Le recours aux sanctions est parfois inefficace dans la gestion de la propreté canine - La Semaine Vétérinaire n° 1210 du 21/01/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1210 du 21/01/2006

Citoyenneté. Intégration du chien dans la ville

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

D’après une enquête, 69,2 % des villes qui ont adopté la verbalisation ne l’appliquent pas ou peinent à le faire.

Près de 70 % des villes pratiquent le ramassage individuel [des déjections canines], estime Jean-Michel Michaux. Les résultats sont plutôt positifs si la mise à disposition de sacs est appuyée par une démarche de communication (affichage, cours d’éducation canine, etc.). » Notre confrère, enseignant à l’école d’Alfort, s’exprimait dans le cadre de la journée d’étude de l’Institut scientifique et technique de l’animal en ville (Istav) sur le thème de la propreté canine, organisée à Maisons-Alfort le 12 janvier dernier. Les différents intervenants, dont nos confrères Monique Bourdin (comportementaliste à l’école d’Alfort) et Jean-Marie Giffroy (université de Namur, Belgique), ont permis d’aborder cette problématique sous des angles variés (comportemental, juridique et pratique) et de confronter les expériences de terrain de plusieurs municipalités.

Selon le droit, la sanction lors de déjection ne devrait pas dépasser 38 €

« Selon une enquête de l’Istav, 40,6 % des villes ont adopté un arrêté municipal de verbalisation à l’encontre des propriétaires contrevenants, mais 38,4 % d’entre elles ne l’appliquent pas et 30,8 % ont des difficultés à le faire », a en outre rappelé Jean-Michel Michaux.

Par ailleurs, le niveau de l’amende peut varier d’une municipalité à l’autre. « A Draguignan (Var), elle peut atteindre jusqu’à 3 000 € lors de récidive ! », a ainsi cité en exemple Thibaut Lanchais, juriste et titulaire d’un DEA de droit de l’environnement. Les sommes sont donc parfois abusives, mais liées au fait que peu de personnes osent porter un recours devant la justice. Pourtant, l’application du droit ne permet pas d’atteindre de tels montants.

Michèle-Laure Rassat, juge de proximité au tribunal de police de Paris et professeur de droit émérite, a expliqué le cadre réglementaire dans lequel sont établies les sanctions. Selon le droit administratif, une collectivité publique a le loisir de facturer ses interventions (sauf certains services qui doivent être gratuits). En principe, elle fixe donc librement ses tarifs, sous deux réserves : le respect du niveau de l’infraction (une proportionnalité est nécessaire) et l’interdiction de faire des bénéfices. Le droit pénal, lui, vise à punir une personne dont le comportement n’est pas conforme à la société. Il s’intéresse aux crimes et délits, qui ne peuvent résulter que de la loi. « En matière de contravention, les choses sont compliquées par l’existence d’une dissociation entre la sanction et l’incrimination », a poursuivi Michèle-Laure Rassat. La sanction procède de la loi, qui en définit cinq niveaux. En revanche, l’incrimination dépend des règlements, qui peuvent être nationaux, mais également locaux ou municipaux. Dans les deux derniers cas, l’incrimination est libre. Ainsi, elle peut varier d’une préfecture à l’autre ou d’une municipalité à l’autre. En revanche, si le maire peut librement incriminer, il ne peut prévoir une sanction plus élevée que celle de première classe, qui s’élève à 38 €.

L’ensemble de ces éléments complique parfois la situation sur le terrain, comme le montre l’exemple de Paris. Il y existe en effet une superposition entre un arrêté pris par le maire en 2002 et un règlement sanitaire départemental de 1992. Ce dernier interdit les déjections canines sur les trottoirs (que le maître ramasse ou non), mais les autorise dans un espace canin réservé à cet effet et dans les caniveaux (le non-respect s’accompagne d’une contravention de 3e classe). Pour sa part, l’arrêté stipule que le ramassage est nécessaire partout. Le “mélange” de ces deux dispositions donne naissance à un casse-tête : un excrément non ramassé dans le caniveau engendre une amende de 1re classe, une déjection ramassée sur le trottoir conduit à une amende de 3e classe, une déjection non ramassée sur le trottoir aboutit au cumul de deux amendes (1re et 3e classes), et un excrément ramassé dans le caniveau n’engendre aucune sanction. Et cela sans compter la définition du caniveau, dont certains intervenants ont rappelé la difficulté dans certains cas, et les conséquences éventuelles sur l’environnement.

La pénalisation soulève des écueils et des injustices

Plusieurs autres limites du système sont pointées du doigt. Ainsi, Michèle-Laure Rassat s’est étonnée de ne voir passer en jugement que les propriétaires âgés de caniche ou de yorkshire et aucun maître de rottweiller ou d’amstaff. « Il est plus facile de verbaliser une personne âgée plutôt que des jeunes dont l’attitude est menaçante », a en effet reconnu un inspecteur de salubrité. Cette remarque a suscité de vives réactions dans l’assemblée, qui s’est élevée contre une telle conséquence peu démocratique ! Notre consœur Geneviève Perrin-Gaillard, députée PS chargée du groupe d’étude sur les animaux au Parlement, a “rebondi” en affirmant son opposition à la pénalisation, qu’elle juge « injuste ». « Pour satisfaire quelques-uns, des personnes qui n’ont pas la capacité physique de ramasser sont parfois pénalisées. En outre, les collectivités qui procèdent ainsi obtiennent-elles des résultats ? », s’est-elle interrogée.

Comme l’a souligné Jean-Luc Vuillemenot, secrétaire général de l’Association française d’information et de recherches sur l’animal de compagnie (Afirac), « il faut essayer de travailler sur le comportement des usagers ». Pour cela, il envisage plusieurs outils : un dispositif pour accroître la responsabilité de chacun et des usagers, la mise en œuvre d’une stratégie permettant de récompenser les comportements respectueux (« la pédagogie d’encouragement paye en général beaucoup plus à long terme »). Il propose aussi l’implication réelle de chaque intervenant et conseille d’éviter les équipements sanitaires “alibis” : « Il convient de veiller à leur conception et de les placer dans des lieux fréquentés pour qu’ils soient utilisés. » Quoi qu’il en soit, ils ne se suffisent pas à eux-mêmes. Une volonté politique doit aussi s’exprimer.

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