Selon vous, l’adhésion à un syndicat professionnel est-elle utile ?

Je ne vois pas leur action au quotidien

Je ne trouve pas utile d’être syndiquée pour le moment. J’ai une image négative des syndicats en général et j’estime que leur action n’est pas constructive. En tout cas, je ne m’y reconnais pas, car je ne perçois pas leur action au jour le jour. J’ai pourtant envie d’avoir l’impression que cela sert à quelque chose dans mon quotidien.

Cependant, je suis pour le lobbying. Je pense qu’il est important de défendre notre profession. L’exemple de la TVA est flagrant. Contrairement aux médecins, nous y sommes assujettis. Les syndicats sont passés à côté de ce sujet. Je ne leur suis pas absolument opposée, mais j’ai l’impression qu’il s’agit d’un gros mammouth immobile, comme l’administration.

Une alternative à la pensée unique

Il est utile d’être syndiqué. Ce constat est particulièrement vrai pour ceux qui appartiennent à une petite sous-division de notre microcosme vétérinaire. Je fais en effet partie du Syndicat national des vétérinaires salariés d’entreprise, dont j’assure actuellement la présidence. Parmi ses missions, ce syndicat promeut les diplômés de l’enseignement vétérinaire en dehors de l’exercice libéral classique (ce qui est nécessaire pour une minorité). Il défend les intérêts personnels, mais aussi collectifs de ses membres, car il offre une alternative à la pensée unique, dont notre profession, réglementée, est particulièrement imprégnée.

Le vétérinaire d’entreprise n’a pas forcément le même mode de pensée que le praticien libéral. L’un “tourne” essentiellement autour de son activité propre, l’autre s’intègre plus largement à son environnement. Cela change considérablement la façon de percevoir les problèmes et de les résoudre. Il est important de le faire savoir à nos organismes de tutelle.

Les vétérinaires viennent chercher solidarité et confraternité au syndicat, lieu de discussion et de réflexion stratégique résolument tourné vers l’avenir. Il a également comme utilité de promouvoir le vétérinaire au sein des autres diplômés de l’enseignement supérieur, de faire reconnaître qu’il est intéressant d’intégrer dans une entreprise quelqu’un qui est passé par une école vétérinaire. Pour ma part, je travaille dans une firme d’alimentation animale. L’ancien directeur technique, agronome, ne songeait pas à employer des vétérinaires. Maintenant, c’est différent : la direction en emploie, et pas seulement pour des missions exclusivement liées à la santé animale.

Pour un syndicalisme de proposition

A ma sortie de l’école de Nantes, en 1994, j’aurais répondu : « Se syndiquer ne sert à rien et ne changera rien de toute façon. » Aujourd’hui, je pense que c’est utile, mais pas à tout prix, uniquement si l’on se sent en accord avec un projet syndical.

Je me suis syndiqué à la suite de la crise liée au mandat sanitaire, car je me suis vraiment retrouvé dans les propositions du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL). J’envisage le syndicalisme de manière active et participative. Il convient d’être prêt à se poser des questions sur sa manière de travailler et sur ce qui est proposé, de faire preuve d’un esprit critique (dans les deux sens), de pouvoir dire : « Ce que vous nous proposez est contraire à notre éthique professionnelle et/ou personnelle. »

En pratique canine, les confrères semblent moins concernés, car leur opposition au pouvoir central dans leur exercice quotidien est plus faible. La tension est plus sensible face au pouvoir fiscal (les calculs de la taxe professionnelle et de l’assiette de l’Urssaf sont deux exemples).

En rurale, l’action syndicale intervient directement sur notre façon de travailler chaque jour. De la délivrance du médicament aux différentes crises sanitaires en passant par la prophylaxie, les vétérinaires attendent toujours d’être rémunérés pour leur veille sanitaire.

La France a une culture de syndicalisme combattant, à l’image de ce qui peut se passer à la SNCF. L’arrivée de la nouvelle équipe au SNVEL a été une révolution pour notre profession : elle propose un syndicalisme raisonné, à l’allemande. Elle a compris que les vétérinaires peuvent dignement défendre leur droit d’agir, leur droit de refuser, et qu’ils ne sont pas corvéables à merci, sans pour autant tomber dans la facilité de la démagogie. Ses propositions reflètent souvent des réflexions entendues sur le terrain depuis de nombreuses années.

Des dizaines de sujets pourraient être abordés.

Concernant le calcul des charges sociales, les vétérinaires sont fortement pénalisés comparativement aux médecins. Nous sommes les dindons de la farce ! Côté social, nous ne sommes même pas couverts pour les accidents du travail, même lorsque nous agissons au nom de l’Etat.

Il est important de garder une certaine éthique et de continuer à pouvoir se regarder dans un miroir sans rougir. Nous devons conserver ce syndicalisme de proposition et non d’opposition. Gagner un combat immédiat sans penser au long terme n’est pas une solution. Il faut agir pour aujourd’hui et pour demain.