Une nouvelle source de contamination par les salmonelles est mise en évidence

Salmonella enterica sérovar Enteritidis (S. Enteritidis) est l’un des deux sérotypes les plus impliqués dans les toxi-infections alimentaires collectives à salmonelles. Le réservoir de Salmonella est principalement animal, domestique et sauvage. Le rôle des rongeurs, des coléoptères, des mouches et des nématodes dans la transmission et la persistance de S. Enteritidis a déjà été mis en évidence. Mais il a été démontré récemment que Dermanyssus gallinae (D. gallinae), acarien hématophage communément appelé pou rouge des volailles (^{voir photo 1}), peut être infecté par S. Enteritidis à la suite d’un repas avec du sang contaminé. L’ingestion de poux rouges par les oiseaux étant courante, l’hypothèse d’une contamination des poules par S. Enteritidis après l’ingestion d’acariens infectés par ce sérotype a été testée de façon expérimentale.

Cette expérimentation est l’objet de la thèse de Claire Valiente-Moro⁽¹⁾, dont les résultats ont été présentés lors du symposium international Salmonella et Salmonellosis qui s’est tenu à Saint-Malo en mai dernier. Ses travaux ont été conduits au sein d’une unité mixte de recherche école vétérinaire de Lyon-Institut de recherche agronomique (Inra)⁽²⁾ en collaboration avec l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) de Ploufragan.

A la suite de l’administration orale de poux préalablement contaminés par S. Enteritidis à des poussins, la capacité de S. Enteritidis à coloniser le tube digestif et à envahir les organes internes est analysée.

Dans un premier temps, des poux rouges sont infectés avec S. Enteritidis. Pour cela, deux techniques sont utilisées : le contact des acariens sur une culture de salmonelles durant quarante-huit heures (infection cuticulaire) et le gorgement des poux au moyen d’un système in vitro comprenant une peau de poulet et l’extrémité d’une pipette servant de réservoir au sang contaminé à raison de 10⁸ UFC/ml (infection orale durant le repas de sang, ^{voir photo 2}). Un D. gallinae fraîchement gavé contient 2,0 x 10⁴ UFC de S. Enteritidis. Afin d’être certain de la localisation interne des salmonelles dans les acariens à la suite de leur infection expérimentale, les poux sont lavés avec du paraformaldéhyde.

Des poux contaminés induisent une infection systémique chez des poussins d’un jour

Dans un deuxième temps, cent poussins d’un jour, divisés en trois groupes, subissent une inoculation par voie orale (^{voir photo 3}). Chaque poussin reçoit dix poux en suspension dans une solution salée tamponnée. Trente-cinq reçoivent les poux infectés par voie orale, trente-cinq par voie cuticulaire et trente poux ne sont pas infectés. Six jours après l’inoculation, des salmonelles sont isolées dans les fientes. Aucune excrétion de salmonelles n’est observée chez les animaux témoins. Douze jours après l’inoculation, S. Enteritidis est isolée dans les cæcums, la rate et le foie de tous les poussins qui ont reçu des poux infectés, et ce quel que soit le mode de contamination des acariens.

L’invasion des organes comme le foie et la rate est un indicateur de la nature systémique de l’infection, donc de l’infection possible des organes reproducteurs, puis des œufs et enfin du consommateur. L’analyse statistique des résultats ne montre pas de différence significative au seuil de 5 %, selon le mode d’infection des poux utilisés.

Si l’infection des poussins par des D. gallinae infectés par des salmonelles est expérimentalement possible, Claire Valiente-Moro précise que l’hypothèse d’une infection de poulets plus âgés par des poux infectés est à démontrer, au niveau expérimental et dans les conditions d’élevage habituelles. Par ailleurs, il est également nécessaire d’étudier les quantités de salmonelles présentes dans les lots contaminés et infectés, avant et après chaque bande, et la contamination de Dermanyssus gallinae. Dans ce but, Claire Valiente-Moro et l’équipe de l’UMR Inra “protozoaires entéricoles et parasites des volailles” est à la recherche d’élevages infestés par des poux rouges et déclarés positifs vis-à-vis des salmonelles, ou qui ont été déclarés positifs lors de la bande précédente afin d’analyser la contamination des acariens.

• (1) La première partie de la thèse étudie le rôle de vecteur de Dermanyssus gallinae. L’auteur met actuellement au point une PCR-TTGE (polymerase chain reaction-temporal temperature gel electrophoresis) permettant le dépistage des agents pathogènes présents dans l’acarien.

• (2) UMR protozoaires entéricoles et parasites des volailles 958.

• Voir aussi La Semaine Vétérinaire n° 1018 du 2/6/2001 en page 43, et Le Point Vétérinaire n° 266, juin 2006, en pages 46-50.