Le chien est un modèle spontané d’étude de maladies humaines complexes

Deux séances exceptionnelles consacrées à la génétique animale sont organisées ce mois-ci par l’Académie vétérinaire de France. La première a eu lieu le 6 octobre dernier, à l’Institut Pasteur de Paris⁽¹⁾.

Catherine André (N 84, CNRS, faculté de médecine de Rennes) a développé les apports de l’étude de la génétique canine pour les médecines humaine et vétérinaire⁽²⁾. Selon notre consœur, le chien représente un modèle particulièrement intéressant pour de multiples raisons. Parmi elles figurent l’existence de quelque trois cent cinquante races dans cette espèce, ce qui représente « une énorme diversité phénotypique et comportementale, associée à une prédisposition aux maladies génétiques ». Contrairement à l’homme, chaque race canine constitue un isolat génétique. Les pratiques d’élevage permettent en outre des croisements dirigés. Par ailleurs, le chien est une espèce bien connue sur le plan médical, qui souffre de maladies spontanées similaires à celles observées chez l’homme. « Quand on cherche à étudier une maladie, il est toujours possible de la trouver chez le chien », précise Catherine André. En outre, « il s’agit de la seule espèce chez laquelle les affections liées au vieillissement sont connues », souligne notre consœur.

Une banque d’ADN canin est en cours d’élaboration

Le séquençage complet du génome canin, initié il y a une dizaine d’années, a récemment abouti. Le développement d’outils bio-informatiques permet désormais de comparer la position de gènes chez l’homme et le chien, à partir de cartes du génome, pour des maladies précises. Ces travaux requièrent la collaboration de vétérinaires (établissement du diagnostic initial), de clubs de races et d’éleveurs (obtention de pedigrees), et de chercheurs. Des études sont en cours, notamment sur la narcolepsie (recherche de la voie métabolique en cause chez l’homme à partir de la découverte de deux mutations sur un seul gène chez le chien). A l’école d’Alfort, nos confrères Stéphane Blot, Jean-Jacques Panthier et Laurent Tiret étudient la myopathie, à partir de mutations mises en évidence sur des lignées de labradors. L’atrophie progressive de la rétine, associée à une incidence de 5 % chez les cockers anglais, représente un modèle d’étude des gènes impliqués dans la rétinite pigmentaire de l’homme. Enfin, les gènes responsables et ceux qui prédisposent aux cancers sont analysés, notamment avec le sarcome histiocytaire du bouvier bernois.

La constitution d’une banque d’ADN canin est d’ailleurs en cours au CNRS de Rennes, à partir d’échantillons collectés chez des individus de toutes les races.

Les différentes applications de la transgenèse animale ont été présentées par Louis-Marie Houdebine, biologiste. L’addition ou le remplacement de gènes permet notamment de synthétiser plus facilement des molécules (comme l’insuline) qu’en laboratoire. En agronomie, les applications, encore en phase de recherche, sont multiples : résistance aux maladies (par exemple au prion ou aux mammites), production d’hormone de croissance (chez le mouton, le porc et les poissons), de kératine (mouton, pour la laine) ou encore de phytase via les glandes salivaires (pour diminuer le relargage de phosphates par les porcs).

• (1) La seconde séance consacrée à la génétique aura lieu le 20 octobre.

• (2) Deux autres conférences, présentées par nos confrères Jean-Louis Guénet et Denis Milan, ne sont pas développées dans cet article.