Les résultats des analyses de sensibilité bactérienne dépendent de facteurs techniques

La combinaison du triméthoprime avec un sulfamide est largement employée en médecine équine pour traiter des infections variées. La popularité des sulfamides potentialisés repose sur leur spectre d’action assez étendu (contre de nombreuses bactéries Gram positif et Gram négatif), la possibilité de les administrer par voie orale, leur coût relativement faible et la sécurité d’emploi. En l’absence de prélèvements destinés à des analyses bactériologiques ou en attente des résultats, le praticien doit connaître les micro-organismes les plus fréquemment impliqués dans tel ou tel type d’infection, ainsi que la sensibilité supposée des bactéries.

S. equi var. zooepidemicus est le plus souvent rencontré au niveau respiratoire

Streptococcus equi var. zooepidemicus (coque bêta-hémolytique) est la bactérie la plus souvent rencontrée dans le cadre des infections du tractus respiratoire chez le cheval. La sensibilité de ces streptocoques est considérée comme facilement prévisible vis-à-vis des bêta-lactamines et du triméthoprime-sulfa, d’où l’utilisation extrêmement fréquente de ces molécules pour le traitement des troubles respiratoires.

Notre confrère américain D.J. Feary et ses collaborateurs se sont interrogés sur la possibilité d’une résistance accrue des streptocoques bêta-hémolytiques aux sulfamides potentialisés. Ils ont réalisé une étude rétrospective sur le sujet à l’université du Colorado. Dans un premier temps, ils ont comparé les résultats d’antibiogrammes concernant des S. zooepidemicus issus des sécrétions respiratoires de chevaux admis en consultation entre 1987 et 1990, puis entre 1997 et 2001. Selon les résultats, le taux de résistance des S. zooepidemicus au triméthoprime-sulfa est passé de 8 à 42 % en dix ans !

Dans un second temps, les scientifiques ont étudié l’influence de la technique de laboratoire utilisée pour la réalisation de l’antibiogramme. En effet, il en existe deux principales : celle des disques de Kirby-Bauer et celle de dilution en bouillon. Les auteurs ont comparé la sensibilité de quarante et un isolats de S. zooepidemicus d’origine respiratoire via l’utilisation des deux procédés. Les résultats mettent en évidence que 37 % des S. zooepidemicus apparaissaient résistants à la combinaison triméthoprime-sulfa par la méthode des disques de Kirky-Bauer. En revanche, 100 % des S. zooepidemicus sont sensibles avec la méthode de dilution en bouillon !

Veiller à appliquer les recommandations pour le contrôle de la qualité des milieux

Le milieu de culture Mueller-Hinton (avec des globules rouges de mouton) utilisé dans la technique de Kirky-Bauer semble contenir de l’acide para-amino benzoïque (PABA) et des dérivés qui entravent l’action du triméthoprime-sulfa, d’où la survenue de fausses conclusions de résistance. Parfois, les milieux de culture sont enrichis avec du sang ou des produits dérivés pour permettre une croissance adéquate du S. zooepidemicus. Or cela crée un antagonisme avec l’antibiotique (in vitro, mais non in vivo). Les auteurs insistent sur le fait que les résultats des analyses de sensibilité bactérienne dépendent de facteurs techniques, ainsi que de l’application des recommandations pour le contrôle de la qualité des milieux de culture (établies par le National Committee for Clinical Laboratory Standards aux Etats-Unis). Des rapports erronés de résistance peuvent en effet conduire le praticien à modifier inutilement le traitement antibiotique entrepris chez un cheval.

• Source : D.J. Feary, J.L. Traub-Dargatz, D. Hyatt, S. Roach, P.S. Morley, C.C. Wu, R.L. Jones : « Investigation of reported resistance of Streptococcus equi ssp. zooepidemicus to trimethoprim-sulfa in horses  », proceeding du congrès de l’American Association of Equine Practitioners (AAEP) organisé à Seattle (Etats-Unis) en 2005 (www.ivis.org/proceedings/AAEP/2005/toc.asp).