Le questionnaire sur la continuité de soins donnera lieu à un livre blanc

L’année 2005 restera celle de la première grande enquête nationale sur la permanence et la continuité de soins menée auprès des praticiens. Ce projet a été initié par l’association Vétos-Entraide, qui œuvre notamment pour prévenir le stress et le risque de détresse économique chez les vétérinaires. Cette démarche fait suite à plusieurs questions récurrentes : « La continuité de soins : une incongruité sociétale ? », « comment gérer un travail 24 h/24 dans la société des 35 heures ? », « quel regard portent nos clients sur la qualité de travail d’un professionnel qui ne peut pas se reposer ? » Un questionnaire, élaboré avec l’aide de professionnels et entièrement financé par l’association, a été envoyé mi-octobre dernier aux 5 700 structures françaises, via les centrales d’achats qui ont accepté de le router gracieusement.

Tous les praticiens, quel que soit leur profil (seul, en association ou salarié), ont été encouragés à répondre, de façon à garantir la représentativité de cette enquête. Le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) et l’Ordre ont par ailleurs été informés en primeur de cette démarche, Vétos-Entraide estimant que ces instances sont complémentaires sur ce dossier majeur. Ce sont elles qui devront permettre la mise en œuvre des idées qui en découleront.

Le but du questionnaire est triple :

- quantifier le stress provoqué par la continuité de soins et son incidence sur la qualité de vie ;

- comprendre les enjeux de la continuité de soins cette année en France ;

- dresser un état des lieux des solutions possibles et aider à leur mise en place.

En effet, la continuité de soins, qui constitue une obligation déontologique, est fortement anxiogène pour nombre de vétérinaires. La surcharge de travail inhérente, au détriment du temps alloué à la vie privée, est d’autant plus mal ressentie qu’elle ne s’accompagne pas d’une contrepartie financière motivante. Toutefois, Vétos-Entraide considère que les gardes doivent être assurées par les vétérinaires, dans l’intérêt des animaux, de leurs maîtres et de la profession. Mais, pour préserver l’équilibre de vie de chacun, elles doivent être réalisées collectivement. Ce dossier vise donc à réinitier le réseau vétérinaire pour favoriser le développement d’initiatives locales.

L’analyse des questionnaires reçus témoigne d’un fort besoin de s’exprimer

A ce jour, plus de 1 200 réponses ont été reçues, soit « un taux de retour particulièrement encourageant et représentatif, même si une part des répondants sont des vétérinaires sensibilisés à l’action de Vétos-Entraide, ce qui constitue donc un prisme », souligne notre confrère Vincent Dattée, président de l’association. 700 questionnaires ont déjà été analysés, grâce au soutien de la société de traitement statistique DBM, gérée par notre confrère Yannick Poubanne.

Selon ce dernier, « le nombre de réponses obtenues constitue un taux rarement atteint dans le domaine vétérinaire. Vétos-Entraide dispose ainsi d’une bonne source de données, notamment sur le rythme de travail et les revenus des vétérinaires, même si ce n’est pas l’objectif premier de ce questionnaire, qui a été conçu autour de l’hypothèse selon laquelle la continuité de soins est responsable de stress professionnel ».

En outre, « les deux questions qui permettent aux praticiens d’émettre des commentaires en ont suscité un grand nombre, pas toujours en rapport avec le sujet étudié, signe d’un important besoin de s’exprimer. Souvent, les notions de solitude, d’usure, de détresse, de dépression, d’alcoolisme et même de suicide sont évoquées », souligne notre consœur Carine Fondu, chargée de la saisie des réponses. « Des revenus dérisoires par rapport à la qualité des prestations, à la disponibilité et au sacrifice de la vie personnelle, la tyrannie de la clientèle, le manque de compréhension, de soutien et d’engagement des instances, la difficulté de quantifier son travail en nombre d’heures travaillées » sont autant de commentaires exprimés spontanément par les confrères et les consœurs répondants. Ils soulignent également la difficulté d’être perçu comme un riche notable, la non-rentabilité des gardes, l’inconfort des mixtes et des ruraux pour lesquels il existe peu de solutions applicables, notamment dans les régions où l’activité se raréfie, ou encore la contrainte d’assurer les gardes à certains moments de la vie (grossesse, parent seul avec des enfants en bas âge, maladie d’un proche, etc.).

Pour Vincent Dattée, « le taux de réponses aux questions ouvertes traduit aussi le besoin des confrères d’être écoutés, leur envie de parler de leurs conditions d’exercice et le fait qu’ils estiment que l’association Vétos-Entraide est à même de recevoir ces sentiments ».

Au printemps prochain, les résultats seront accessibles à toute la profession, notamment via le site Internet de l’association (http://www.vetos-entraide.com). Cette enquête constituera la base de réalisation d’un livre blanc sur la continuité de soins vétérinaires en France, prévu pour la fin du premier semestre. En abordant de multiples aspects professionnels, financiers, déontologiques, psychologiques et sociaux, cet ouvrage sera une source de réflexion et proposera aux instances des solutions pour les praticiens.

• Le questionnaire est disponible sur le site http://vetos.entraide.free.fr/www/index.php ?art=123 (renseignements au 06 63 29 14 03).