La démarche diagnostique va de l’examen des documents d’élevage jusqu’à la mamelle - La Semaine Vétérinaire n° 1231 du 24/06/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1231 du 24/06/2006

Gestion des infections mammaires dans les troupeaux laitiers

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Jean-François Labbé

Les comptages cellulaires sur lait de tank et individuels, l’analyse bactériologique, le comptage cellulaire à la ferme ou au cabinet et l’examen de l’animal permettent au praticien de poser un diagnostic.

Les mammites, quelles que soient leurs manifestations (élévation des concentrations cellulaires individuelles ou symptômes locaux), ne font que rarement l’objet d’un appel au vétérinaire. En effet, les éleveurs estiment que l’autoprescription d’antibiotiques intramammaires reste la seule réponse aux problèmes de qualité du lait qu’ils rencontrent. Seules les mammites aiguës, dites “colibacillaires”, les poussent à s’adresser au praticien. Pourtant, la connaissance de l’origine d’une contamination du troupeau selon l’étiologie bactérienne place le diagnostic de ces affections mammaires au premier rang des impératifs pour la réussite des mesures de traitement et de prévention. Situé au côté d’autres intervenants de la filière (contrôleurs laitiers, etc.), le vétérinaire doit se positionner prioritairement sur ce créneau, pour l’étude du troupeau jusqu’à celle des animaux pris individuellement, voire celle des quartiers atteints. Dans le contexte actuel de la filière lait, dont l’une des principales préoccupations est la recherche de traitements ciblés et sécurisés, l’implication des confrères dans le domaine de la qualité du lait devra s’accentuer.

1 LE COMPTAGE CELLULAIRE SUR LAIT DE TANK (CCT).

Le vétérinaire dispose d’un grand nombre de documents dont il peut tirer simplement des informations, véritables paramètres de son diagnostic. L’analyse de l’animal n’intervient qu’après une anamnèse réalisée à partir de ces documents. Grâce à des contrôles plurimensuels, la lecture du CCT permet de réaliser un prédiagnostic du troupeau pour une mise en alerte précoce de l’exploitation et une évaluation rapide de la gravité de la situation sanitaire.

Les avantages sont la rapidité de la lecture, la fréquence des analyses et la présence des documents chez tous les éleveurs, adhérents ou non au contrôle laitier.

Les inconvénients sont l’impossibilité d’un diagnostic étiologique, la difficulté d’interprétation quand les éleveurs écartent le lait à cellules, l’absence d’élévation des comptages cellulaires lors de certaines infections par des germes Gram négatif et l’impossibilité d’évaluer le nombre d’animaux impliqués.

2 LES COMPTAGES CELLULAIRES INDIVIDUELS (CCI ou NCI).

Le document du contrôle laitier, ou autre, produit mensuellement, permet l’identification simple et rapide des animaux contaminés grâce aux comptages cellulaires individuels.

Les avantages sont la rapidité du repérage des animaux ayant un CCI élevé et de l’évaluation du taux d’animaux ayant un CCI élevé, ainsi que la facilité d’évaluation du taux d’infections se traduisant par des manifestations cliniques, à condition que “l’historique mammites” soit bien tenu. Dans le cas contraire, questionner l’éleveur pour chaque vache individuellement permet une approximation suffisante.

L’inconvénient est la présence de ces documents exclusivement chez les éleveurs adhérents au contrôle laitier ou à un autre suivi “volontaire”.

3 LES ANALYSES BACTÉRIOLOGIQUES.

Les analyses bactériologiques, fondées sur les prélèvements individuels, permettent de réaliser un diagnostic de troupeau : elles sont importantes pour préciser l’origine des infections mammaires de l’exploitation. Certes, l’analyse du taux de mammites cliniques par rapport à celui de vaches à cellules permet, en théorie, une “orientation” du diagnostic. Cependant, la multiplication des analyses effectuées par les vétérinaires sur le terrain montre que la distinction basée sur le taux d’expression clinique par rapport aux animaux qui ont un taux cellulaire élevé n’a pas toujours la fiabilité qui lui était attribuée. L’analyse bactériologique est donc un outil à ne pas négliger pour un diagnostic de troupeau. Quatre à cinq prélèvements par exploitation sont au minimum nécessaires pour éviter le biais du “cas particulier”. Cette analyse n’a pas pour vocation de préciser la nature du germe afin d’affiner un traitement individuel, mais bien d’apporter un éclairage précis de la problématique microbienne de l’élevage.

Les avantages sont la précision du diagnostic, la facilité de mise en œuvre et le faible coût. Les inconvénients sont la nécessité de former l’éleveur ou la réalisation des prélèvements par le vétérinaire. En outre, la réponse est lente si le service est externalisé.

4 COMPTAGE CELLULAIRE À LA FERME OU AU CABINET.

Le Californian Mastitis Test (CMT) et le Delaval Cell Counter (DCC) sont utilisés pour détecter le quartier infecté ou réaliser une analyse complémentaire sur les quatre quartiers. Lors de mammites à faible manifestation clinique (“subcliniques”), la détection du ou des quartiers infectés est nécessaire avant de pratiquer l’infusion intramammaire dans le quartier atteint. Le DCC permet une analyse chiffrée et bien plus sensible des CCI que le CMT, dont le seuil de sensibilité varie de 400 000 à 600 000 cellules selon les opérateurs. L’utilisation marginale du CMT dans les élevages montre bien que ce kit ne répond pas aux attentes de l’éleveur et du vétérinaire. Au contraire, le DCC, à lecture directe, donne un résultat chiffré et précis directement exploitable. Ses multiples applications (voir encadré) lui confèrent un rôle prépondérant dans la démarche diagnostique des affections mammaires.

Les avantages du DCC sont la rapidité de lecture (quarante-cinq secondes), la sensibilité et la fiabilité, le caractère chiffré des résultats, qui sont donc “parlants” pour l’éleveur, l’image d’outil diagnostique “moderne” qui lui est attachée.

Les inconvénients du DCC sont la nécessité de s’équiper d’un appareil spécial et d’un kit de prélèvement (cassette) spécifique, ainsi que le prix de la cassette diagnostique (1,20 €).

5 EXAMEN DE L’ANIMAL.

Régulièrement pratiqué lors de mammites aiguës, il reste le parent pauvre de la sémiologie des affections mammaires subaiguës et chroniques. Généralement, il permet, à la suite de l’appel de l’agriculteur, de préciser le diagnostic et le pronostic d’une mammite aiguë, dite “colibacillaire”. Le simple examen clinique et l’observation des modifications de l’aspect du lait ne permettent pas un diagnostic différentiel entre les infections dues à des entérobactéries et celles dues à des germes Gram positif. Seul un prélèvement pour la réalisation d’une analyse bactériologique permet de lever le doute.

Lors de mammites subaiguës et chroniques, l’examen de la mamelle et des trayons fait suspecter d’éventuelles anomalies de la traite. Pratiqués lors de la visite de traite, ces examens permettent aux praticiens de préciser, dans certains cas, les causes des affections mammaires du troupeau. Des indurations peuvent également être mises en évidence dans le parenchyme mammaire.

En partant du critère de troupeau (CCT), puis en exploitant des paramètres individuels (CCI) à l’usage de ce troupeau, le vétérinaire peut exercer son expérience pour résoudre les problèmes de l’exploitation quant à la qualité du lait. Les actions sur l’environnement de l’animal n’en sont que plus précises et efficaces. Les traitements, modifiés selon l’origine bactérienne, permettent une thérapie de précision. Arrive alors le moment où le praticien souhaite “aller plus loin” : la salle de traite semble attendre un audit et, parfois, la ration ne demande qu’à être analysée… Ce sont des signes qui ne trompent pas. Le vétérinaire est pris par le virus PQL (passion qualité du lait), qui touche tous ceux qui aiment leur métier et veulent le défendre dans un environnement concurrentiel.

  • (1) M : mélange des quatre quartiers.

  • (2) Q : quartier par quartier.

  • (3) Le délai entre le traitement et l’évaluation de son efficacité est en cours d’étude.

Le DCC et ses fonctions dans le diagnostic

• Pour les élevages inscrits au contrôle laitier :

- repérer le quartier atteint chez un animal avec plus de 300 000 cell./ml (250 000 pour une génisse).

• Pour tous les élevages :

- contrôle intermédiaire chez les bovins « douteux », quinze jours après un contrôle suspect (M(1) ou Q(2)) ;

- contrôle au tarissement d’animaux « douteux » (M ou Q) ;

- contrôle à l’achat (M ou Q) ;

- vérification de l’efficacité d’un traitement en lactation(3) (Q si mammite clinique, M ou Q si mammite subclinique) ;

- vérification de l’efficacité d’un traitement hors lactation (sept jours après le vêlage).

• Pour les élevages non inscrits au contrôle laitier :

- détection des animaux puis des quartiers atteints à la suite de la réalisation d’un screening au Californian Mastitis Test ou après des comptages cellulaires individuels réalisés par un laboratoire en cas d’élévation du comptage cellulaire sur lait de tank.

J.-F. L.
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