Que pensez-vous de la délégation d’actes ruraux à des auxiliaires ? - La Semaine Vétérinaire n° 1213 du 11/02/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1213 du 11/02/2006

Entre nous

FORUM

Elle est sans intérêt d’un point de vue économique

Eric Février, praticien à Saint-Mamet-la-Salvetat (Cantal).

A priori, il me semble que le projet de déléguer des actes ruraux à des auxiliaires ne servirait qu’à légaliser certaines pratiques courantes, comme le parage des onglons, par exemple. En tant que praticien rural, je me demande ce que cela pourrait nous apporter. D’un point de vue économique, je n’y vois aucun intérêt, ce sont des actes que nous pratiquons et qui nous permettent de vivre. C’est l’occasion, n’étant pas dans l’urgence, d’avoir des discussions avec l’éleveur, notamment sur l’alimentation du troupeau. Le risque est de voir apparaître de grosses structures rurales, de deux ou trois vétérinaires entourés d’auxiliaires, qui réaliseraient un certain nombre d’actes. Cela ne correspond pas à mon idée de l’exercice rural et je souhaiterais que l’on n’oublie pas la base de notre métier : être en contact avec les animaux et les éleveurs. La relation forte qui nous lie devrait être un pilier de notre pratique, et il me semblerait plus judicieux de former les éleveurs et d’améliorer leur niveau technique médical tout en respectant le bien-être des animaux.

Je me demande comment sera appliqué ce texte. Quels contrôles réglementaires existeront afin d’éviter les dérives éventuelles, comme la prescription de médicaments par les auxiliaires ? Enfin, quels sont exactement les actes que l’on prévoit de leur déléguer ?

Le risque est d’être déconnecté du terrain

Alain Macraigne, praticien à Corlay (Côtes-d’Armor).

Exerçant en clientèle mixte à prédominance rurale dans le centre de la Bretagne, je ne vois actuellement aucun intérêt à déléguer des actes ruraux à des auxiliaires vétérinaires. Cela n’apportera rien aux éleveurs qui, pour la plupart, exercent déjà le rôle “d’infirmier” dans leur exploitation, en étroite collaboration avec leur praticien. Les éleveurs de bovins sont de mieux en mieux formés et certains effectuent parfaitement ces actes, comme les parages de pieds. Quant aux éleveurs de porcs, les castrations ou les hernies inguinales des porcelets ne leur posent aucun problème, pas plus que les inséminations artificielles de leurs truies.

En outre, former des auxiliaires vétérinaires n’apportera rien non plus au praticien rural. Au contraire, car souvent c’est en réalisant ces actes de base (parage, fécondité et prise de sang) qu’il découvre des problèmes et peut parler prévention. Ne plus les réaliser conduirait à perdre le contact avec beaucoup d’élevages et à se déconnecter du terrain, du concret. Or, plus le vétérinaire est présent dans l’exploitation, mieux il remplit son rôle “d’ingénieur” de l’élevage et sa fonction d’épidémio-surveillance.

Enfin, déléguer des actes de base à des auxiliaires contribuera à diminuer le nombre de praticiens par cabinet et à augmenter le rythme des gardes et des astreintes, ce qui ne sera certainement pas un encouragement à l’installation de jeunes confrères ruraux, bien au contraire.

Elle n’a pas sa place en rurale

Arnaud Bohy, praticien à Epinac (Saône-et-Loire).

Praticien mixte dans une association en zone charolaise, je suis avec attention l’arrivée du technicien vétérinaire rural. Notre clientèle a beaucoup évolué, et si elle reste traditionnelle, elle s’est aussi professionnalisée et responsabilisée.

Chaque éleveur titulaire d’un BTS qui s’installe aujourd’hui est à la tête de trois cents animaux et atteint un chiffre d’affaires à faire pâlir son vétérinaire… Ce technicien éleveur, nous le côtoyons tous les jours et il me paraît très compétent :

il écorne ses veaux, administre les vaccins de manière professionnelle (nous l’avons formé), identifie et notifie ses bovins. Plutôt que de créer un auxiliaire vétérinaire en productions animales, il faudrait peut-être améliorer la formation de nos jeunes confrères qui dans, beaucoup de domaines pratiques, sont souvent moins aguerris que nos clients.

Se pose donc la question de la place de cet auxiliaire dans notre organisation. Quel travail lui donner ?

Les vaccinations sont faites par les éleveurs, les parages fonctionnels aussi. Quant à l’identification, en vingt-deux ans de pratique professionnelle, je n’en ai jamais fait. Il reste les prises de sang, mais ce secteur n’est pas en extension et comme il engage bien souvent notre mandat sanitaire, il paraît difficile à déléguer. A quel prix seraient facturés tous ces actes, pour pouvoir payer un salaire d’auxiliaire ? La marge d’un parage à 35 € est d’à peine 20 €. Il devra faire 1 500 parages pour ne pas coûter à la structure. C’est un peu trivial, je le concède, mais ce n’est pas complètement faux. Enfin, comment notre ami vétérinaire affairiste (nous en avons tous un dans notre région) utilisera-t-il cet auxiliaire ? Nous verrons fleurir dans nos campagnes des petites camionnettes qui, pour remplacer le colipostage, sous couvert d’une autopsie ou d’une intervention dite technique, viendront livrer les médicaments qui inondent nos clients dans le plus pur respect des bonnes pratiques. Je pense que ces auxiliaires n’ont pas leur place dans nos clientèles traditionnelles, sauf peut-être pour aller aux réunions sur la grippe aviaire que notre cher directeur des services vétérinaires nous impose à 20 h et à 100 km entre deux nuits de garde.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr