L’AUXILIAIRE VÉTÉRINAIRE EN RADIOLOGIE - Ma revue n° 1632 du 01/05/2015 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 1632 du 01/05/2015

Dossier

Auteur(s) : Élodie Goffart

Fonctions : Docteur vétérinaire, praticienne dans l’Essonne

Malgré le développement de nouvelles techniques d’imagerie médicale, la radiologie reste fréquemment pratiquée dans les cabinets et les cliniques vétérinaires. Elle constitue un excellent examen de première intention lors de troubles orthopédiques, respiratoires, cardiaques ou digestifs. Mais des mesures de protection sont indispensables pour les opérateurs.

L’auxiliaire est en première ligne lors des radiographies car il intervient généralement pour la contention de l’animal. Il est important de bien connaître les règles à respecter lors de cet examen, ainsi que la législation qui s’y rapporte, dont l’objectif est d’assurer la sécurité et la santé des personnels exposés aux rayons X. Les particularités de la réalisation de radiographies en dehors du cabinet (en équine en particulier) ne seront pas détaillées ici.

La technologie évolue de l’argentique au numérique

La radiologie consiste à explorer le corps de manière non invasive. Les rayons X sont émis par l’appareil de radiologie. Ils traversent l’animal et viennent imprimer une image sur une plaque radiographique. L’image ainsi obtenue dépend de la densité et de la particularité de chaque tissu traversé (os, tissu mou, air, eau) et donne une vision de l’intérieur du corps de l’animal.

La tendance est à la généralisation des appareils de radiographie numérique dans les cabinets et les cliniques vétérinaires. Ils fournissent des images de très haute qualité, et leur technique libère de la contrainte de posséder un appareil à développer les radiographies. En effet, les liquides utilisés pour le développement sont toxiques, leur élimination est soumise à des règles, l’entretien de cet outil est contraignant et fastidieux, et la qualité des images rendues dépend fortement de celle des bains de développement.

La radiographie tend à perdre de son importance, à la faveur d’autres techniques d’imagerie d’évolution récente (échographie, scanner, résonnance magnétique ou IRM). Elle reste toutefois très intéressante en première intention dans de multiples situations cliniques (encadré page 8) et demeure un examen très couramment pratiqué. Les structures de soins vétérinaires possèdent presque toutes un appareil de radiologie, alors que les autres techniques sont beaucoup moins répandues en raison de leur coût et de la nécessité de se former spécifiquement pour savoir les utiliser.

La contention est une spécificité vétérinaire

Dans les hôpitaux, en médecine humaine, la radiologie est également encore fréquemment pratiquée. La différence avec les animaux est que l’individu radiographié se met seul dans la position demandée par le radiologue, et la maintient le temps nécessaire ! Cela permet au personnel qui réalise l’examen de se placer soit dans une autre salle, soit derrière un paravent protecteur, afin d’éviter de recevoir des rayons indésirables. Ce n’est bien entendu pas le cas avec les animaux de compagnie…

En médecine vétérinaire, la contention du sujet est indispensable à la réalisation de clichés de qualité interprétable. C’est généralement le vétérinaire et un auxiliaire qui tiennent l’animal. Selon la zone à observer (thorax, abdomen, squelette), la position varie.

Lors de l’immobilisation de l’animal, les opérateurs s’assurent de trois points :

• La sécurité de l’animal : il faut veiller à ce qu’il ne puisse pas tomber de la table ou s’enfuir et se cacher dans la salle de radiologie.

• La sécurité physique du personnel : l’animal ne doit pas pouvoir mordre ou griffer. Des muselières radio-transparentes existent, ainsi que des sacs de contention adaptés. Il est également possible de positionner les animaux dans des blocs en mousse afin de limiter la contention nécessaire. Enfin, pour des animaux particulièrement peu coopératifs, une tranquillisation ou une anesthésie flash peuvent se révéler indispensables.

• La sécurité par rapport aux rayonnements ionisants. Toute personne qui réalise une radiographie aux côtés d’un animal doit être pourvue des équipements suivants : tablier en plomb, gants, protège-thyroïde, lunettes de protection. En outre, le port permanent du dosimètre est obligatoire.

Les rayons X sont toxiques

Les rayons X, invisibles à l’œil nu, sont des rayons électromagnétiques dits ionisants, c’est-à-dire qu’ils provoquent l’éjection d’un électron de l’atome qu’ils rencontrent. Cette ionisation entraîne des modifications de la structure et de l’ADN des cellules irradiées, ce qui génère des dégâts cellulaires plus ou moins sévères. En pratique, les effets des rayons X sur les cellules dépendent de leur type : des cellules qui se divisent peu et qui sont très différenciées (les neurones, par exemple) sont peu sensibles aux rayonnements ionisants. En revanche, des cellules à divisions fréquentes et qui sont peu différenciées (cellules du tube digestif, de la moelle osseuse, du fœtus) sont très fragilisées par ces mêmes rayonnements et peuvent même mourir sous leur effet.

Les effets biologiques des rayonnements sur l’organisme entier sont de deux types :

• Déterministes : les effets existent à partir d’un certain seuil. Ils sont prévisibles, proportionnels à la dose reçue et caractéristiques. C’est le cas des brûlures, de la cataracte, des malformations fœtales et de la stérilité provoquées par des irradiations involontaires (accident nucléaire, exposition professionnelle) ou volontaires (traitement des cancers par radiothérapie).

• Aléatoires (dits stochastiques) : ces effets sont non prévisibles, non proportionnels à la dose et de gravité variable. Ce sont les cancers tardifs (8 à 40 ans plus tard) observés dans les régions d’Hiroshima ou de Tchernobyl, chez les personnes traitées par radiothérapie ou chez les salariés exposés aux rayons X ou à la radioactivité.

Lors de la réalisation d’une radiographie, l’exposition des opérateurs aux rayons est externe, directe (l’organisme est irradié par des rayonnements X émis par l’appareil si la personne se trouve dans le faisceau des rayons) et indirecte (par les rayons secondaires émis par l’animal radiographié). La dose reçue par le personnel soignant sur une année complète de travail est calculée en sievert (Sv). Pour la plupart des ASV, elle est inférieure à 6 millisievert (mSv), ce qui est très faible. Par comparaison, la dose reçue est de 0,5 mSv lorsqu’un patient passe une mammographie et de près de 9 mSv lorsqu’il subit un scanner abdominal.

La protection vise à réduire l’exposition aux rayons

Sur le lieu de travail, les mesures de prévention cherchent à minimiser la dose de rayonnement reçue par les personnes. C’est l’objet de la radioprotection. Celle-ci désigne l’ensemble des règles, des procédures et des moyens de prévention et de surveillance visant à empêcher ou à réduire les effets nocifs des rayonnements ionisants sur les personnes et l’environnement.

Lorsque se pose la question de réaliser une radiographie sur un animal, trois points sont considérés.

• La justification : il convient de s’interroger sur le bien-fondé d’un ou de plusieurs clichés. C’est le rôle du vétérinaire de justifier l’utilisation de la radiologie dans le diagnostic, le dépistage ou le suivi d’une pathologie.

• L’optimisation : l’objectif est d’obtenir un bon cliché dès la première prise avec la moindre exposition du personnel soignant et du public. Le bon positionnement de l’animal, une contention adaptée, le choix des constantes et la technique radiographique sont les éléments majeurs qui permettent de limiter le nombre de clichés.

• La limitation : il importe de respecter les limites réglementaires d’exposition, donc de porter obligatoirement et de manière permanente les dosimètres individuels et nominatifs.

L’accès à la salle de radiologie doit être réglementé (encadré page 9).

Pour la réalisation pratique de l’examen, plusieurs critères sont aussi à considérer.

• Le temps. Plus le temps d’exposition est diminué, moins la dose de rayonnements est importante. Il convient donc de tout préparer pour ne pas devoir recommencer et d’essayer de se répartir les clichés entre les différents membres du personnel (il ne faut pas que ce soit toujours le même ASV de la clinique qui réalise les radiographies, sauf dans les structures de référé ou le personnel est spécialisé).

• La distance. Plus la distance aux rayonnements est augmentée, plus la dose reçue diminue. Il importe donc d’écarter les mains le plus possible du faisceau primaire et de tendre les bras afin d’éloigner son corps du rayonnement. Si l’animal est anesthésié (animal peu coopératif ou lors de radiographie post-opératoire, par exemple), une contention rapprochée n’est plus obligatoire et il devient possible de recourir à des aides techniques (lacettes, blocs de mousse) pour maintenir l’animal dans la position désirée en vue de la réalisation du cliché.

• L’écran. Plus l’écran interposé est épais, plus la dose de rayonnements reçus est réduite. L’équipement de protection doit donc être porté, même s’il apparaît pénible de s’harnacher de la sorte pour réaliser une radiographie qui va durer quelques secondes. Attention, les rayons X sont des ennemis invisibles qu’il est facile de sous-estimer. Mais après 40 années ou plus de pratique, le respect de ces mesures de sécurité fera la différence en matière de rayonnements reçus.

Une surveillance est imposée par la réglementation

Le personnel des cabinets et des cliniques vétérinaires est classé dans la catégorie du personnel à suivi médical particulier (surveillance médicale renforcée) en raison de l’exposition aux rayonnements ionisants.

Le port d’un dosimètre individuel et nominatif est obligatoire, dès l’arrivée dans les locaux. Ce dosimètre est accroché à la blouse, porté en permanence sans avoir à y penser. L’employeur est responsable du suivi global des rayonnements émis (dosimètre témoin dans la clinique et dosimètre d’ambiance dans la salle de radiologie) et du contrôle du générateur. Dans certaines structures spécialisées ou de référé réalisant beaucoup de clichés, des dosimètres opérationnels (dont la lecture est immédiate et non différée) et des dosimètres d’extrémités peuvent être recommandés.

Lors de la création du poste d’ASV, la rédaction d’une fiche d’exposition est obligatoire. Elle liste les risques physiques, chimiques, biologiques, radiologiques, psychosociaux et de coactivité inhérents au poste. Concernant l’approche radiologique, la fiche détaille les équipements de protection individuels (tablier, par exemple) et collectifs (paravent) existant dans la structure, la position de l’ASV lors de la réalisation des clichés et le nombre approximatif de clichés réalisés en sa présence par an.

Enfin, le personnel susceptible d’intervenir en zone surveillée ou contrôlée bénéficie d’une formation à la radioprotection, qui porte sur les risques liés à l’exposition aux rayonnements ionisants, sur les procédures générales de radioprotection mises en œuvre dans l’établissement, ainsi que sur les règles. Les salariés sont tenus de signer les documents. En effet, la radiographie d’un animal est certes un acte utile, fréquent et banal, mais il ne faut pas oublier que les rayons X, invisibles, sont potentiellement dangereux et qu’il est important de bien respecter les règles de protection et de sécurité en salle de radiologie afin de préserver sa santé sur son lieu de travail.

Les multiples indications de la radiologie

La radiologie est un examen de première intention dans de nombreuses situations cliniques.

• Lors de signes thoraciques (toux, difficulté à respirer, essoufflement), la radiographie identifie la localisation des lésions (thorax, médiastin, cœur, poumons) et les caractérise (hernie, opacification du champ pulmonaire, tumeur, épanchement, etc.). Ces renseignements permettent éventuellement de recommander d’autres investigations : des examens d’imagerie (échographie cardiaque, par exemple, si le vétérinaire a identifié une image anormale au niveau du cœur) ou autres (ponction, chirurgie exploratoire, etc.).

• En cas de pathologie abdominale (troubles urinaires, gastro-intestinaux, gynécologiques, gestation), la radiographie permet d’observer les organes (taille, forme, aspect), l’organisation spatiale de l’abdomen, de détecter la présence de corps étrangers (plombs, corps étrangers gastriques) ou de calculs (urinaires, urétraux ou rénaux). Elle est aussi utile pour compter le nombre de fœtus à naître chez une femelle en gestation.

Comme en radiologie thoracique, cet examen peut en appeler d’autres : échographie abdominale, radiographie avec produit de contraste, ponction, laparotomie exploratrice.

• Face à un trouble orthopédique (boiterie spontanée, douleur à la manipulation, tuméfaction, trouble de la démarche), la radiographie offre une excellente visualisation du squelette de l’animal, qui suffit souvent à identifier une fracture ou un traumatisme osseux ou articulaire, une malformation (chez le jeune), un trouble du développement (dysplasie du coude ou des hanches), un trouble locomoteur lié à l’âge (arthrose sénile) ou à des séquelles de troubles anciens (arthrose articulaire), une tumeur osseuse (ostéosarcome).

Les règles d’accès à la salle de radiologie

Seules les personnes dont la présence est indispensable se trouvent en salle de radiologie.

Les femmes enceintes n’y sont pas admises. C’est pourquoi il est très important qu’une ASV signale sa grossesse à son employeur dès qu’elle en a connaissance. En effet, une exposition dans les 60 premiers jours du fœtus, au moment où tous les organes se mettent en place, est la plus dangereuse. Elle peut aboutir à des malformations graves, à un développement anormal du système nerveux et même à la mort du fœtus. À partir du 60e jour, un développement anormal, un retard mental, un défaut de croissance ou parfois des cancers sont à redouter. Même si la législation générale du Code du travail n’impose l’information de l’employeur qu’à partir du 3e mois de grossesse, pour sa sécurité et celle de son bébé à venir, la salariée du vétérinaire doit éviter la salle de radiologie dès la conception, si possible.

Les individus de moins de 18 ans sont également exclus de la salle de radiologie, ce qui concerne évidemment les stagiaires de 3e. C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles les formations officielles d’auxiliaires vétérinaires (par APform, par exemple) ne sont pas ouvertes aux mineurs.

Si l’aide du propriétaire est requise (manque de personnel dans la clinique, animal ingérable sans son maître), il doit être informé des risques, s’engager à respecter les mesures de sécurité qui sont définies et être autorisé par le radiologue et/ou la personne compétente en radioprotection (PCR).

Il importe de fermer les portes d’accès avant la mise sous tension du générateur. La lumière rouge signalant que l’appareil est sous tension doit être allumée et bien visible de l’extérieur. Elle interdit l’entrée de toute nouvelle personne dans la pièce.

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