigmentaire”), mais également dans tous les cas où la perte de transparence intéresse les couches superficielles de la cornée, est progressivement abandonnée au profit de la cryothérapie épithéliale. La première, relativement simple à mettre en œuvre, présente l’inconvénient d’être souvent suivie d’une récidive aggravée. La seconde nécessite un équipement pour provoquer une congélation fugace de l’épithélium et entraîner l’éclatement des cellules mélaniques.

L’autogreffe lamellaire est une technique de plus en plus utilisée pour traiter des lésions cornéennes ulcératives peu étendues et non infectées. Le greffon lamellaire est prélevé sur l’œil adelphe, ou sur le même œil en région saine, puis suturé sur la lésion préparée par une kératectomie. La réussite est conditionnée par la bonne coaptation entre le greffon et le receveur, et par la qualité des sutures (nylon monofil 10/0). La greffe lamellaire est la technique qui permet de restaurer la meilleure transparence cornéenne avec un risque de rejet minimal.

Chez le chien les phénomènes de rejet sont fréquents

L’homogreffe transfixiante exige quant à elle une maîtrise chirurgicale sans faille, la nécessité de disposer d’un greffon compatible de bonne qualité et une gamme de trépans de premier choix. De plus, chez le chien, et beaucoup moins fréquemment chez le chat, les phénomènes immunitaires de rejet sont difficiles à contrôler. Réservée aux cas d’ulcère perforant important, elle reste exceptionnelle en première intention. La technique la plus élaborée consiste en l’insertion d’un implant transparent et réfractif (kératoprothèse) au sein de la cornée malade. Il s’agit d’une intervention assez complexe qui est habituellement réservée aux cas de cécité cornéenne bilatérale. Les résultats sont en général particulièrement satisfaisants, sans risque de rejet, et avec un taux de restauration visuelle qui dépasse 80 % à long terme.

La chambre antérieure est souvent encombrée par des dépôts fibrineux d’origine inflammatoire. Elle est normalement optiquement vide et perméable à la lumière. Lorsqu’elle est occupée par de tels dépôts, elle peut être traitée grâce à la chirurgie.

Dans un premier temps, un parage enzymatique est effectué. Du tissue plasminogen activator (TPA : activateur tissulaire du plasminogène) est injecté dans la chambre antérieure. Il permet la lyse des dépôts fibrineux.

Dans les cas compliqués qui risquent d’induire une séclusion pupillaire (la fibrine provoque l’adhésion entre le bord pupillaire et l’iris), un parage chirurgical peut être nécessaire pour libérer les synéchies marginales. L’usage d’une substance visco-élastique (hyaluronate de sodium réticulé) est un adjuvant chirurgical précieux pour ses propriétés mécaniques et hémostatiques.

L’angle irido-cornéen est le siège de l’évacuation de l’humeur aqueuse

Il peut être affecté par un dysfonctionnement primaire ou secondaire aboutissant au glaucome.

Le glaucome primaire évolue sur un mode chronique ou subaigu. Il doit être traité chirurgicalement dès que l’augmentation de la pression intraoculaire cesse d’être maîtrisée par le traitement médical (elle remonte au-dessus de 25 mm de mercure). Le traitement de choix fait appel à la photocoagulation des corps ciliaires au laser infrarouge, associée ou non à une fistulisation sclérale ou cornéenne.

Le glaucome secondaire est une complication classique de l’uvéite antérieure (uvéite hypertensive). Cette affection évolue le plus souvent sur le mode aigu. Le traitement médical est illusoire et la pression intraoculaire dépasse rapidement les 50 mm de mercure. Il s’agit d’une véritable urgence chirurgicale si le praticien veut avoir quelques chances de sauver l’organe et la fonction visuelle. Le geste chirurgical, réservé aux cas où la vision est encore conservée, consiste à mettre en place une voie d’évacuation artificielle de l’humeur aqueuse (shunt, valve de Ahmed, etc.) en même temps qu’un traitement médical local, général ou même endoculaire (anti-inflammatoires stéroïdiens et non stéroïdiens) est instauré pour contrôler l’inflammation initiale. Une complication classique est la fermeture en amont du shunt par de la fibrine. Elle peut être prévenue ou traitée par une injection intracamérale de TPA. En aval du shunt, la fibrose rétrograde est gérée par la mise en place d’une “bulle de filtration”, remplie de substance viscoélastique, additionnée de substance antifibrotique (inhibiteur cellulaire, antimitotique.)

La cure chirurgicale du glaucome reste l’un des challenges de l’ophtalmologie vétérinaire. Néanmoins, les adjuvants de la chirurgie, comme l’amélioration des dispositifs de filtration, permettent actuellement un taux de conservation visuelle qui approche 50 %.

La chirurgie de la cataracte avec implantation est maintenant parfaitement maîtrisée

En l’absence d’affection associée (inflammatoire notamment), le taux de réussite dépasse 95 % pour les opérateurs entraînés. La chirurgie du cristallin luxé est un peu plus délicate et doit souvent s’accompagner d’une vitrectomie antérieure. La pose d’un implant suturé à la sclère permet, outre la correction réfractive, d’installer entre le vitré et la chambre antérieure une barrière mécanique qui limite le risque de décollement rétinien secondaire.

Les opérations du vitré et de la rétine sont techniquement exigeantes. L’instrumentation spécifique nécessaire trouve sa justification dans un taux intéressant de restauration visuelle.

La vitrectomie permet l’élimination de tout ou d’une partie du vitré

Elle est réalisée lorsque le vitré a perdu sa transparence (organisation inflammatoire, hémorragie), lorsqu’il est contaminé et représente un danger (panuvéite récidivante) pour l’ensemble du globe ou encore lorsque des phénomènes cicatriciels provoquent des tractions sur la rétine. L’exérèse vitréenne se pratique à la faveur d’une incision sclérale et requiert l’emploi d’un matériel spécifique : dispositif de visualisation du segment postérieur, vitréotome et système d’illumination endoculaire.

Lors de décollement rétinien et après un contrôle de l’affection causale, la chirurgie de recollement débute par une vitrectomie complète. Le neuroépithélium décollé est ensuite appliqué contre l’épithélium pigmentaire par la pression d’un fluide à haut poids moléculaire (perfluorure de carbone). Il est ensuite littéralement collé grâce à l’énergie délivrée par une sonde laser endoculaire. Le fluide d’application est alors remplacé par un fluide de maintien (huile de silicone).

La chirurgie endoculaire, particulièrement exigeante dans la réalisation du geste, nécessite une solide formation et une instrumentation spécifique. L’ophtalmologie vétérinaire propose aujourd’hui un éventail complet d’interventions techniques dont la fiabilité en termes de maintien de la fonction visuelle est sans cesse améliorée.

VOIR AUSSI

• P.-F. Isard : « La chirurgie de la cataracte s’approche du zéro défaut », La Semaine Vétérinaire, n° 1073 du 16/11/2002 en page 18.

• P.-F. Isard : « Glaucome : Ex-Press, dispositif de drainage original », Le Point Vétérinaire, n° 228, septembre 2002.

• L. Bouhanna : « Traitement chirurgical au laser du glaucome », Le Point Vétérinaire, n° 246, juin 2004.

• P.-F. Isard : « La chirurgie vitréo-rétinienne restaure la vision », La Semaine Vétérinaire, n° 1201 du 5/11/2002 en pages 36-37.

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