Les lions à crinière sombre ont davantage de vigueur

Les lions mâles sont les seuls félins actuels (mais également fossiles) qui arborent une crinière. Deux hypothèses sont traditionnellement avancées pour justifier cet ornement : il serait utile aux mâles pour se défendre contre des rivaux ou il servirait à séduire les femelles. Une biologiste américaine⁽¹⁾ a confirmé que ces deux suppositions sont conjointement valables. Elle a surtout établi que les mâles dotés d’une crinière foncée ont un statut de plus grande dominance.

La taille de la crinière se réduit chez les mâles blessés

La crinière ne jouerait pas le rôle d’un bouclier. En effet, lors d’affrontements chez ces félins (femelles et subadultes inclus), les zones qu’elle couvre ne sont pas plus ciblées que les autres. En revanche, chez les mâles blessés, la taille de la crinière se réduit. Lorsque de “faux lions” (peluches grandeur nature) sont présentés aux mâles, ces derniers s’écartent davantage de ceux qui ont une longue crinière et de ceux dont la crinière est la plus foncée. Entre mâles, une longue crinière et/ou une crinière foncée sont donc perçues comme des signes de vigueur supplémentaire. De leur côté, les femelles s’approchent bien plus des faux mâles à la crinière noire. En outre, la quasi-totalité des observations d’accouplement réalisées dans la zone étudiée (Afrique de l’Est) montrent que les mâles dont la crinière est foncée ont la faveur des lionnes, au détriment des autres.

Ces critères ont une réalité physiologique : des poils longs et foncés expriment chez les animaux concernés un niveau élevé de testostérone, hormone liée à l’agressivité. Il reste que la pigmentation foncée a un coût, puisque cela élève la température corporelle (en favorisant la rétention de chaleur). Les lions à la crinière sombre, avantagés par rapport aux autres, subissent donc aussi un handicap, celui du stress thermique. Cela explique pourquoi les lions des zones fraîches ont généralement des crinières plus fournies et plus sombres que ceux des régions humides et chaudes. Si le réchauffement climatique perdure, les lions d’Afrique de l’Est, dotés d’une crinière longue et sombre, pourraient donc devenir de plus en plus rares.

• (1) P. West : « The Lion’s Mane », American Scientist, mai-juin 2005.