Le génome du mammouth laineux est proche de celui de l'éléphant, selon deux études

Deux récentes études ont permis de reconstituer en grande partie le génome du mammouth laineux (Mammuthus primigenius). Chacune d'elles a fait appel à une nouvelle technique de traitement de l'ADN d'espèces fossiles, ce qui ouvre de grandes perspectives pour les travaux de génétique moléculaire qui suivront. La première équipe a séquencé 13 millions de paires de bases d'ADN, à la fois mitochondrial et nucléaire, d'un mammouth sibérien daté de 27 000 ans⁽¹⁾. L'utilisation de l'ADN du noyau est importante, car jusqu'à présent (en raison surtout de problèmes de contamination), seul l'ADN mitochondrial pouvait offrir des garanties suffisantes de fiabilité. Mais l'ADN nucléaire est bien plus riche en informations. Les deux ADN ont donc été retenus, mais la technique de traitement était originale : au lieu de l'insérer dans des bactéries pour le multiplier puis le séquencer, les chercheurs l'ont fractionné en petites unités, puis séquencé. Les résultats montrent une identité à 98,55 % entre le mammouth laineux et l'éléphant d'Afrique, confirmant une divergence, estimée par la paléontologie, de 5 à 6 millions d'années.

La seconde équipe a produit un constat divergent : pour elle, le mammouth laineux était plus proche de l'éléphant d'Asie, à 97 %⁽²⁾. La divergence entre ces deux espèces se serait produite 440 000 ans après leur séparation de l'éléphant d'Afrique. Comme cette période de 440 000 ans est courte, les auteurs suggèrent l'existence d'un ancêtre commun, après la séparation de l'éléphant d'Afrique. La technique utilisée a été d'amplifier 17 000 paires de bases, avec une nouvelle approche consistant à traiter simultanément des séquences multiples. Le génome mitochondrial entier a pu être reconstitué.

La première équipe a aussi retrouvé des séquences de nombreux champignons, virus, bactéries et micro-organismes du sol, qui doivent être examinées pour affiner les connaissances sur l'environnement ancien des mammouths. Cela permettra notamment de répondre à des questions sur le climat de ces époques et sur les causes de l'extinction de beaucoup d'espèces au Quaternaire. La poursuite des travaux de séquençage de l'ADN des mammouths, elle, pourrait donner une image complète du génome nucléaire de ces animaux, et peut-être trancher entre les deux interprétations phylogénétiques proposées à ce jour.

• (1) H. Poinar et coll. : « Metagenomics to paleogenomics : large-scale sequencing of mammoth DNA », Sciencexpress, 20/12/2005.

• (2) J. Krause et coll. : « Multiplex amplification of the mammoth mitochondrial genome and the evolution of elephantidae », Nature doi : 10.1038/nature04432, décembre 2005.