Les profils biochimiques permettent d’évaluer le statut nutritionnel des vaches laitières

Les profils ou bilans biochimiques sont réalisés via la mesure dans le sang, le lait ou l’urine des vaches laitières, apparemment en bonne santé, de certains paramètres reflets de la valeur de la ration, et surtout de ses carences.

L’interprétation des résultats exige beaucoup de précautions, en raison des interactions complexes entre les différents mécanismes métaboliques et du manque global de sensibilité des méthodes utilisées. Les profils biochimiques ne devraient donc intervenir qu’en compléments d’autres moyens, comme l’analyse de la ration et celle de la conduite d’élevage dans son intégralité. Il convient de vérifier également que la ration calculée est bien celle qui est effectivement consommée par la vache.

Les prélèvements sont à effectuer chez cinq animaux au minimum

L’interprétation des paramètres biochimiques repose sur une comparaison avec les valeurs de référence. La normalité ou non d’un paramètre dépend donc de la technique d’analyse, de la population choisie comme référence et d’un seuil fixé d’interprétation. Dans le cas des vaches laitières, pour obtenir des résultats interprétables, l’idéal est de réaliser les prélèvements chez des animaux au même stade physiologique de reproduction ou de lactation. Le nombre d’individus à tester est de sept à dix par groupe, avec un minimum de cinq. Par exemple, les vaches laitières peuvent être divisées en trois lots : à soixante-dix jours de lactation, à cent cinquante jours de lactation, et au moment du tarissement. Idéalement, le prélèvement est réalisé à partir de la cinquième semaine post-partum. Mieux vaut éviter le premier mois de lactation, où les fluctuations sont les plus importantes. Plus précisément, le prélèvement doit avoir lieu en milieu de journée ou quatre heures après le repas, pour éviter les variations diurnes. Les animaux testés doivent appartenir à la même catégorie (génisses/multipares) et être soumis aux mêmes conditions de contention et de prélèvement (site identique).

Le β-HB est corrélé négativement au bilan énergétique en début de lactation

Dans les conditions expérimentales, en début de lactation, les apports en unité fourragère lait (UFL) sont directement corrélés de façon positive avec la glycémie. Après la sixième semaine post-partum, la liaison est plus difficile à établir. La valeur de la glycémie est totalement indépendante de la production lactée.

Avec les acides gras non estérifiés (AGNE), la corrélation négative avec le bilan énergétique est nettement marquée. Mais la teneur en AGNE est sensible au stress.

Les corps cétoniques sanguins, tels que le β-hydroxybutyrate (β-HB) et l’acétoacétate, sont souvent utilisés pour évaluer les déficits énergétiques et donc l’acétose subclinique. L’acéto-acétate est plus difficile à employer, car il est instable. En revanche, il n’a pas d’origine alimentaire directe et est peu sujet aux variations diurnales. La concentration en β-HB tend à augmenter avec une alimentation riche en précurseur de C₄ (de type betterave). En début de lactation, le β-HB est corrélé négativement bilan énergétique. Si la corrélation entre les corps cétoniques et le bilan énergétique est bonne pour les vaches laitières hautes productrices, elle l’est un peu moins pour les faibles productrices.

La concentration des corps cétoniques dans le lait est liée de façon positive à leur concentration sanguine. Les tests semi-quantitatifs au nitroprussiate de sodium sont très sensibles pour l’acétoacétate, un peu moins pour l’acétone et pas du tout pour le β-HB (peu présents dans le lait).

La concentration des corps cétoniques dans l’urine est quatre fois plus élevée que dans le sang, mais elle dépend fortement du volume d’urine produit.

Les paramètres urinaires sont parfois utiles pour évaluer les apports en macro-éléments

Un bon indicateur des apports en magnésium est fourni par son taux. C’est le macro-élément le plus intéressant à doser dans un troupeau de vaches laitières. La teneur en phosphore n’est modifiée que lors de variations marquées des apports nutritionnels. La calcémie est moins dépendante des apports en calcium qu’en magnésium, en liaison avec le rôle de ce dernier sur les récepteurs rénaux de parathormone. La concentration sanguine en sodium est peu représentative des carences, beaucoup mieux évaluées via le dosage des concentrations urinaires ou salivaires. Les apports en oligo-éléments sont généralement évalués par le dosage sanguin. Les résultats sont significativement corrélés au statut nutritionnel. Toutefois, leur interprétation doit prendre en compte la quantité apportée, la durée de la distribution et les possibilités de stockage hépatique. En général, trois stades sont distingués lors de carences en oligo-éléments : le déficit marginal, le déficit marqué et le déficit sévère avec dysfonctionnement. Les méthodes enzymatiques (glutathion peroxydase pour le sélénium, par exemple) sont plus précises en termes de durée de carence que les concentrations plasmatiques, hormis pour l’iode inorganique plasmatique qui est le marqueur du statut iodé réel.

L’urée du sang ou du lait est un bon reflet des apports azotés alimentaires

L’hémoglobine, l’albumine et les protéines totales, bien que directement liées aux apports alimentaires en matières azotées totales, sont des indicateurs peu sensibles dont la réponse est différée.

En revanche, l’urée du sang ou du lait est un bon reflet des apports azotés alimentaires. La connaissance de la concentration en urée permet d’évaluer aussi bien les carences que les excès en matières azotées (ou une mauvaise utilisation des apports azotés). Le dosage de l’urée dans le lait est le plus facile et le plus fiable, à condition que le prélèvement soit stérile (risque de destruction par les uréases bactériennes). Le dosage dans le lait de tank, qui dilue les variations diurnales en regroupant les traites du matin et du soir, est possible si le nombre de vaches en début de lactation est réduit.

En résumé, une glycémie élevée et un taux d’urée normal signent une éventuelle acidose ; une glycémie et un taux d’urée normaux un équilibre ; une glycémie normale et un taux d’urée élevé un excès d’azote dégradable ou de protéines. En outre, une glycémie et un taux d’urée bas marquent une sous-nutrition.

• (1) Voir aussi La Semaine Vétérinaire n° 1210 du 21/1/2006, pp. 36-37.

BIBLIOGRAPHIE

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• • F. Schelcher, J.-F. Valarcher et coll. : « Profils biochimiques : intérêts et limites », Le Point Vétérinaire, 1995, vol. 27, numéro spécial « Maladies métaboliques des ruminants », pp. 705-711.