LES « INTERNATS » DU PRIVÉ CONCURRENCENT CEUX DU PUBLIC - La Semaine Vétérinaire n° 1216 du 04/03/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1216 du 04/03/2006

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Auteur(s) : Benjamin Bassereau

Avant de se lancer dans la vie active ou d'opter pour une spécialisation, l'internat proposé par les écoles vétérinaires apparaît comme une zone tampon pour les jeunes diplômés. Quelques structures privées en France offrent des formations comparables (la plupart en canine, quelques-unes en équine), mais aux statuts tout à fait différents.

Jeudi, 7 h 30 du matin. Les “internes”, comme ils sont appelés dans la structure, arrivent peu à peu au centre hospitalier vétérinaire Frégis, à Arcueil (Val-de-Marne). Johanna Trollé, l'une d'entre eux, examine un chat souffrant d'un syndrome urologique avec José Glavan, un stagiaire. Nicolas Yérémian termine sa nuit de garde et reçoit les propriétaires d'un lapin mal en point. Les résidents, puis les associés de la clinique arrivent et font le tour du chenil. A 8 h 30, Laurent Cauzinille, l'un des associés, spécialisé en neurologie, lance la réunion pédagogique hebdomadaire. Ane Uriarte, une consœur espagnole également “interne”, y présente un point sur les ataxies devant une assemblée de jeunes praticiens attentifs et studieux.

Ce dispositif fait partie intégrante de la formation d'un an proposée par le centre hospitalier vétérinaire à huit confrères jeunes diplômés. Usuellement nommée “internat”, en comparaison avec les formations cliniques proposées dans les écoles vétérinaires françaises, elle n'en a pas la dénomination officielle. Dans la logique internationale, l'internat correspond en effet à des enseignements où les “apprentis” sont encadrés par des résidents et des praticiens diplômés des collèges européens. Ils reçoivent une formation pratique et théorique, par des roulements dans les différents services cliniques. Des formes équivalentes (ou non) existent dans d'autres structures privées, dans les écoles vétérinaires en France et à l'étranger (voir tableau en p. 28). Elles laissent donc plusieurs choix aux jeunes vétérinaires qui s'intéressent à une formation complémentaire après leur doctorat d'exercice. Et ils semblent être de plus en plus nombreux.

« Les candidats sont en droit d'exiger une garantie de savoir-faire et de pédagogie »

La clinique vétérinaire Saint-Maur à La Madeleine (Nord) propose une formation de type internat pour trois personnes par an, ciblée sur la chirurgie et l'environnement périopératoire. L'un de ses associés, Bruno Duhautois, tient à offrir les meilleures conditions préalables à cet enseignement : « Les candidats sont en droit d'exiger de leur tuteur une garantie de savoir-faire et de pédagogie. Le fait de regrouper au sein de la même structure un diplômé et un résident en dernière année du Collège européen de chirurgie est particulièrement moteur pour les prétendants à cette formation. L'interne a un programme de travail que nous établissons conjointement dès le début de l'année. Chez nous, il repose sur la théorie allégée du diplôme du Collège européen. En outre, si cet internat est certes non diplômant, il valide la poursuite d'un éventuel résidanat. »Le programme est également pratique, puisque les étudiants tournent une semaine en chirurgie, une autre en réanimation, hospitalisation et soins intensifs, la dernière étant réservée au travail personnel. A la clinique vétérinaire Bozon à Versailles (Yvelines), les associés ont mis en place, pour la première année, un autre dispositif. Cette fois, deux jeunes consœurs belges tournent entre le service de garde et le travail en journée. « Mais c'est davantage destiné à ceux qui aiment faire des gardes », précise l'un des confrères.

L'internat privé entre dans le cadre du Code du travail et de la convention collective

Ces formations ont une contrepartie qui consiste à assurer notamment les urgences, pendant les nuits et les week-ends. Mais cela s'inscrit dans le cadre du Code du travail et de la convention collective. En effet, les “internes” sont diplômés et exercent une activité vétérinaire salariée. Ils ont un contrat de travail et une rémunération qui dépend de la quantité de gardes effectuées et du chiffre d'affaires réalisé. Par exemple, selon les vétérinaires de la clinique Bozon, le salaire varie de 1 200 à 1 500 € bruts par mois. Grosso modo, la rémunération brute mensuelle s'échelonne de 500 à 1 500 €, suivant le niveau des responsabilités confiées et le temps de présence. Dans certains cas, elle est donc en dessous du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) brut mensuel, qui est de 1 217,88 € pour un salarié soumis aux 35 heures hebdomadaires. C'est le bémol négatif pour ceux qui sont passés par là et ont eu le sentiment d'être “exploités”, même s'ils connaissaient les conditions financières dès le départ.

Néanmoins, tous les anciens “internes” tirent des bénéfices de cette expérience. Ils n'obtiennent pas de diplôme, mais une reconnaissance. « J'ai appris beaucoup plus de choses en une année qu'en quatre ans à l'école, explique ainsi Emmanuelle de la Noue, qui s'est formée à Frégis en 1994. Cela offre une méthode de travail dont je me sers encore aujourd'hui. » Johanna Trollé, actuellement en formation, y trouve ce qu'elle cherchait : la possibilité d'acquérir des gestes techniques, de faire le “vrai” travail de praticien et de bénéficier de l'expérience de confrères spécialisés… « Pour ne pas devenir véto cortico-antibio », plaisante-t-elle. Ane Uriarte apprécie le contact plus étroit qui existe avec les vétérinaires : « Ici, je n'ai pas l'impression d'être un numéro. » Constant Lecoeur (A 99) a réalisé un internat dans une structure privée à Neuilly-sur-Seine et dans une université américaine. « Dans la structure privée, j'ai bénéficié d'une bonne approche de la pratique, d'une confrontation aux réalités de la clientèle. En revanche, d'un point de vue scientifique, l'expérience au sein de l'université est plus enrichissante. ».

Les internats dans les écoles vétérinaires offrent d'autres avantages

Les formations au sein des écoles vétérinaires françaises sont officielles, reconnues par des décrets récents. Elles donnent droit au statut d'étudiant et à un diplôme national d'internat en clinique des animaux de compagnie (des équidés ou des ruminants, le cas échéant), dont les confrères peuvent se prévaloir sur leur plaque ou leurs ordonnances. Ils sont de fait encadrés par les enseignants chercheurs des établissements et bénéficient de l'infrastructure des services cliniques de l'école. Les élèves apprécient la présence d'une bibliothèque, de spécialistes dans tous les domaines et leur rôle d'encadrement des élèves, ce que n'offrent pas (ou peu) les structures privées.

Mais, en tant qu'étudiants, les internes ne sont pas rémunérés. Comme leurs alter ego non diplômés, ils doivent même s'acquitter des droits de scolarité (950 € environ). Seule l'école de Toulouse est concernée, puisque les trois autres exonèrent les internes de ces frais. En outre, cette formation officielle est relativement jeune (voir article en page 29).

La motivation des étudiants pour entrer dans une structure publique ou privée est à peu près la même. « En sortant de l'école, nous n'avons pas assez de recul pour assurer les consultations comme la clientèle les entend, explique une étudiante d'Alfort en T1 Pro. Une année de formation d'interne me permettra d'acquérir cette expérience et de comprendre toutes les étapes de la démarche diagnostique. » « Pour être clinicienne », elle a donc déposé simultanément sa candidature dans les écoles françaises, à la faculté de médecine vétérinaire de Saint-Hyacinthe (Québec) et à Frégis. Et elle n'est pas la seule dans ce cas.

Découvrir une école et une culture différentes, une autre façon de travailler

Il existe pour les diplômés une troisième possibilité : celle de partir réaliser un internat à l'étranger. Les facultés anglaises et nord-américaines sont les plus reconnues pour la qualité de leur enseignement clinique. « Sur vingt-cinq places, nous recevons environ huit à dix Français », explique André Vrins, vice-doyen à la formation professionnelle de la faculté vétérinaire de Montréal. Côté financier, un étudiant français doit débourser 3 100 $, mais est rémunéré 15 000 $ : « C'est donnant-donnant pour l'institution. L'interne donne du temps pour les gardes, le service clinique et l'enseignement aux étudiants. D'un autre côté, il reçoit une formation. » Les expatriés apprécient, outre la qualité des internats, la possibilité de découvrir une école, une culture et une façon de travailler différentes.

Il reste à savoir ce que deviennent les ex-internes. « L'internat est comme une plaque tournante, ajoute André Vrins. L'interne peut ensuite se diriger vers la pratique privée ou la spécialisation. » Dans ce dernier cas, le résidanat est la voie de choix pour obtenir le diplôme d'un collège européen.

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