Les bonnes pratiques de l’antibiothérapie sont intégrées dans une approche HACCP - La Semaine Vétérinaire n° 1202 du 19/11/2005
La Semaine Vétérinaire n° 1202 du 19/11/2005

Thérapeutique porcine au Québec

Formation continue

FILIÈRES

Auteur(s) : Catherine Bertin-Cavarait

Prévention des risques via la conduite d’élevage et prescription de traitements autres que les antimicrobiens sont les deux premiers points qui entrent en jeu dans ce raisonnement.

Le Québec, qui exporte plus de la moitié de sa production porcine et souhaite garantir une meilleure salubrité de la viande de porc, a fortement incité la mise en place de la méthode HACCP(1) au sein des élevages producteurs. Elle est appliquée depuis huit ans.

L’HACCP a pour objectif la prévention et la maîtrise des risques dans trois secteurs critiques : physique, bactériologique et chimique. Il s’agit respectivement de garantir l’absence d’aiguille dans les jambons, l’absence de salmonelles et l’absence de résidus d’antibiotiques dans la viande.

Pour répondre à cette demande de sécurité, l’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) a élaboré un guide sur l’administration judicieuse des antibiotiques, destiné aux praticiens. Notre consœur québécoise Brigitte Boucher l’a présenté aux adhérents de l’Association des vétérinaires salariés de l’Ouest (AVSO), de l’Association française de médecine vétérinaire porcine (AFMVP) et de la section “porcs” de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), réunis le 9 juin dernier à Plérin (Côtes-d’Armor) lors d’une journée organisée en partenariat avec Schering Plough Vétérinaire.

Quatre points guident la prescription avisée d’une antibiothérapie

Les praticiens de l’ACMV ont sélectionné et hiérarchisé quatre points principaux.

En premier lieu, les vétérinaires « devraient » concentrer leurs efforts pour aider leurs clients à définir des programmes de gestion, de soins de santé, d’hébergement, d’alimentation et de sélection génétique qui réduisent l’incidence des maladies et le besoin d’administrer des anti­microbiens.

Par ailleurs, les praticiens « devraient » prescrire d’autres méthodes de traitement en remplacement de l’antibiothérapie, si elles sont indiquées ou validées sur le plan médical et scientifique. Lorsque les éleveurs utilisent du zinc, du cuivre et du sélénium dans l’alimentation, ils doivent signer une “décharge”.

En outre, les confrères « devraient » prescrire et distribuer des antibiotiques uniquement dans le cadre d’une relation bien établie entre le vétérinaire, le client et le cheptel soigné. Il est recommandé aux praticiens de réaliser au minimum deux visites d’élevage par an. Au Canada, dans 90 % des exploitations, un seul vétérinaire intervient. Par ailleurs, ils réfèrent de nombreux cas.

Le quatrième point concerne la nécessité de choisir et d’administrer les antibiotiques avec soin, selon cinq principes :

- faire appel aux données et aux règles pharmacologiques les plus récentes ;

- restreindre l’administration aux cas qui le nécessitent (animaux malades) ;

- éviter la chronicité des traitements ;

- viser le plus petit nombre d’animaux traités, à risque uniquement (limiter l’antibiothérapie de groupe), en ne choisissant un antimicrobien disponible que lorsque cela est strictement nécessaire. Il convient de tenir un registre exact de l’efficacité des traitements. « Cela n’est pas simple », atteste Brigitte Boucher ;

- collaborer avec le personnel responsable des soins.

Brigitte Boucher a pondéré ses propos en abordant la réalité sur le terrain : « Si les praticiens sont sensibles à toutes les facettes de la prescription des antibiotiques, tous les éleveurs n’ont pas compris ce raisonnement. » Elle a pointé du doigt la discordance des objectifs entre les deux parties au moment où les conseils en matière de prévention prennent le pas sur la prescription d’antibiotiques. L’exploitant souhaite l’arrêt des mortalités et des signes cliniques, l’instauration d’une antibiothérapie via l’aliment efficace et l’absence d’une double vaccination des porcelets, en raison de la charge de travail. Le praticien entend soigner efficacement les porcs, limiter la virémie aux bandes déjà affectées et travailler sur la prévention. La mise en œuvre d’une modification des pratiques de travail est en effet particulièrement complexe.

Prise en compte des contraintes économiques, organisationnelles et scientifiques

L’application du guide nécessite des analyses et des outils diagnostiques efficaces. Au Canada, le gouvernement se retire progressivement des services diagnostiques, en accordant moins de subventions, d’où une contrainte économique supplémentaire à prendre en compte parallèlement à l’exigence de la gestion rationnelle des traitements antibiotiques.

Selon son mode d’exercice, libéral ou salarié, le vétérinaire québécois n’assure pas la même charge de travail. En effet, le ratio d’animaux par praticien est différent. Il est moins élevé pour les libéraux que pour les salariés de coopératives ou d’intégrateurs. Le modèle nord-américain s’applique chez ces derniers, soit un vétérinaire pour quarante mille truies. Néanmoins, les sommes allouées, plus importantes pour les grandes structures, offrent davantage de possibilités d’investigations.

Les choix des traitements sont modulés par les connaissances scientifiques, l’expérience, l’efficacité obtenue, leur coût et leur rentabilité, la complémentarité des interventions médicales avec la conduite d’élevage, la mise en œuvre des préventions et le contrôle de la transmission des maladies.

Sensibiliser les éleveurs à l’emploi excessif des antimicrobiens

Brigitte Boucher s’est appuyée sur un exemple pour présenter l’application du guide. Chez un engraisseur, des mortalités subites sont enregistrées. Un faible taux d’animaux dépérit. Les premières questions posées par le vétérinaire concernent le traitement de première intention réalisé par les éleveurs (au Québec, ces derniers administrent habituellement des triméthoprimes sulfamides).

La visite de l’exploitation et une discussion avec l’exploitant constituent le deuxième temps de l’intervention. Les porcs ont un poil abîmé, sont amorphes, fiévreux, toussent et présentent des écoulements nasaux mucoïdes. L’élevage est positif vis-à-vis du syndrome dysgénésique respiratoire porcin (SDRP), et une vaccination contre le mycoplasme y est pratiquée. Des méningites et des problèmes locomoteurs sont régulièrement enregistrés. Le premier cas de mort subite s’est produit dix jours avant la visite du praticien.

Compte tenu de ces commémoratifs, l’approche diagnostique s’oriente vers une infection par un virus grippal, avec une probable coinfection par Streptococcus suis ou Haemophilus parasuis. Des écouvillons nasaux sont alors prélevés, dix prises de sang sont réalisées chez des porcs qui présentent de la toux et deux autopsies sont effectuées (elles concernent un animal mort subitement et un autre souffrant d’un début de méningite). Le praticien met alors en œuvre un traitement en plusieurs phases, intégrant les quatre points clés du guide (voir tableau).

Brigitte Boucher insiste sur l’importance de sensibiliser les producteurs à l’emploi excessif des antimicrobiens. Selon elle, « le producteur a le devoir de s’interroger sur ce qui a rendu les produits médicamenteux nécessaires ». L’enjeu est la réduction de l’apparition des antibio­résistances via la maîtrise de l’administration des antibiotiques. Depuis 2002, le programme intégré canadien de surveillance de la résistance aux antimicrobiens (Picra) a pour objectif la surveillance de l’emploi des antimicrobiens et de l’antibiorésistance dans le pays.

  • (1) Hazard analysis and critical control point (analyse des risques et maîtrise des points critiques).

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