Un cacatoès retrouve l’usage de son bec brisé après la pose d’une armature métallique - La Semaine Vétérinaire n° 1194 du 17/09/2005
La Semaine Vétérinaire n° 1194 du 17/09/2005

Agressivité intraspécifique chez les psittacidés

Formation continue

FAUNE SAUVAGE

Auteur(s) : Norin Chai*, Gérard Dousseau**

A la suite d’un combat avec un congénère mâle, une femelle cacatoès des Moluques (Cacatua moluccensis) a le bec inférieur brisé. Celui-ci est reconstitué par un modelage en résine armée.

Les propriétaires de psittacidés sont souvent confrontés à des comportements agressifs intraspécifiques de leurs spécimens. Ceci est particulièrement vrai chez les cacatoès des Moluques (Cacatua moluccensis). Les femelles peuvent être l’objet de morsures sévères (avec notamment une perte partielle ou totale de leur bec) et de traumatismes divers pouvant même entraîner la mort. Ces problèmes surviennent surtout chez des couples récemment formés (mésentente), mais aussi chez des oiseaux logés dans la même volière depuis longtemps, avec un historique de reproduction réussie. Même si de nombreuses raisons peuvent être suspectées (asynchronisme de l’activité sexuelle, manque d’espace, déséquilibre alimentaire, relations ambiguës avec leurs propriétaires), l’origine de ces agressions chez les cacatoès des Moluques est essentiellement comportementale et propre à l’espèce.

Une anesthésie générale est nécessaire pour apporter les premiers soins

Si la gestion des blessures est souvent générale et non spécifique, le parage d’un bec cassé nécessite des manipulations délicates et précises. Le cas présenté ici est celui d’une femelle née en liberté et élevée à la ménagerie du jardin des Plantes à Paris. Son âge est estimé à vingt-cinq ans. Deux tentatives de la faire cohabiter avec un mâle ont échoué. La troisième (et dernière) s’est soldée par plusieurs blessures et un bec inférieur brisé. Les soigneurs l’ont trouvée isolée dans un coin de la volière en état de choc.

L’examen clinique révèle plusieurs lésions mineures (essentiellement sur la tête). Le traitement instauré consiste à parer et à désinfecter les blessures superficielles. L’animal est hospitalisé dans une enceinte calme et mis sous couveuse à 29 °C. En raison d’une déshydratation d’environ 5 % pour un poids de 650 g, une perfusion intra-osseuse est mise en place vingt-quatre heures, à l’aide de 30 ml de Ringer lactate tiédi. La canule (aiguille verte) intra-osseuse est posée dans l’ulna sous anesthésie flash à l’isoflurane (induction au masque). Cette immobilisation a également permis de parer grossièrement le bec et de retirer les morceaux brisés.

L’enjeu est de redonner au bec brisé suffisamment de solidité

L’état général de l’animal est stabilisé en vingt-quatre heures. A titre d’antalgique, il reçoit également du méloxicam (0,5 mg/kg/24 h par voie intramusculaire durant trois jours) et une antibiothérapie préventive à base d’enrofloxacine (10 mg/kg/24 h par voie intramusculaire pendant cinq jours).

L’animal est de nouveau anesthésié à l’isoflurane. Cette fois-ci, la sonde trachéale est posée directement dans le sac aérien crânial caudal pour faciliter l’intervention sur le bec. Celui-ci est paré avec une meuleuse portable (Dremel), puis correctement désinfecté.

Deux trous sont percés dans le bec pour faire passer un fil de fer longitudinalement. Plusieurs compresses déposées permettent d’assurer la continuité du bec. Elles sont ensuite stabilisées avec de la résine époxy.

Une réintervention consolide le montage avec une double armature métallique

Cette technique a l’avantage de maintienir une certaine solidité au niveau de la zone périphérique du bec inférieur. Le montage ne dure cependant pas plus de cinq jours. En effet, l’animal parvient à se nourrir, mais éprouve une gêne mécanique qui le pousse à se frotter le bec sur la volière. Une deuxième pose de résine est envisagée.

La femelle cacatoès est anesthésiée selon la même technique. Le bec est de nouveau désinfecté et “rénové”. Cette fois, une autre résine est choisie pour élaborer la prothèse. Un second fil de fer est posé parallèlement au premier. La résine est déposée en veillant à bien intégrer les fils. Ensuite, la prothèse est modelée à la forme du bec. L’excédant de résine est meulé ultérieurement, une fois la matière solidifiée.

Le résultat immédiat est satisfaisant. La prothèse est colorée en noir pour des raisons esthétiques. Une semaine après l’intervention, l’animal présente un excellent état général. Son nouveau bec lui permet de retrouver un comportement alimentaire tout à fait normal.

Profil type du cacatoès et captivité

Les cacatoès des Moluques appartiennent à l’ordre des Psittaciformes, à la famille des Cacatuidés (cacatoès) et à la sous-famille des Cacatuinés formée de quatorze espèces. Ils vivent en Australie, en Nouvelle-Zélande et sur les îles du Pacifiques sud. Ils se distinguent des autres Psittaciformes par la présence d’une vésicule biliaire, l’absence de couleur bleue ou verte dans le plumage, un anneau orbital totalement ossifié et des portées duveteuses.

Ces animaux intelligents demandent beaucoup d’attention et “crient” littéralement s’ils se sentent négligés. Ils apprécient particulièrement le contact physique. Leur éducation et leur entraînement sont faciles, même s’ils peuvent être bruyants et destructeurs. En captivité (surtout chez un particulier), leur socialisation est importante. Les agressions intraspécifiques, surtout au sein des couples, sont fréquentes. En volière, le cacatoès des Moluques (Cacatua moluccensis) ou à huppe rouge pond un à trois œufs, incubés de vingt-huit à vingt-neuf jours.

A la ménagerie du jardin des Plantes (Paris), les cacatoès sont nourris deux fois par jour avec des fruits de saison mûrs, des légumes frais (un tiers de la ration) et des granulés pour grands perroquets (deux tiers). Les quantités sont adaptées selon la prise alimentaire. L’eau est changée tous les jours. Des cures de vitamines sont prévues. Deux ou trois os de seiches sont en outre proposés. Des enrichissements, la présence régulière des soigneurs et le flux de visiteurs semblent prévenir l’ennui chez ces oiseaux.

Norin Chai et Gérard Dousseau

Dominantes pathologiques chez les cacatoès

• Automutilation (plumes, peau).

• Problèmes comportementaux.

• Cirrhose hépatique idiopathique.

• Parasitoses (chez des spécimens récemment importés).

• Prolapsus cloacaux idiopathiques.

• Herpès virose se traduisant par des lésions prolifératives des pattes.

• Pododermatites.

• Hypertophie céreuse qui obstrue les narines.

• Abcès oraux.

• Obésité.

• Lipomes.

Source : Avian medicine : principles and applications. Richie, Harrison & Harrison (Eds ), Wingers Publishing, Fort Worth, Florida.

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