Les valeurs biologiques usuelles diffèrent chez le jeune - La Semaine Vétérinaire n° 1217 du 11/03/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1217 du 11/03/2006

Médecine pédiatrique

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Alexandre Balzer

Les paramètres hémato-biochimiques et le métabolisme des médicaments chez le chiot ou le chaton ne sont pas ceux de l’adulte.

L’hémogramme comprend classiquement les numérations des cellules sanguines (globules rouges, globules blancs et plaquettes), la formule leucocytaire, l’hémoglobinémie, l’hématocrite, le volume globulaire moyen (VGM), la teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine, la concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine (CCMH) avec parfois le taux de réticulocytes et l’examen au microscope du frottis sanguin.

Les valeurs usuelles de l’hémogramme de l’adulte ne permettent de cerner qu’imparfaitement celles du jeune animal. En outre, il est difficile d’établir avec précision des références chez ce dernier en raison du peu de données concernant le chien et surtout le chat. La plupart des valeurs usuelles ne donnent des indications que sur des races précises et, dans la majorité des cas, pour des animaux de laboratoire comme le beagle.

Les variations de l’hémogramme concernent surtout les globules rouges

Il est possible de distinguer deux périodes chez le jeune : de la naissance à quatre mois, puis de quatre à douze mois. Chez le chiot âgé de moins de quatre mois, le nombre de globules rouges, l’hémoglobinémie et l’hématocrite sont inférieurs aux valeurs usuelles de l’adulte (baisse de 30 à 35 % pendant les deux à trois premières semaines, puis augmentation régulière jusqu’aux valeurs normales). En revanche, le VGM et la CCMH sont conformes aux références de l’adulte. Le taux de réticulocytes est plus élevé jusqu’à l’âge de deux mois (4 à 7 %), alors que, chez le jeune âgé de quatre à douze mois, il se situe dans les valeurs usuelles de l’adulte (moyenne de 0,8 %). Si ces tendances semblent comparables chez le chaton, elles restent cependant comprises dans la fourchette des valeurs de l’adulte. En outre, une macrocytose chez le chaton de moins d’un mois, avec un VGM supérieur aux valeurs de référence de l’adulte, est observée.

Concernant les globules blancs, il y a peu de modifications chez le jeune. Il est simplement possible de noter une légère lymphocytose entre deux et six mois chez le chiot et une inversion de formule (augmentation des lymphocytes et des monocytes, dont les proportions dépassent 40 %, et diminution des polynucléaires) dans le premier mois de vie du chaton.

Quant aux données qui se rapportent aux plaquettes sanguines chez le jeune, elles sont quasi inexistantes et assimilées à celles de l’adulte.

Les valeurs de PAL, ALAT et ASAT sont plus élevées chez le jeune que chez l’adulte

Bien qu’il existe peu de données bibliographiques, de surcroît limitées à quelques races, il est essentiel de connaître les particularités biochimiques des jeunes. En effet, sans ces données, l’interprétation des résultats sanguins normaux ou pathologiques, chez un chiot ou un chaton, devient illusoire.

L’immaturité physiologique des jeunes animaux (rénale, hépatique, pancréatique, immunitaire, etc.) est à l’origine de variations des valeurs usuelles biochimiques. L’immaturité rénale explique, par exemple, une protéinurie huit fois plus faible chez le jeune de deux mois. Chez l’animal âgé de moins de deux semaines, la créatininémie est plus faible (inférieure de 30 % par rapport à celle de l’adulte). Cette variation est liée à plusieurs facteurs : la faible masse musculaire du jeune et, selon les périodes, les fluctuations du taux de filtration glomérulaire.

Les valeurs hépatiques diffèrent également beaucoup de celles de l’adulte. En effet, les phosphatases alcalines (PAL) sont particulièrement élevées dans les premières semaines de vie (de 175 à 8 500 UI/l), puis diminuent progressivement à partir de l’âge d’un mois (200 UI/l), jusqu’à se stabiliser vers un an (30 à 150 UI/l). L’activité des alanine-aminotransférases (ALAT) et des aspartate-aminotransférases (ASAT) est également légèrement plus élevée chez les nouveau-nés, avant de se stabiliser rapidement. A l’inverse, la protéinémie et en particulier la globulinémie sont faibles chez le nouveau-né (entre 40 et 70 g/l pour les protéines, et entre 15 et 30 g/l pour les globulines), puis la synthèse protéique – particulièrement en albumine – augmente entre deux semaines et six mois.

Avant l’âge de six mois, la T4 est plus élevée et le cortisol plus faible

De leur côté, les paramètres pancréatiques (amylase, lipase) sont faibles à la naissance et augmentent à partir du sevrage. Les concentrations plasmatiques en calcium, mais surtout en phosphates, sont supérieures à celles de l’adulte. A l’opposé, la natrémie et la chlorémie sont légèrement moins élevées jusqu’à six mois, tandis que la kaliémie est plus faible chez le nouveau-né, puis augmente jusqu’à deux mois pour diminuer de nouveau avant de se stabiliser.

Le système endocrinien est aussi le siège de particularités. Ainsi, l’hormone thyroïdienne T4 est plus élevée chez le jeune non sevré – jusqu’à deux à trois fois les valeurs de l’adulte – puis diminue après le sevrage et se stabilise à partir de six mois. Le cortisol basal est, quant à lui, plus faible chez le nouveau-né, puis s’élève jusqu’à six mois pour rejoindre les valeurs usuelles de l’adulte. En revanche, la réponse au test de stimulation à l’ACTH (hormone corticotrope) est semblable, ce qui traduit une hypostimulation et non un manque de maturité de l’axe cortico-surrénalien.

La biodisponibilité d’un médicament par voie parentérale diffère chez le jeune

Il n’existe pas, en médecine vétérinaire, de formulation spécifiquement adaptée au très jeune animal. Seule une approche empirique permet d’employer des médicaments pour cette tranche d’âge, d’autant que la littérature est rare sur le sujet. Il y a donc un réel risque d’inefficacité ou, au contraire, de toxicité lors de l’administration de produits qui n’ont fait l’objet d’études que chez l’adulte. En effet, à la naissance, le risque hypothermique élevé, les variations du pH gastrique, l’altération de la motricité et de la perméabilité, le métabolisme hépatique immature et les variations de la fonction rénale sont autant de facteurs qui influencent l’absorption, la distribution, la biotransformation et l’élimination des principes actifs.

L’absorption peut ainsi beaucoup varier. En effet, si la voie intraveineuse assure une absorption totale, la biodisponibilité par voie intramusculaire dépend de la masse musculaire, faible chez le jeune de moins de deux mois. Celle de la voie sous-cutanée peut être influencée par la vasoconstriction périphérique possible lors d’une température trop froide ou de choc chez le jeune, bien plus sensible qu’un adulte. Enfin, la biodisponibilité de la voie orale dépend de la physiologie et de la perméabilité gastro-intestinale, modifiées durant les premiers jours de la vie. La distribution est aussi perturbée par rapport à celle notée chez l’adulte. En effet, le volume de distribution est plus élevé chez le jeune, puisque sa teneur corpusculaire en eau est de 70 à 80 %, au lieu de 50 à 60 % chez l’adulte. Enfin, la barrière hémato-méningée est extrêmement perméable avant quinze jours et laisse donc se diffuser de nombreuses molécules.

Ainsi, les schémas posologiques sont à ajuster au cas par cas, selon l’état de l’animal (poids, température rectale, glycémie, hydratation, etc.) et la voie d’administration judicieusement choisie (priorité à l’intraveineuse, puis la sous-cutanée et enfin l’intramusculaire, la voie orale étant à éviter chez le jeune non sevré). L’augmentation rapide du poids au cours de la croissance impose des pesées régulières du chiot ou du chaton, afin d’ajuster au mieux la dose administrée.

Modifications des paramètres

Globalement, les paramètres biochimiques plus élevés chez le jeune sont : PAL, calcium, phosphore, cholestérol, glucose, T4.

Les valeurs plus faibles chez le jeune sont : les protéines, l’albumine, Na, Cl et le cortisol.

Les paramètres sans modification entre le jeune et l’adulte sont : les créatine-kinases, la gamma-glutamyl transférase (GGT) et la TSH.

A. B.

CONFÉRENCIERS

Nathalie Bourgès-Abella, ENV de Toulouse.

Alexandra Briend-Marchal, laboratoire Vébiotel.

Hervé Lefebvre, ENV de Toulouse.

Article réalisé d’après les conférences « particularités de l’hémogramme et particularités biochimiques chez le jeune » et « utilisation des médicaments chez le jeune », présentées lors du congrès annuel de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac), à Toulouse, du 2 au 4 décembre 2005.

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