La morphologie et le comportement des animaux en captivité sont modifiés - La Semaine Vétérinaire n° 1220 du 01/04/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1220 du 01/04/2006

Sélection artificielle

Formation continue

FAUNE SAUVAGE

Auteur(s) : Alain Zecchini

L’alimentation et le stress sont les deux causes principales de changement des espèces détenues dans les zoos.

L’évolution potentielle vers la domestication représente un risque non négligeable pour les animaux sauvages des établissements zoologiques. Elle se manifeste par des changements, par rapport à l’état naturel, qui affectent principalement la morphologie, la physiologie et le comportement. Ces modifications traduisent un relâchement de la sélection naturelle et ne peuvent qu’interpeller les responsables des zoos. Ces derniers souhaitent légitimement que leurs pensionnaires restent conformes aux critères de leur espèce. De même, les programmes de réintroduction ne peuvent être probants que si les individus concernés n’ont pas subi d’évolution les empêchant de s’acclimater au nouvel habitat.

Tant la morphologie que le comportement ont fait l’objet de nombreuses études, depuis plus d’une centaine d’années. Deux synthèses récemment parues(1) font le point sur ces questions.

La nourriture en captivité entraîne des différences au niveau du crâne

C’est au XIXe siècle que l’alimentation inadaptée des animaux captifs a été repérée comme la cause de modifications morphologiques. Le manque de vitamines et de minéraux engendre notamment des affections osseuses. De grands progrès ont été réalisés depuis cette époque pour corriger l’alimentation, surtout depuis les années 60 à 70. Mais des différences de taille et de taux de croissance persistent toujours entre les individus captifs et sauvages de la même espèce. Les travaux se concentrent toutefois sur le crâne, puisqu’il y a un lien direct entre cette partie du corps et l’alimentation (le squelette postcrânien est jusqu’à présent peu étudié).

Il est ainsi suggéré que la nourriture en captivité, préconditionnée, manque de certaines qualités qui sont présentes dans la nature. Plus malléable, moins abrasive éventuellement, elle ne demanderait que des efforts minimes de mastication aux animaux captifs. L’appareil dentaire pourrait alors subir des altérations, comme des malocclusions. Cela est observé chez des herbivores, des rongeurs, des lagomorphes, des éléphants. L’hypoplasie de l’émail dentaire est aussi constatée chez des primates. Ces changements, et d’autres, pourraient se transmettre à l’architecture osseuse du crâne. Des arcades zygomatiques plus larges, avec un crâne raccourci, caractérisent des rhinocéros, des lions et des alligators.

La nourriture plus riche et plus facilement ingérée a également des effets sur la morphologie et la physiologie de l’appareil digestif. Ces observations sont surtout faites chez des oiseaux. Elles montrent que certaines espèces auraient un intestin et un cæcum plus courts. Le cerveau, lui, subit en outre des modifications. Il se réduit, et c’est l’un des critères majeurs retenus pour la domestication. Il se vérifie chez des visons, des gerbilles, des sangliers, des lamas, etc. Le chien, à masse égale, possède une tête et un cerveau 20 % plus petits que le loup, son ancêtre. Les chevaux de Przewalski élevés en captivité et réintroduits ont un poids cérébral inférieur de 16 % et un volume crânien inférieur de 14 % par rapport à leurs congénères sauvages.

Des traits qui auraient été éliminés dans la nature peuvent subsister

L’éthologie des animaux en captivité montre également de nombreuses variations par rapport à l’état naturel. Sont principalement retenues la capacité d’exploration, l’absence ou non de crainte, la docilité, l’agressivité, l’activité et la socialité. Ces traits reposent sur une base génétique et sont liés à la vigueur individuelle. Ils sont affectés par la pression de sélection artificielle qu’engendre le confinement et qui se manifeste par le stress des animaux. Il est donc fréquemment constaté une capacité d’exploration réduite, une crainte de l’homme éliminée largement par l’habitude, une docilité favorisée (à la différence de l’agressivité), une activité souvent répétitive, une socialité assez limitée si les groupes ne reflètent pas toute la diversité des classes d’âge et de sexe. En outre, en captivité, des traits qui auraient été éliminés dans la nature peuvent subsister. Il en est ainsi du manque d’activité et d’agressivité. Plusieurs fonctions peuvent donc être altérées comme la sexualité, la recherche de nourriture, les réactions envers les prédateurs, les liens sociaux.

L’enrichissement environnemental est de plus en plus utilisé pour stimuler le comportement des populations captives, afin de réaliser l’objectif prioritaire des établissements : la reproduction. Certes, les animaux sauvages ne sont pas entièrement soumis à la sélection naturelle. L’homme exerce aussi des pressions (contacts, chasse, exploitation, dégradation ou réduction de l’habitat) qui ont des effets de plus en plus importants et qui poussent ces animaux à modifier partiellement leur comportement. Mais en captivité, la sélection est plus déterminante, puisqu’elle s’accomplit quotidiennement.

  • (1) H. O’Regan et A. Kitchener : « The effects of captivity on the morphology of captive, domesticated and feral mammals », Mammal Review, 2005, vol. 35, n° 3 et 4 ; P.T. Mc Dougall et coll. : « Wildlife conservation and animal temperament : causes and consequences of evolutionary change for captive, reintroduced, and wild populations », Animal Conservation, 2006, vol. 9, n° 1.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr