La gale sarcoptique ovine se traite avant et après la montée des animaux en estive - La Semaine Vétérinaire n° 1230 du 17/06/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1230 du 17/06/2006

Affections des moutons

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Francis Personne*, Gérald Marty**, Hubert Brun***

Un protocole de traitement à base de doramectine permet de maîtriser Sarcoptes scabiei dans treize estives des départements du Gard et de la Lozère, où 60 à 100 % des moutons étaient parasités.

Sur des estives au sein desquelles les effectifs ovins sont importants, différents paramètres contribuent à la maîtrise de la gale sarcoptique ovine, appelée également gale de la tête. Parmi ces facteurs figurent la sensibilisation des éleveurs, la mise en place d’un protocole adapté avec des molécules efficaces, un encadrement technique à chaque intervention et l’évaluation de l’efficacité des traitements. Ce dernier point permet de poursuivre l’action durant plusieurs années et d’obtenir une réelle éradication sur l’ensemble d’un ou de plusieurs massifs montagneux. Un tel résultat a d’ailleurs été obtenu dans le Gard et la Lozère où 60 à 100 % des animaux étaient parasités. Depuis la fin des années 90, les estives de ces deux départements payaient un lourd tribut à la gale sarcoptique.

Les troupeaux, qui sont également issus de l’Hérault, montent en estive en juin sur les massifs de l’Aigoual et des Monts Lozère. Ils en redescendent fin août ; les agnelages commencent début septembre. Parfois, tous les moutons d’une estive sont atteints, mais à des degrés divers. Les animaux concernés sont de race locale rustique comme la raïole, la caussenarde des garrigues, la rouge du Roussillon, la tarasconnaise, la pré-Alpes du Sud et la blanche du massif central. Ils produisent essentiellement des agneaux jeunes et légers destinés à l’engraissement en France ou à l’étranger. Quelques élevages produisent des agneaux finis.

La gale sarcoptique est provoquée par un acarien de petite taille, Sarcoptes scabiei, qui se développe dans le derme de la peau au niveau de la tête, des oreilles et du chanfrein, en creusant des galeries. Ces localisation et contagiosité expliquent la difficulté de l’éradiquer dans la totalité d’un élevage.

Les éleveurs traitent leurs animaux plusieurs fois par an, soit à la montée en estive, où ils administrent une seule fois une lactone macrocyclique (souvent en sous-dosage), soit le plus fréquemment pendant l’hiver, où ils effectuent des pulvérisations répétées empêchant les grattages intenses. Toutefois, cela ne permet nullement de guérir le troupeau.

En 2004, à la demande du Groupement de défense sanitaire (GDS) et du syndicat ovin du Gard, un programme d’éradication a été mis en place sur l’ensemble des estives de ce département et étendu à la Lozère.

Comme ces deux départements ne sont pas équipés de baignoires fixes en montagne et traversent le parc national des Cévennes, le traitement par voie injectable a été préféré. La doramectine (Dectomax® solution injectable) a été choisie notamment pour son efficacité sur les sarcoptes dans les espèces porcine et bovine, associée à la possibilité d’injection par voie intramusculaire chez les ovins(1). Ce mode d’administration est plus facile dans les grands troupeaux et limite le risque d’erreur lié à des injections dans la laine. Son application est possible à tout stade physiologique de l’animal. La sécurité de ce type de traitement et ses conséquences sur l’environnement ont été étudiées. Les résultats ne démontrent pas d’impact néfaste significatif à long terme et indiquent un risque bien inférieur à celui des traitements par baignade.

Les animaux en estives, restés sur le site ou nouvellement introduits sont traités

Pour mettre en place le protocole, cette prophylaxie est pratiquée dans cinq estives volontaires, la première année. Le GDS et le syndicat ovin assurent le suivi technique et analysent les premiers résultats.

Après avoir effectué un recensement des éleveurs et des animaux de chaque estive, le protocole est mis en place. Il consiste en une injection de 1,5 ml de doramectine par voie intramusculaire chez tous les animaux présents à la montée en estive. Puis, une deuxième injection est réalisée dix jours plus tard. Pendant l’été, une désinsectisation des bâtiments d’élevage après un curage est réalisée. Les animaux restés sur le site de l’exploitation sont également traités (deux injections à dix jours d’intervalle). Un troisième traitement est réalisé à la descente d’estive, vers la fin du mois d’août. La posologie employée est de 1 ml par 50 kg de poids vif (200 µg/kg) par voie intramusculaire, ce qui correspond à 1 ml par agnelle à chaque injection, à 1,5 ml par brebis et à 2 ml par bélier.

Des mesures complémentaires sont instaurées. Les animaux achetés sont isolés pendant au moins quinze jours et sont traités selon le même protocole (deux injections à dix jours d’intervalle) quelle que soit la période de l’année avant leur introduction dans le troupeau. Les contacts avec des estives n’étant pas incluses dans le protocole la première année sont limités, de façon à éviter toute recontamination des animaux.

Les visites montrent que les ovins des huit estives de 2005 ont été assainis

Au début du mois de février, chaque élevage est visité afin d’apprécier l’état sanitaire et de constater ou non l’efficacité de cette prophylaxie. Des mesures de rattrapage de traitement sont prises si besoin.

Le protocole de maîtrise de la gale de la tête est mis en place durant trois ans (2004, 2005 et 2006). Il concerne toutes les estives des deux massifs, soit plus de 15 000 animaux sur treize estives (voir tableau).

Seuls deux troupeaux de la première année (2004) sur trente-trois sont de nouveau traités au printemps 2005 par deux injections complémentaires, comme préconisé dans le protocole, car ils se sont une nouvelle fois infestés pendant la période hivernale. Les visites de 2006 montrent que les animaux des huit estives de 2005 sont sains. Ils ne seront donc traités qu’une fois, par injection, à la descente de montagne. Cela permettra de lutter contre d’autres parasites internes alors présents, juste avant la période d’agnelage.

  • (1) Dectomax® ne possède pas d’indication pour le traitement de la gale sarcoptique chez les ovins.

Clefs de l’éradication de la gale sarcoptique

• Tous les animaux d’une même estive doivent être traités.

• Le traitement doit avoir lieu le même jour à la montée et à la descente.

• Les animaux non estivés doivent être traités avec la même molécule.

• Les bâtiments sont curés, nettoyés, puis désinsectisés.

• Tout animal introduit doit être traité et mis en quarantaine avant son entrée définitive dans le troupeau.

• L’ensemble des estives d’un massif doit mettre en place cette prophylaxie pour éviter de nouvelles infestations lors des mélanges d’animaux en montagne.

F. P.

BIBLIOGRAPHIE

  • • S.M. Taylor : « Sheep scab : environmental considerations of treatement with doramectin », Vet. Parasitology, 1999, n° 83.
  • • P.G. Bates et coll. : « Control of sheep scab (Psoroptes ovis) on artificially infested sheep with a single injection of doramectin », Veterinary Record, 1995, n° 137, pp. 486-488.
  • • L. Rehby, F. Personne : « Gale psoroptique des ovins. Seule la rigueur du traitement permet d’en venir à bout », La Semaine Vétérinaire n° 893 du 18/4/1998, page 29.
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